Béji Caïd Essebsi, Premier ministre du Gouvernement de transition, a estimé vendredi, à Deauville, que le Sommet du G8, auquel la Tunisie a pris part pour la première fois, a donné des signaux forts d’encouragement au processus de démocratisation en cours dans le pays. Le pays, a-t-il dit, recevra un soutien économique à même de renforcer sa marche vers la démocratie. «Nous avons eu des assurances que les choses vont aller de mieux en mieux», a-t-il ajouté, lors d’une conférence de presse tenue avec le ministre des Finances, Jalloul Ayed, affirmant cependant, qu’on ne «peut pas être totalement satisfait» de ces résultats.
Compter sur ses propres moyens
M. Béji Caïd Essebsi a affirmé que la Tunisie compte d’abord sur ses propres moyens puis sur l’appui de ses différents partenaires dans le monde, pour la mise en œuvre de son plan de développement économique.
Interrogé sur le report des élections proposé par la Haute instance indépendante pour les élections, M. Essebsi a rappelé les propositions des deux parties, gouvernement et instance, notant qu’il ne s’agit pas d’un report mais plutôt d’un changement de date qui est à l’examen et ce dans l’objectif d’organiser des élections «irréprochables».
L’organisation des élections a été évoqué dans l’entretien qu’au eu le Premier ministre avec le secrétaire général des Nations-Unies, Ban Ki-moon. La Tunisie a demandé, à cet égard, une aide financière et technique dans ce domaine.
Par ailleurs, M. Caïd Essebsi, qui a dirigé la délégation tunisienne au sommet du G8, a eu vendredi des entretiens notamment, avec le président américain Barack Obama et le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso.
Il a présenté lors d’une séance de travail à huit-clos consacrée à la transition démocratique dans les pays arabes, un plan économique requérant un soutien financier de 25 milliards de dollars, une intégration approfondie avec l’Union européenne, des accords de libre échange avec les autres pays du G8 et une aide au rapprochement et au dialogue entre les peuples.
La révolution tunisienne: un bien public mondial
M. Caïd Essebsi a appelé les dirigeants du G8 à adopter un plan d’appui à la révolution tunisienne en considérant celle-ci comme un bien public mondial. «Il s’agit là d’un enjeu à la fois politique et économique», a-t-il affirmé. L’enjeu est politique car un échec de la transition démocratique serait une sévère défaite pour la démocratie dans le monde, a indiqué le Premier ministre. Et d’ajouter que l’enjeu économique reste très important, car il est de la responsabilité de la communauté internationale d’éviter le cercle vicieux: pauvreté et augmentation du chômage entraînant une poussée des extrémismes qui, à son tour, conduit à l’accroissement de la pauvreté et du chômage ainsi qu’à la multiplication des vagues de migrations.
M. Essebsi a indiqué que ce besoin revêt un caractère urgent «afin d’éviter la phase de décroissance souvent observée dans les transitions démocratiques, décroissance que nos économies et nos sociétés ne peuvent se permettre». «La Tunisie sait compter sur ses propres forces. Mais pour faire aboutir le processus qu’elle a engagé, elle a besoin du support volontariste de la communauté internationale pour réussir sa transition économique et sociale», a-t-il affirmé, ajoutant qu’un plan G8 viendrait en appui au programme de développement économique et social ambitieux que nous avons engagé pour bâtir une Tunisie prospère et stable.
Sur le court terme, le plan de soutien du G8 a pour objectif de faire face à la baisse d’activité dans des secteurs clés de l’économie comme le tourisme et de répondre aux défis immédiats en termes d’appui budgétaire, de soutien aux régions et l’emploi, d’aide humanitaire et sanitaire pour les réfugiés de Libye et de maintien des équilibres économiques et sociaux du pays.
Sur le long terme, le plan comprendrait un soutien dans la durée à notre programme de développement économique et social, dont la réalisation s’étalera sur cinq ans, et qui est articulé autour de cinq priorités, a indiqué le Premier ministre. Il s’agit de mettre en place une meilleure gouvernance, accélérer l’équipement des régions en infrastructures, développer le capital humain, garantir l’intégration aux marchés internationaux et la transformation du secteur financier.
Evoquant le volet financier du plan, le Premier ministre a indiqué que «la Tunisie a besoin d’un apport financier de 25 milliards de dollars sur 5 ans en ressources additionnelles, dont 5 milliards de dollars à court terme, afin de mobiliser des ressources supplémentaires, nationales et internationales, publiques et privées quatre fois supérieures pour couvrir les besoins relatifs à la transition».
Aide de l’Onu à l’élection de l’Assemblée constituante
Par ailleurs, la Tunisie a demandé, en marge du sommet du G8, à Deauville, une aide onusienne pour l’organisation des élections de l’assemblée constituante et la gestion de la situation sur ses frontières avec la Libye, théâtre d’une guerre civile depuis quelques mois.
Cette demande a été formulée lors de l’entretien qu’a eu, jeudi soir, M. Caïd Essebsi avec M. Ban Ki-moon, secrétaire général des Nations Unies. Au cours de cet entretien, l’accent a été mis sur l’assistance technique et financière que pourrait apporter l’Onu à la Haute instance indépendante pour les élections, dans la préparation et la gestion des élections de l’Assemblée constituante, a indiqué Rafaa Ben Achour, ministre délégué auprès du Premier ministre.
Concernant la situation sur la frontière tuniso- libyenne, la Tunisie a demandé à l’Onu et à la communauté internationale l’utilisation d’une partie des fonds libyens gelés dans les pays occidentaux pour le financement de l’approvisionnement du peuple libyen en produits de première nécessité. Il s’agit, a précisé M. Ben Achour, de mettre en œuvre les résolutions onusiennes prises dans ce domaine. La Tunisie, constitue un des principaux points de transit des marchandises vers la Libye.
La requête tunisienne a, également, porté sur les moyens de gérer la situation «catastrophique» de certains réfugiés installés au sud du pays et les moyens de les évacuer vers d’autres Etats. Depuis le déclenchement de la crise libyenne, la Tunisie a accueilli sur son territoire environ 420.000 réfugiés. Environ 60.000 Libyens y résident encore.
Par ailleurs, M. Caïd Essebsi a eu, jeudi, des entretiens avec le directeur général adjoint du fonds monétaire International (Fmi) John Lipsky, le Premier ministre italien Silvio Berlusconi et la chancelière allemande, Angela Merkel.
Les entretiens ont, notamment, porté sur le plan économique présenté par la Tunisie. La chancelière allemande s’est félicitée de la transition démocratique engagée en Tunisie et exprimé le soutien de son pays à ce processus.
La délégation tunisienne au G8, dirigée par M. Caid Essebsi, est, notamment, composée des ministres des Affaires étrangères et des Finances, ainsi que du gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (Bct).
Source: Tap.