La Tunisie célèbre, aujourd’hui, le 54e anniversaire de la proclamation de la république pour la première fois après la révolution du 14 janvier 2011, dans un climat politique marqué par des tiraillements au sein de la Haute instance pour la réalisation des objectifs de la révolution, des doutes sur la capacité du gouvernement provisoire à stabiliser la situation sécuritaire et à relancer une machine économique qui se grippe dangereusement.
Oppositions idéologiques et doctrinaires futiles et décalées
A l’heure où la Tunisie vit une phase historique après la révolution de la liberté et de la dignité, l’instauration d’un consensus national, objectif ultime des élections du 23 octobre prochain, n’est pas encore atteint, pris entre les tenailles d’oppositions idéologiques et doctrinaires futiles et complètement décalées, comme si les problèmes de la Tunisie aujourd’hui ce ne sont pas le chômage, les inégalités régionales et la hausse des prix des produits de première nécessité, mais la laïcité, le statut de la femme et la place de la religion dans la vie publique.
Par ailleurs, la volatilité de la situation sécuritaire n’est pas attribuable uniquement aux actes de violence et d’agressions sporadiques ciblant des citoyens et des biens publics et privés, souvent attribuées à des «parties» qualifiées d’ennemies de la révolution mais jamais nommées et démasquées. Cette situation est due aussi à la situation instable sur les frontières tuniso-libyennes, à cause de la crise libyenne et des flux massifs de réfugiés fuyant ce pays voisin.
La fête de la république coïncide aussi avec une situation économique et sociale difficile avec un taux de croissance qui avoisine, selon les estimations du gouvernement de transition, 0%, une forte baisse des recettes du tourisme (-50%) et une raréfaction de l’investissement intérieur et extérieur, échaudé par l’incertitude actuelle quant à l’évolution de la situation dans toute la région.
Se prémunir contre les risques de régression
Les Tunisiens célèbrent, néanmoins, le 54e anniversaire de la proclamation de la république après la révolution du 14 janvier qui s’est déclenchée contre l’oppression et l’injustice et contre un système qui a dévié des principes républicains prônés par les précurseurs du mouvement réformiste et de libération nationale. Ces principes mêmes qui se sont cristallisés, le 25 juillet 1957, par la proclamation de la république et l’abolition de la monarchie.
Le grand défi consiste, incontestablement, en la réalisation effective des objectifs de la révolution et de la transition démocratique, à travers l’instauration d’un régime qui repose, exclusivement, sur la volonté du peuple.
D’aucuns aspirent à la réalisation du pluralisme, de la liberté, de l’égalité et de la justice sociale, tout en préservant les constantes civilisationnelles de la Tunisie: un projet moderniste pour se prémunir contre les soubresauts et les risques de régression.
Ces objectifs qui font l’unanimité des partis politiques, du moins, au niveau du discours, sont confrontés à de multiples difficultés en raison de l’émergence d’intérêts politiques étroits et de la menace d’une polarisation idéologique en rupture totale avec les attentes réelles des Tunisiens, nourrissant ainsi les craintes de contournement des objectifs de la révolution du 14 janvier.
La profusion des partis (plus de cent), qui s’est faite dans l’éparpillement et la divergence de vues, les courants et les sensibilités, n’a fait qu’altérer la confiance des citoyens en quête de programmes clairs et de réponses concrètes à leurs attentes.
La «majorité silencieuse» et les élections du 23 octobre
La montée de courants idéologiques de droite et de gauche, dont certains sont en totale contradiction avec les principes de la république, n’ont pas réussi à atténuer les craintes exprimées face à une «majorité silencieuse» qui affiche encore une certaine désaffection à l’égard de l’inscription sur les listes électorales, question vitale dans la définition des contours de l’avenir politique de la Tunisie.
Ce tableau un peu sombre laisse entrevoir des réactions émanant récemment de partis politiques, d’organisations et d’associations nationales, dénonçant les tentatives visant à instaurer l’anarchie, à inciter à la dérive sécuritaire et à entraver le consensus autour de l’échéance du 23 octobre prochain.
Ces réactions sont venues réaffirmer l’attachement à un processus électoral pacifique qui défend le régime républicain et prône les principes de justice, de liberté, de pluralisme et de démocratie.
D’aucuns croient que le peuple tunisien, initiateur des premières révolutions du 21e siècle, est capable, aujourd’hui, de surmonter cette rude épreuve et de réussir les élections d’une Constituante pour entamer l’élaboration d’une nouvelle Constitution qui répond aux aspirations légitimes des Tunisiens à la liberté et la dignité.
Kapitalis (avec Tap).