Les violences attribuées à de présumés salafistes, dimanche, au CinémAfricArt, ont suscité des réactions en chaîne au sein du Congrès pour la République (Cpr), qui a distribué… les accusations.


Alors que Moncef Marzouki, secrétaire général du parti, a condamné vivement ces violences à Kapitalis, qui a rapporté ses propos mardi dernier, où il s’est gardé de désigner d’éventuels responsables, Abdelwaheb Maatar, membre du bureau politique du Cpr , a affirmé, de son côté, dans une note diffusée sur la page Facebook du parti, que «les gens qui ont fait le film et ceux qui se sont attaqués à eux (…) sont fautifs», car, explique-t-il, «on aurait dû traiter l’affaire sous cet angle et non prendre le parti d’une partie contre une autre».

Une «tentative de provocation»?
M. Maatar estime que les salafistes, souvent «qualifiés de rétrogrades», auraient été bien inspirés d’«éviter de tomber dans ce piège». Il explique: «Nous sommes pour la liberté d’expression et de croyance, mais nous sommes aussi pour le droit des gens au respect de leurs symboles et de leurs sentiments». Rejetant dos-à-dois les deux parties, il conclue: «A tous, je dis que le Cpr n’a pas pris position dans cette affaire».
Affirmation pour le moins surprenante, car M. Maatar ne se contente pas ici de «démentir» (à moitié) M. Marzouki, mais il va plus loin en affirmant tenir des informations attestant que le film ‘‘Ni Allah ni Maître’’ de Nadia El Fani, à l’origine de la polémique ayant dégénéré en violence lors de sa projection dimanche à Tunis, «participe d’une tentative de provocation politique». Selon Maatar, tout dans ce film, «son financement et le choix de la date de sa  projection et du lieu de cette projection au cœur de la capitale», participe d’une «volonté délibérée de provocation». Qui vise, selon lui, à exclure ce qu’il appelle «les forces patriotiques» et à assurer le succès «du front moderniste, du mouvement Ettajdid, des Femmes démocrates, de la Ligue [des droits de l’homme, Ndlr] et des groupes francophones qui ont divisé le pays, comme l’avait fait jadis Ben Ali, entre modernistes et réactionnaires, au lieu de concentrer leurs efforts pour faire le tri entre les forces révolutionnaires et celles de la contre-révolution.»

Qui infiltre les salafistes?
M. Marzouki a-t-il parlé trop vite? Manquait-il d’éléments au moment de faire ses premières déclarations? En tout cas, il a senti le besoin, au cours de la conférence de presse donnée vendredi, de mieux préciser sa position en mettant en garde «contre les instigateurs des troubles survenus dans la salle CinémAfric’Art qui sont, a-t-il dit, les laïques, les fondamentalistes religieux et les services des renseignements généraux qui cherchent à embraser la situation».
Voilà qui ajoute à la confusion en désignant de nouveaux responsables: les services de renseignements généraux, accusés ainsi ouvertement d’avoir infiltré les salafistes et provoqué les violences contre la salle CinémAfricArt, dimanche, et des agressions contre des avocats, mardi, devant le Palais se justice de Tunis.
Pour lever toute équivoque sur le rôle de ses services dans cette affaire, le ministère de l’Intérieur serait bien inspiré d’identifier les auteurs de ces violences et des agressions. Et de les traduire devant la justice…
En cette phase difficile que traverse le pays, les pyromanes, quels qu’ils soient, doivent être mis hors d’état de nuire.

Imed Bahri

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