C’est peut-être un lapsus, mais il exprime bien une position de rejet viscéral des laïques. Rached Ghannouchi a dénoncé lundi soir sur Al-Jazira ce qu’il a appelé l’«Al-Qaïda des laïques» («Qaïdat al-îlmaniyyine»).
Interrogé sur l’assassinat d’Oussama Ben Laden, l’ex-chef du réseau terroriste Al-Qaïda, Rached Ghannouchi a évoqué la survivance de l’extrémisme sous d’autres formes. Evoquant ses adversaires, qui ont empêché une réunion de son parti samedi à Monastir, le dirigeant d’Ennahdha, le parti islamiste tunisien, a cru pouvoir stigmatiser ce qu’il a appelé l’«Al-Qaïda des laïques» («Qaïdat al-îlmaniyyine»).
M. Ghannouchi, qui s’était quelque peu emporté, a perdu son self control. Mais rien ne peut justifier son dérapage. L’expression «Qaïdat al-îlmaniyyine» est pour le moins excessive, car, si le djihadisme au nom de l’islam s’est illustré jusque là par des actions violentes et meurtrières, notamment par des attentats terroristes qui ont fait des dizaines de milliers de morts à travers le monde, d’ailleurs en majorité musulmans, on ne peut pas dire autant des laïques, qui ont toujours inscrit leur combat sur le plan des idées. Leurs actions ont toujours été pacifiques. Qu’il y ait eu quelques échauffourées, ici ou là, entre des groupes islamistes et d’autres laïques, rien n’autorise le chef d’Ennahdha de traiter ces derniers de… terroristes.
Décidément, M. Ghannouchi a perdu là une bonne occasion de se taire.
Il est aussi intéressant de constater que plus le leader des islamistes tunisiens parle, plus il dérape et moins il convainc. Sa supposée modération, couleuvre qu’il s’échine à vouloir faire avaler aux Tunisiens, se transforme aussitôt en excès de langage. Et en excès tout court…
Ridha Kéfi