Partenariat, échanges, intérêts mutuels: ce sont les crédos du moment de la politique «tunisienne » des États-Unis d’Amérique, réitérés jeudi par le énième haut responsable américain à visiter la Tunisie depuis le 14 janvier.


Tamara Wittes, sous-secrétaire pour les Affaires du Proche-Orient au Département d’Etat américain, a déclaré jeudi qu’elle a fait le voyage «pour d’abord écouter les Tunisiens parler de leurs plans pour la réussite de la transition démocratique et pour mettre en place les meilleures façons de collaborer (avec les Tunisiens)».
En visite de quelques jours parmi nous, Dr. Wittes a tenu à souligner le désir des Américains «de focaliser sur les intérêts communs». Tous les responsables américains qui ont visité la Tunisie ces dernières semaines, y compris la secrétaire d’État Hillary Clinton, se sont en effet contenté du rôle d’interlocuteur attentif, avant de réagir ou d’avancer des propositions et des politiques concrètes. «Nous privilégions le partenariat et l’échange », insiste la responsable américaine.
Mais que lui ont dit ses «partenaires» tunisiens?  «J’ai entendu parler de grandes difficultés, voire de malheurs économiques, ceux qui ont contribué à déclencher la révolution ont besoin d’investissements, aussi bien tunisiens que de l’étranger».

A-t-on encore besoin de la Mepi?
Et qu’en est-il de l’Initiative de Partenariat au Moyen Orient (Mepi), dont Tamara Wittes s’occupe au Département d’Etat?
Ça a été «un grand succès», répond-elle, précisant que «l’initiative a beaucoup aidé les États-Unis à construire des partenariats dans la région qu’elle couvre et mieux comprendre les priorités locales».
Elle estime qu’au cours des neuf ans de l’existence de la Mepi, «la société civile, la classe politique et la jeunesse des pays arabes ont énormément évolué. Les associations dans les différents pays sont devenues plus actives et plus interconnectées. La Mepi nous a aussi permis de comprendre les défis rencontrés par les pays arabes, dont les plus importants sont la dignité, la corruption des régimes, la liberté de faire ses propres choix, et les façons dont elles affectent les peuples de la région».
Quand Hillary Clinton parlait de l’importance d’échanger avec les peuples de ces défis, à Doha en janvier dernier, la révolution battait son plein en Tunisie. «Assez symbolique», selon Wittes.

Les Etats-Unis et les élections en Tunisie
Les élections du 24 juillet prochain constitueront le premier challenge sérieux aussi bien pour la Tunisie que pour ses partenaires occidentaux. Comment les États-Unis apporteront-ils leur soutien et leur partenariat à cette expérience historique?
«La démocratie en Tunisie ne peut être véhiculée que par les Tunisiens eux-mêmes et la procédure doit être purement tunisienne», nous dit Tamara Wittes, avançant l’exemple de la presse tunisienne qui, selon elle, est rapidement passée d’un secteur totalement contrôlé par l’Etat à une presse libre et ouverte. Pas vraiment à ce point, quand-même!
Quel apport américain à la transition tunisienne, alors? Wittes cite deux mécanismes pour ce qu’elle appelle partenariat à la transition: l’aide directe (les dons) à des projets bien déterminés, une action dont s’occupera l’ambassade des États-Unis à Tunis, d’une part et les 20 millions de dollars décidés à cet effet par l’administration américaine en mars dernier, d’autre part.
Mme Wittes a réitéré son souhait que les Américains soient invités en tant qu’observateurs lors des prochaines élections. «Nous savons qu’un grand nombre d’organisations de par le monde voudront superviser et protéger cette échéance mais nous le feront aussi volontiers. La procédure électorale nécessite beaucoup d’organisation et de formation et ce sera une autre arène où nous souhaiterons collaborer». «Quant aux élections elles-mêmes, nous somme convaincus que c’est les Tunisiens qui décideront de leur propre avenir, à travers un processus où ils choisiront pour eux-mêmes».
Pour ce qui est de l’état des lieux au Moyen-Orient au vu des récents développements sociaux, politiques et militaires, Wittes admet que «le statu quo n’est pas durable*» et pense que la stabilité sur le long terme «est vitale » pour la démocratie dans la région.
«Nous avons un grand intérêt pour la stabilité et la prospérité dans la région, a-t-elle dit, et nous continuerons de supporter les négociations entre Palestiniens et Israéliens pour atteindre une paix de commun accord**».

Mourad Teyeb

* Durable : Wittes a utilisé le terme «sustainable».
** Une paix de commun accord: «negotiated peace».