Dans la déclaration préliminaire de sa mission d’observation de l’élection de la Constituante en Tunisie, le Centre Carter constate une participation pacifique et enthousiaste lors de ces élections historiques en Tunisie.


Le Centre Carter a reçu à la mi-juillet une lettre d’invitation de l’Isie afin d’observer le processus électoral, puis l’accréditation officielle le 4 août.

Le Centre a observé l’élection de la Constituante en déployant 65 observateurs qui ont visité 272 bureaux de vote dans tous les gouvernorats du pays.

La mission a été dirigée par l’ancien président de l’Ile Maurice, Cassam Uteem, et le président du Centre Carter, Dr. John Hardman.
Mme Carter a également accompagné la délégation, forte de 25 nationalités différentes.

Dans leur déclaration publiée mardi, les observateurs du Centre Carter ont indiqué que «le processus de vote a été marqué par une participation pacifique et enthousiaste, par des procédures généralement transparentes et par la confiance de la population en la transition démocratique en Tunisie». Les observateurs ajoutent que «les électeurs tunisiens ont attendu patiemment dans les longues queues devant les bureaux de vote, déterminés à prendre part à la première élection historique des mouvements du printemps arabe de 2011».

Ils ont aussi indiqué que «le processus électoral, certes très réussi jusqu’ici, a été néanmoins entravé par une insuffisance d’informations concernant la répartition des électeurs dans les bureaux de vote, ainsi que par le manque de procédures détaillées et de formation sur les éléments clés du processus, y compris le décompte des voix, l’agrégation des résultats et la résolution des litiges électoraux».

Voici, par ailleurs, des extraits des principales conclusions de la mission :

• Des élections pluralistes qui «ont offert à des millions de Tunisiens leur première occasion de voter librement lors d’élections véritablement pluralistes après plus de cinquante ans de régime autoritaire. Les Tunisiens ont voté en grand nombre, faisant preuve de beaucoup d’enthousiasme et de détermination pour consolider les acquis de la révolution.

• Une Commission électorale indépendante. «Pour la première fois, les élections ont été organisées par un organe indépendant, l’Instance supérieure indépendante pour les élections (Isie), qui a bénéficié du soutien du gouvernement à des moments critiques du processus. En un temps relativement court, l’Isie a réussi à gagner la confiance des principales parties prenantes et à être perçue comme impartiale.»

• L’administration électorale. «Tout en reconnaissant le dévouement des agents électoraux dans l’exercice de leurs fonctions, le Centre Carter constate que l’Isie aurait pu s’assurer d’une planification et d’une gestion plus efficaces en établissant un organe technique et administratif solide. Des décisions et des règlements essentiels de l’Isie ont souvent été adoptés avec retard dans le processus, ne laissant pas suffisamment de temps pour former les autorités et les agents électoraux.»

• L’inscription des électeurs. «Pendant la période d’inscription des électeurs aux mois de juillet et août, environ 55% des électeurs potentiels d’après la base de données des cartes d’identité nationales se sont activement enregistrés afin de vérifier leurs données. Les autres ont été considérés comme ayant également le droit de voter et ont finalement été affectés à des bureaux de vote ‘‘spécialisés’’ à travers le pays.»

• Le processus de vote. «Le vote s’est déroulé de façon ordonnée et les agents des bureaux de vote ont largement respecté les procédures. Le traitement des électeurs a commencé lentement, mais le rythme s’est accéléré en cours de journée. Cependant, de nombreux électeurs qui ne s’étaient pas activement enregistrés ont rencontré des difficultés pour repérer leur bureau de vote.»

• Le dépouillement. «Bien que les agents aient suivi le manuel de procédures avec application, le dépouillement a été lent et laborieux en raison du manque d’expérience en la matière, du fait de l’insuffisance des formations sur l’opération de comptage des voix et du nombre élevé de listes de candidats.»

• La participation des représentants des candidats et des observateurs. Ces derniers «étaient présents dans presque tous les bureaux de vote visités. Les représentants des candidats et les observateurs ont généralement joué un rôle très positif, et ont contribué à renforcer la transparence des élections. Cependant dans certains bureaux de vote, les observateurs du Centre Carter ont noté que les observateurs nationaux sont intervenus dans le processus, ce qui malgré leur bonne intention, dépassait leurs prérogatives.»

• L’agrégation des résultats. «Le début de l’agrégation des résultats a été considérablement retardé par le système de collecte du matériel de vote. Le processus de dépouillement manquait de procédures détaillées notamment en ce qui concerne la correction des erreurs matérielles et la prise de décisions relative aux résultats mis en quarantaine.»

• La campagne électorale. «La campagne s’est généralement déroulée de façon pacifique, les candidats pouvant se réunir librement et diffuser leur message au public. L’Isie a tenté d’égaliser les chances entre les listes de candidats, mais l’application des règlements n’a pas toujours été effective. Les observateurs du Centre Carter ont entendu des allégations concernant des dépassements du plafond financier établi par la loi. Des allégations répétées selon lesquelles certains partis auraient reçu des soutiens financiers provenant de l’étranger ont également été portées à la connaissance des observateurs.

• La participation des femmes. «Les femmes tunisiennes ont participé activement au processus électoral, en votant, en participant aux événements de la campagne électorale, en travaillant comme agents électoraux et en observant les élections. Du fait de la parité prévue par la loi, de nombreuses candidates étaient en lice pour les élections. Toutefois, seules 7% de femmes étaient en tête de liste.»

La sensibilisation des électeurs. «La sensibilisation menée par l’Isie était principalement axée sur l’information de base concernant le processus électoral. Des organisations de la société civile, souvent soutenues par des partenaires internationaux, ont entrepris plusieurs initiatives visant à expliquer la signification du processus. Bien que valables, ces initiatives, à elles seules, ne pouvaient pas remplacer une campagne d’éducation civique vaste et soutenue, fort nécessaire à la population pour comprendre le système électoral et le mandat d’une assemblée constituante.»