La grâce présidentielle accordée au frère du ministre de la Justice Noureddine Bhiri (issu d’Ennahdha), condamné dans une affaire de pédophilie sous l’ancien régime, suscite une grande polémique.


Néji Ben Abdallah Bhiri fait partie des quelques 9.000 prisonniers qui ont bénéficié de la grâce présidentielle à l’occasion du premier anniversaire de la révolution. Il a été condamné à quatre ans de prison pour agression sexuelle sur un enfant, à Jebeniana (centre), où il réside. Il a passé un peu plus de trois ans en taule.

Dès l’annonce de la libération de l’ex-prisonnier, un groupe d’habitants de Jebeniana ont manifesté dans la ville et, notamment, devant la maison des Bhiri, protestant contre le clientélisme et revendiquant l’indépendance de la justice. Des slogans contre le gouvernement et pour l’emploi ont également été scandés. Les manifestations, qui ont pris un caractère syndical et social, se sont poursuivies lundi matin.

Reste que l’affaire Bhiri a continué à faire des gorges chaudes sur les réseaux sociaux. Le ministre de la Justice est-il intervenu en faveur de son frère ?

Noureddine Bhiri, interrogé par nos confrères d’‘‘Al-Oula’’ a confirmé la grâce accordée à son frère, ajoutant que la décision a été prise, en toute légalité et indépendance, par la Commission de grâce et de liberté conditionnelle, conformément aux articles 53, 54, 55 et 56 du Code de procédures pénales. Elle a profité à 9000 autres prisonniers qui offraient les conditions légales exigées dans ce genre de cas.

M. Bhiri a expliqué que son frère «ne pouvait être privé du droit à la grâce, surtout que celle-ci a été décidée dans le respect de la loi et de l’équité entre tous les citoyens, et sans tenir compte des liens de sang ou de l’appartenance régionale». Il a ajouté que les avocats qui ont suivi l’affaire de Néji Bhiri savent qu’elle a été montée de toutes pièces par l’ancien régime pour des raisons politiques, et beaucoup de militants de l’opposition contre Ben Ali en ont fait les frais, comme Taoufik Ben Brik», par allusion aux deux affaires de viol et d’agression intentées contre le journaliste par deux femmes proches des services de Ben Ali, l’une en France et l’autre en Tunisie.

Quoi qu’il en soit, il faut que la transparence prime dans ce genre d’affaires, que la clarté des explications et des mises au point prenne la place des suspicions alimentées par les rumeurs qui polluent aujourd’hui les réseaux sociaux.

Le président de la Commission de grâce et de liberté conditionnelle doit répondre aux interrogations des Tunisiens et justifier la décision de grâce concernant M. Bhiri, car il ne s’agit pas ici d’un citoyen parmi d’autres, mais du frère même du ministre de la Justice. Ce dernier gagnerait beaucoup aussi, ainsi que le gouvernement et le parti auxquels il appartient, à faire toute la lumière sur les raisons ayant présidé à la grâce accordée à son frère.

Imed  Bahri