«La Tunisie n’est pas une chaise longue. Elle n’est pas seulement le soleil et la mer et des villes côtières. Elle est aussi des régions riches de par leurs autres cultures», a déclaré Michèle Sabban.


Après la signature, vendredi à Tunis, d’un contrat d’engagement entre les régions de la Tunisie et celles d’Europe, par Michèle Sabban, présidente de l’Assemblée des régions d’Europe (Are), et Abderrazak Zouari, ministre du Développement régional, les félicitations ont fusé de partout. C’est exactement comme dans une cérémonie de mariage avec un contrat d’engagement, beaucoup de sourires et d’émotions. Et même des «Mabrouk!» sonores. Sauf  qu’il n’y a pas eu ni tambours battants ni confettis ni encore des dragées offertes aux nombreux invités du jour. L’essentiel est que les régions tunisiennes rattrapent le wagon des 271 autres régions membres de l’Are et puissent avancer dans un environnement propice.

 

«Les gens ne peuvent plus attendre»
Devant un parterre de journalistes et les membres de sa délégation, Mme Sabban a exprimé sa vive émotion d’avoir visité la Tunisie après la révolution et sa volonté de soutenir les jeunes tunisiens. Elle a dit que la Tunisie, de par sa proximité géographique et vu ce moment de son histoire, mérite d’être aidée.
«L’Europe vous a regardés, écoutés, mais l’Europe doit aussi vous aider. Car la Tunisie a besoin de l’Europe et l’Europe a besoin de la Tunisie. La Méditerranée ne doit pas nous séparer mais, au contraire, nous rassembler», a-t-elle affirmé. Et de préciser que lors de son passage de seulement 48 heures, elle a compris des choses dans la Tunisie profonde. «Même si notre séjour est court, nous avons pu voir des signaux. Nous avons rencontré plusieurs ministres, parlé avec des personnes de la chambre économique et de la société civile et nous avons compris que c’est tellement beau, tellement puissant de faire cette révolution, mais derrière tout ça, il y a un énorme travail», a-t-elle dit. Et d’insister que l’essentiel est d’accompagner au plus tôt les régions. Car, selon elle, l’avenir de la Tunisie réside dans ces régions-là.


Saïd Aïdi, Michèle Sabban et Abderrazak Zouari

«J’ai senti qu’il y a urgence. Les gens ne peuvent plus attendre. Comment va-on gérer cette attente après le souffle de la liberté? Il faut des solutions pérennes. Et dans les régions, il y a des secteurs entiers spécifiques qui ne sont pas exploités… Nous avons eu l’expérience réussie avec la Pologne, la Turquie et autres Etats de l’Amérique latine et croyez-moi, rien ne vaut le développement des régions pour s’en sortir», a ajouté Mme Sabban. Qui a précisé que la Tunisie n’est pas une chaise longue. Elle n’est pas seulement le soleil et la mer et des villes côtières, mais des régions riches de par leurs autres cultures.

Tout passe par la formation et la gouvernance locale
L’hôte de Tunis a mis l’accent sur l’expertise de l’Are en matière de formation professionnelle. Selon elle, l’insertion des jeunes diplômés dans le marché du travail ne se fait qu’à travers la formation professionnelle. Que propose-t-elle? «L’Eurodyssée, un programme de formation piloté depuis 25 ans par l’Are, pourrait aider au développement économique à travers les Pme et favoriser le rapprochement et les échanges d’affaires entre les entrepreneurs tunisiens et européens», a répondu Mme Sabban.
Sur la même longueur d’onde, Saïd Aïdi, ministre actuel de l’Emploi et de la Formation professionnelle, a déclaré, pour sa part, que cet accord va permettre à 150 jeunes Tunisiens de se rendre dans les régions européennes membres de l’Are pour s’inspirer de l’expérience de ces pays. Selon Mme Sabban, il y aura des jeunes européens qui se déplaceront aussi en Tunisie pour travailler sur les métiers des régions et donner sur place une formation.
Interrogé sur la gestion de l’attente des jeunes et l’explosion des demandes, le ministre du Développement régional a mis en exergue l’accord signé avec l’Are pour ouvrir à court, moyen et long termes des perspectives aux jeunes dans les 24 régions du pays et que l’objectif de ce partenariat est de hisser le développement national grâce à une nouvelle répartition dans les régions.
«On ne peut pas corriger facilement le déséquilibre de 50 ans. Nous oeuvrons pour une nouvelle politique, celle d’une véritable décentralisation. Les régions auront à gérer leur propre chemin de développement et avoir leur autonomie. Ce contrat n’est pas entre l’Etat tunisien et les régions, mais, je rappelle qu’il est interrégional», a-t-il plaidé, tout comme son homologue, le ministre de l’Emploi et de la Formation, qui a appelé à ce que la bonne gouvernance locale devienne une culture chez le Tunisien.
Après la signature de l’accord, Mme Sabban a dit que l’heure est au boulot et qu’elle doit aller vite à la sensibilisation des 270 autres régions des 34 Etats membres. «Nos partenaires tunisiens vont mettre 15 jours pour nous envoyer leurs demandes. Il nous faut 15 jours pour commencer à mettre les premières pierres de notre partenariat, basé essentiellement sur la formation. Il nous faut un mois», a-t-elle conclu avant de rappeler qu’il ne faut pas aussi faire de l’excès de vitesse. Pourvu que du côté tunisien, il n’y ait pas du retard bien sûr!

Zohra Abid