Dans cet entretien avec Kapitalis, Markus Löning, commissaire allemand pour les droits de l’Homme et l’Aide humanitaire, parle de sa visite en Tunisie : situation politique et droits de l’homme. L’impression est plutôt bonne…

Propos recueillis par Samantha Ben-Rehouma


 

Les entretiens avec les représentants des partis politiques ayant obtenu le plus de votes dans les élections à l’Assemblée constituante le 23 octobre ont été plutôt rassurants. Il faut savoir que les Allemands se sont sentis très proches des Tunisiens après le 14 janvier. Et quand on se rappelle de la manière dont les choses se sont passées après la chute du mur de Berlin dans beaucoup de pays de l’Est, et bien la Tunisie a fait plutôt mieux.

Il faut cesser les prises de position radicales

Est-ce que pour autant, tout le monde doit être ravi de voir un parti islamiste qui se présente comme modéré ? La réponse n’est pas évidente. Regardez la Turquie, en 2001, nous avons eu peur qu’elle bascule vers un régime à l’iranienne et aujourd’hui sa situation s’est nettement améliorée !


Markus Löning et Wolf Kerll

En ce qui concerne la Tunisie, il faut cesser les prises de position radicales qui ne font que ternir l’image du pays comme cette polémique sur les mères célibataires qui est loin d’aider la Tunisie touristiquement et économiquement parlant !

Avec l’élection de l’assemblée constituante, la Tunisie a conclu avec succès la première phase de la transition de la dictature à un ordre politique démocratique. L’Egypte, quant à elle, se heurte encore à ce défi, il nous faudra donc attendre les élections pour y voir plus clair pour l’avenir de ce pays.


Markus Löning et Wolf Kerll

Evidemment, ça fait réfléchir. Le but de ma visite, souligne Markus Löning, doit être perçu comme un signal d'encouragement : les pays, en respectant les opinions de leurs propres citoyens et en permettant la démocratie, recevront un appui non négligeable de notre part. Et pour ce qui est de la Tunisie, nous allons débloquer 50 millions d’euros pour agir en amont et en aval sur toutes les structures de la société, et ce, afin d’encourager le pays à attirer le plus d’investisseurs (l’Allemagne est le quatrième investisseur étranger en Tunisie), de touristes… L’Allemagne a toujours eu des relations proches avec la Tunisie et nous souhaitons vivement que cela dure.

Le nouveau gouvernement sera observé à la loupe

Avant le 23 octobre, rappelons que la Tunisie a ratifié quatre traités extrêmement importants : le premier Protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le Protocole facultatif à la Convention contre la torture et la Convention des Nations Unies sur les disparitions forcées ainsi que la ratification sur le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (Cpi). La Tunisie est devenue le 116e Etat à le ratifier et le premier en Afrique du Nord !

De ce fait, un engagement majeur de la part des nouvelles autorités est la condition sine qua non pour qu’aucune violation future grave des droits humains n’ait lieu en toute impunité.

Espérons donc que la conférence régionale organisée par l’Office fédéral des Affaires étrangères qui a lieu cette semaine avec les défenseurs des droits humains de la région portera ses fruits et fera des émules pour que cesse enfin toute dictature dans le monde et le monde arabe en particulier !