La Commission nationale d’investigation sur les affaires de corruption et de malversation (Cnicm) a affirmé, vendredi, «son indépendance» dans le traitement des dossiers. Qu’il s’agisse de celui d'Abdessalem Jerad ou autre.
Cette réaction est venue suite aux menaces d’Abid Briki, porte-parole de l’Union générale tunisienne des travailleurs (Ugtt), qui, lors d’une conférence de presse mardi à Tunis, s’est montré d’une rare virulence vis-à-vis de la Cnicm et a menacé de la poursuivre en justice. M. Briki a même mis en cause l’indépendance et la crédibilité de cette commission présidée par le juriste Abdelfattah Amor. Poussant le bouchon plus loin, M. Briki a mis en garde tout le monde si l’interdiction de voyager imposée au secrétaire général de l’Ugtt, Abdessalem Jerad n’était pas levé.
«Nous sommes tous avec M. Jerad et nous allons le soutenir jusqu’au bout. Nous avons avec nous la force ouvrière. Nous avons des gens à l’étranger qui nous soutiendront et seront avec nous au moment voulu», a-t-il menacé publiquement.
Cette menace n’est pas tombée dans l’oreille d’un sourd. Le jour même, le tribunal est revenu sur sa décision et a levé l’interdiction de voyager à l’encontre de M. Jerad, soupçonné de corruption et de malversations sous l’ancien régime.
Selon la Cnicm qui a publié vendredi un communiqué en réponse à la campagne menée contre ses membres, a rappelé que le secrétaire général de l’Ugtt est cité dans deux affaires de corruption actuellement examinées par le procureur général du Tribunal de première instance de Tunis. Et de préciser que selon les correspondances trouvées au palais de Carthage, M. Jerad aurait demandé des privilèges en faveur des membres de sa famille ou de certains responsables syndicalistes.
«Nous traitons l’ensemble des dossiers en toute indépendance et quelles que soient les personnes ou structures impliquées conformément aux prérogatives fixées par le décret-loi instituant la commission. Les propos de M. Briki sont infondées», a précisé Neila Chaâbane, membre de la Cnicm.
Les internautes ne sont pas restés insensibles à cette polémique. D’un côté, ils disent que ni M. Briki ni M. Jerad ne représenteront dorénavant l’Ugtt. Et de l’autre, ils se disent déçus par la décision du magistrat, qui a levé l’interdiction de voyager de M. Jerad.
Vendredi, le Syndicat des magistrats tunisiens (Smt) a rendu public un communiqué dénonçant d’un côté les propos de M. Briki, qui cherche à semer des troubles, et de l’autre, les pressions imposées aux magistrats.
«Nous poursuivrons notre mission jusqu’à la mise en place d’une commission permanente de lutte contre la corruption» a soutenu Mme Chaabane. Les critiques adressées à Abdelfattah Amor, selon elle, ne tiennent pas. Le président de la commission, titulaire du Prix national des droits de l’Homme (1998) avait été, durant 11 ans, rapporteur spécial de l’Onu sur la liberté de religion ou de croyance, a encore précisé la Cnicm.
La Commission a présenté jeudi dernier à la presse un rapport faisait part d’abus et d’actes de malversation où serait impliqué l’actuel secrétaire général de la principale organisation syndicale. Ce qui a suscité la colère de M. Briki et quelques uns de ses collègues.