Dans un discours, jeudi, consacré aux révolutions arabes, Barak Obama a rendu un vibrant hommage à la révolution tunisienne et à Mohamed Bouazizi, qu’il a comparé à l’héroïne américaine Rosa Parks*. Extraits…
«Cette histoire de l’autodétermination a commencé il y a six mois en Tunisie. Le 17 décembre, un jeune vendeur du nom de Mohammed Bouazizi a été humilié quand un agent de police a confisqué sa charrette. Ce n’était pas un cas isolé. C’est le même genre d’humiliation qui a lieu tous les jours dans de nombreuses régions du monde – la tyrannie implacable de gouvernements qui nient la dignité des citoyens. Sauf que, cette fois, les choses se sont passées autrement. Les autorités locales ayant refusé d’entendre ses plaintes, ce jeune homme, qui n'avait jamais été particulièrement actif en politique, s’est rendu au siège du gouvernorat local, s’est aspergé d’essence, et s’est immolé par le feu.
La dignité du vendeur de rue et la force brute du dictateur
«Il y a des moments dans le cours de l’histoire où les actions des citoyens ordinaires déclenchent des mouvements pour le changement parce qu’elles expriment un désir de liberté qui a germer pendant plusieurs années. En Amérique, pensez à la défiance de ces patriotes de Boston qui ont refusé de payer des impôts pour un roi, ou à la dignité de Rosa Parks au moment où elle était assise sur son siège avec courage. Cela s’est donc passé en Tunisie, où l’acte de désespoir de ce vendeur a creusé le sentiment de frustration ressentie dans tout le pays. Des centaines de manifestants sont descendus dans les rues, puis des milliers. Et faisant face à des matraques, et parfois à des balles, ils ont refusé de rentrer à la maison – jour après jour, semaine après semaine – jusqu’à ce qu’un dictateur qui a régné plus de deux décennies se résigne à quitter le pouvoir.
«Nous sommes donc face à une occasion historique. Nous avons la chance de montrer que pour l’Amérique la dignité du vendeur de rue a plus de valeur que la force brute du dictateur tunisien. Il ne doit y avoir aucun doute que les États-Unis d’Amérique se félicitent du changement qui fait avancer l’autodétermination.
Accompagner le monde tel qu’il devrait être
«Oui, il y aura des dangers qui accompagneront ce moment de promesse. Mais après avoir accepté, pendant des décennies, le monde tel qu’il est dans la région, nous avons une chance d’accompagner le monde tel qu’il devrait être.
«Bien sûr, comme nous le faisons, nous devons agir avec un sentiment d’humilité. Ce n'est pas l’Amérique qui a fait sortir les gens dans les rues de Tunis ou du Caire – ce sont les gens eux-mêmes qui ont lancé ces mouvements, et ce sont les gens eux-mêmes qui doivent en fin de compte déterminer leurs objectifs.
«Permettez-moi d’être précis. Premièrement, la politique des États-Unis consistera à promouvoir la réforme dans la région, et à soutenir la transition vers la démocratie. Cet effort commence en Egypte et en Tunisie, où les enjeux sont importants – la Tunisie a été à l’avant-garde de cette vague démocratique, et l’Egypte est à la fois un partenaire de longue date et la plus grande nation du monde arabe. Les deux pays peuvent constituer un bon exemple grâce à des élections libres et équitables, à une société civile dynamique, responsable et efficace, à des institutions démocratiques, et à un leadership régional responsable. Mais notre soutien doit aussi s'étendre à des pays où les transitions n’ont pas encore eu lieu.»
Traduit de l’anglais par Imed Bahri
* Une couturière qui devint une figure emblématique de la lutte contre la ségrégation raciale aux États-Unis, ce qui lui vaut le surnom de «mère du mouvement des droits civiques» de la part du Congrès américain. Parks est devenue célèbre le 1er décembre 1955, à Montgomery (Alabama) en refusant de céder sa place à un passager blanc dans un bus.