Béji Caïd Essebsi se félicite du bilan satisfaisant du gouvernement provisoire et réaffirme sa volonté de passer le témoin au gouvernement issu de l’Assemblée constituante.
Par Ridha Kéfi
Dans un discours diffusé vendredi soir sur la Chaîne de télévision nationale, en présence des membres du gouvernement provisoire au complet, le Premier ministre par intérim a déclaré que les deux principales missions confiées à son gouvernement consistent à organiser les premières élections libres et transparentes en Tunisie et à laisser le pays, au moment de céder le témoin, dans un bien meilleur état que le 6 mars dernier, date de sa mise en place.
Il n’y aura pas de vide à la tête de l’Etat
Sur le premier point, M. Caïd Essebsi s’est montré très confiant. «Nous sommes assurés que ces élections se tiendront dans les meilleures conditions de transparence», a-t-il déclaré. Le président de l’Instance supérieure indépendante pour les élections (Isie), Kamel Jendoubi, «un homme de confiance», lui a affirmé, lorsqu’il l’a reçu, en début de semaine, que les préparatifs allaient bien et que tout allait se passer très bien. «Celui qui se permet d’en douter, douterait en fait de lui-même», a dit M. Caïd essebsi, lançant une pique à Rached Ghannouchi, le chef d’Ennahdha, qui avait menacé, la veille, qu’en cas de «falsification des élections» (sic!), ses troupes descendraient dans la rue.
«Il n’y aura pas de falsification. Cela ne sera pas possible. Tout se passera devant les regards des acteurs et des observateurs locaux et internationaux. Tout se déroulera dans la transparence et on apportera la preuve au monde entier qu’une élection démocratique est possible dans un pays arabe et musulman», a martelé le Premier ministre. Et pour cause : «L’armée, la police et la garde nationale sont mobilisées pour garantir le bon déroulement des opérations électorales», a-t-il précisé. En ajoutant : «Je voudrais rassurer les citoyens que tout se passera bien. Je les invite à faire leur devoir sans peur ni crainte de personne. Si ces élections réussissent comme on s’y attend, ce gouvernement aura tenu l’un de ses principaux engagements».
Le pouvoir sera remis entre des mains sûres
En réponse à ceux qui craignent un vide à la tête de l’Etat à la faveur de la passation du pouvoir entre le gouvernement provisoire et l’Assemblée constituante qui sera élue le 23 octobre, M. Caïd Essebsi s’est voulu tout aussi rassurant. «Il n’y aura pas de vide», a-t-il dit. «Ce gouvernement ne cèdera les rênes du pouvoir qu’après la constitution d’un nouveau gouvernement. Dès que l’Assemblée aura mis en place une nouvelle organisation provisoire des pouvoirs, le gouvernement remettra le pouvoir entre des mains sûres», a expliqué le Premier ministre, en promettant de travailler «avec tous ceux qui seront élus, quels qu’ils soient.»
Rappelant la date butoir du 9 novembre, fixant la fin de l’organisation des pouvoirs actuelle, M. Caïd Essebsi a affirmé : «Il y a une responsabilité et des délais. Nous les respecterons et j’espère que ceux qui viendront après nous feront de même». Est-ce à dire que le prochain gouvernement doit être mis en place avant cette date ? Cela laissera peu de temps aux tractations entre les membres de l’Assemblée constituante, qui reste, de toute façon, souveraine.
Le 2e engagement du gouvernement provisoire, celui de rétablir la situation dans le pays, a été également été respecté, estime le Premier ministre. «Nous n’avons pas dit que nous allons effacer 23 années de malversations en 6 mois», a-t-il dit, en soulignant les priorités qu’il s’était donné : rétablir la sécurité, relancer l’économie, et créer le maximum d’emplois pour atténuer les effets du chômage massif, qui a été l’une des causes du soulèvement populaire ayant remporté l’ancien régime.
La «légitimité fonctionnelle» à l’œuvre
M. Caïd Essebsi, qui a constitué son gouvernement le 6 mars se souvient : «Nous avons trouvé un pays dans un état de grand désordre. Le Premier ministre travaillait à Carthage parce qu’il ne pouvait aller à son bureau à La Kasbah occupée par les manifestants. Nos frontières étaient presque ouvertes. 1,3 millions de réfugiés sont entrés de la Libye en guerre. L’armée, la police et la garde nationale étaient mobilisées pendant 7 mois pour garder les frontières. Près de 11.000 détenus se sont évadés des prisons. Il y avait partout des grèves, des sit-in, des routes coupées...» Or, tout cela fait déjà partie du passé (ou presque). Car, peu à peu, la sécurité a été rétablie. Les gens se sont mis au travail. La machine économique s’est mise à tourner. La paix sociale à été retrouvée. La campagne électorale se déroule normalement.
M. Caïd Essebsi peut aussi être fier de son gouvernement, à la légitimité contestée, et souvent qualifié de «faible», mais qui a su assurer la continuité de l’Etat, en se fondant sur le principe de la «légitimité fonctionnelle». «Dans d’autres pays de la région, il n’y a même pas d’Etat», a-t-il souligné, comme pour inviter les Tunisiens à une vision plus optimiste de l’évolution de la situation dans leur pays.
En d’autres termes : à deux jours des élections, tout est en ordre de marche. Le pays peut redémarrer. A condition que ceux que les Tunisiens éliront le 23 octobre sachent poursuivre l’effort de restauration de l’Etat, de relance de l’économie et de préservation de la paix sociale.