«Entre la France et la Tunisie, il y a une volonté partagée de continuer notre partenariat. Et là-dessus, il n’y a aucune ambiguïté», a déclaré Alain Juppé.
Par Zohra Abid
Quelques instants avant de rentrer en France, le ministre français des Affaires étrangères et européennes, en visite en Tunisie les 5 et 6 janvier, a rencontré les médias au palais Ennejma Ezzahra à Sidi Bou Saïd.
Un petit moment de tourisme
Mais un peu avant dans la matinée, il avait rencontré des représentants de la société civile, fait un petit tour touristique sur les hauteurs de Sidi Bou Saïd et s’est arrêté à la galerie Ammar Farhat, où il a été accueilli par Aïcha Gorgi, la fille du peintre, feu Abdelaziz Gorgi et animatrice du lieu.
M. Juppé qui vient d’effectuer sa deuxième visite en Tunisie depuis le 14 janvier a déclaré qu’il est satisfait de ce qui se passe en Tunisie. «Je suis venu renouveler la confiance de la France dans le processus démocratique en cours et dans l’avenir de la Tunisie ainsi que notre soutien sur les plans économique, social, politique, culturel», a-t-il dit. Et d’ajouter qu’il a été chaleureusement accueilli et qu’il a profité pour faire un petit tour en tant que touriste.
M. Juppé a parlé de ses rencontres «fructueuses» avec des représentants du tissu associatif, notamment de l’association Amal des mères célibataires. «L’an dernier, un forum de la société civile a été organisé par l’ambassade de France en Tunisie. On va le refaire cette année en unissant des associations tunisiennes et françaises». Evoquant la transition vers la démocratie, M. Juppé s’est dit satisfait des élections libres et démocratiques. «Il s’agit d’une culture qui s’acquiert», a-t-il ajouté.
Alain Juppé à Ennejma Ezzahra.
«Nous conseillons aux Français de revenir»
Sur le plan économique, la Tunisie restera le premier partenaire de la France, a indiqué le ministre français. «Il y une volonté partagée par les deux parties pour aller de l’avant – et ceci pour des raisons linguistiques, géographiques, historiques –, dans cette coopération étroite, surtout que des défis économiques et sociaux sont attendus durant la prochaine étape», a estimé M. Juppé.
«Suite aux mouvements sociaux, il y a eu quelques entreprises françaises qui ont fermé, mais la majorité est restée», a encore précisé l’hôte de la Tunisie, tout en émettant l’espoir que la situation se stabilisera rapidement.
M. Juppé a voulu envoyer un message rassurant en direction des investisseurs français. «Il y a inquiétude, mais nous allons conseiller aux Français de revenir en Tunisie. Investir en Tunisie c’est aussi investir en France», a insisté le chef de la diplomatie française.
Evoquant le secteur touristique, Alain Juppé a affirmé que la France est prête à coopérer avec les responsables tunisiens pour développer de nouveaux produits et relancer cette activité compte tenu de son importance dans l'économie tunisienne. «La conjoncture est difficile. Le tourisme tunisien a souffert, mais des réformes structurelles s’imposent et la France peut aider la Tunisie à développer le secteur», a-t-il dit.
Impressionné par l’énergie sociale
M. Juppé, qui a visité une galerie d’art moderne et remarqué l’évolution des arts plastiques en Tunisie, a aussi déclaré : «Pour comprendre une société, il faut regarder notamment ses arts modernes. Et là je suis confiant. Il y a suffisamment d’énergie sociale. Je suis impressionné par la place qu’occupent les femmes et je souhaite bonne chance au peuple tunisien».
Le ministre français a passé en revue ses entretiens avec les membres du nouveau gouvernement et, surtout, les responsables d’Ennahdha qui, a-t-il précisé, se sont montrés «respectueux des principes de l’Etat de droit, de la démocratie, des libertés publiques et privées, ainsi que des droits de la femme et ceux de la minorité».
«En France, il y a près de 15.000 étudiants tunisiens. Parmi les plus performants. Ils réussissent dans les concours les plus durs et ceux qui souhaitent prolonger leur séjour par un emploi sont les bienvenus», a aussi rappelé le ministre d’Etat français, qui ne s’est pas attardé sur les raisons qui ont amené le gouvernement français à augmenter les frais imposés aux étudiants étrangers.
La France, l'islam, la Syrie
Interrogé sur l’amalgame entre islam et extrémisme que font certains dans les pays européens, le ministre français a mis l’accent sur l’attachement de son pays au dialogue des cultures et des civilisations. «Oui, l’extrémisme existe dans plusieurs pays européens et dans ceux de l’Amérique du Nord. C’est une tendance qui fait peur. Il faut la combattre par l’explication des réalités, avec un travail pédagogique qui doit se faire entre toutes les religions. L’islam est une religion de sensibilités diverses, comme toutes les religions. Les modérés doivent négocier et favoriser le dialogue», a répondu M. Juppé.
Quid du conflit israélo-palestinien qui fait du surplace ? Il n’y a d’autre solution que la reprise des négociations et la multiplication des contacts. Et de la crise de la Syrie ? Réponse du ministre : «Il y a dans ce pays un régime des plus barbares, des plus brutaux et des plus sanglants, les prisonniers y sont torturés (...). Nous avons dès le début condamné ses pratiques». Et d’ajouter que, malheureusement, la communauté internationale n’a pas encore pris de décision puisque certains pays opposent toujours leur veto.