C’est ainsi que, dans une déclaration rendue publique à l’occasion de la célébration dimanche de la journée mondiale de soutien aux victimes de la torture, le ministère de la Justice a cru devoir appeler toutes les composantes du pouvoir judiciaire à déployer des efforts pour demander des comptes et poursuivre en justice les personnes impliquées dans des affaires de torture, et pour faire la lumière sur des pratiques dégradantes pour la dignité humaine et portant atteinte à l’intégrité physique durant l'ancien régime.
Réhabiliter les victimes de la torture
Le ministère met aussi l’accent sur la nécessité de réhabiliter les victimes de la torture en leur accordant, ainsi qu’à leurs familles, des indemnisations pour les préjudices moraux et physiques qu’ils ont subis.
«Aider les victimes à surmonter les séquelles de la torture est une question publique qui intéresse toutes les composantes de la société et exige de faire la lumière sur les dossiers de la torture, afin qu’il soit possible de débarrasser la mémoire individuelle et collective de ses conséquences négatives, conformément aux principes de la justice transitoire», souligne le communiqué.
Le ministère élabore actuellement des projets de cadres juridiques permettant l’harmonisation des législations nationales avec les standards internationaux relatifs aux droits humains et aux libertés fondamentales. Il s'agit aussi d’instaurer de meilleurs mécanismes de lutte contre les crimes de torture et d’instituer de lourdes peines considérant ces crimes comme imprescriptibles et ne pouvant bénéficier de l’amnistie générale.
«Ce choix est dicté par les nobles objectifs de la révolution pour la garantie du respect des principes de la Déclaration universelle des droits de l’homme et autres conventions internationales, en particulier, la Convention internationale de lutte contre la torture et autres peines ou traitements cruels et son protocole facultatif auquel a adhéré la Tunisie le 14 mai 2011», indique le communiqué.
A quand l’impunité des tortionnaires?
Voilà pour la langue de bois officielle. En vérité, si on connaît les victimes, leurs souffrances, leurs vies détruites, et si des listes des tortionnaires circulent sur ne Net, il y a eu – ou pas du tout – de procès à l’encontre de ces derniers. A qui incombe la faute? Aux autorités judiciaires, quoi ont fermé longtemps les yeux face à ce phénomène et qui, aujourd’hui, ne montrent pas beaucoup d’empressement à se rattraper, ne fut-ce que par acquit de conscience? Aux représentants de la société civile, qui semblent démobilisés et pressés de cueillir les fruits de leurs combats passés contre Ben Ali? Aux victimes elles-mêmes, qui peinent à s’organiser dans des associations et à diligenter des procès contre leurs bourreaux?
Quoi qu’il en soit, le constat est terriblement frustrant : les bourreaux courent toujours et l’impunité reste la première marque de la révolution tunisienne. Qui l’eut cru?
Imed Bahri