«Moncef Marzouki semble avoir l’absolue conviction que la charia ne passera pas», a déclaré Rudy Demotte, après son entretien, samedi, avec le président de la République.
S’agit-il là, de la part de M. Marzouki, d’une conviction personnelle, d’un engagement solennel ou d’un double discours : l’un adressé aux partenaires occidentaux de la Tunisie et l’autre à ses alliés islamistes d’Ennahdha auxquels il doit, en grande partie, son poste à la tête de l’Etat ?
«Une phase transitoire, compliquée»
Quoi qu’il en soit, ces propos de M. Marzouki ont été rapportés aux médias belges par le ministre-président de la Wallonie et de la Fédération Wallonie-Bruxelles, Rudy Demotte, qui a rencontré le président de la République, samedi matin, au palais présidentiel de Carthage.
Au cours de cet entretien – dont l’agence officielle Tap n’a rapporté, citant un communiqué de la présidence de la République, que les mièvreries habituelles dans la pure tradition de la langue de bois chère à Zaba –, les deux hommes sont revenus sur la problématique de la liberté de la presse mais aussi de l’éventuelle introduction de la charia – la loi islamique – dans la constitution tunisienne. Ce dont la Tap n’a pas pipé mot !*
«Nous sommes dans une phase transitoire, compliquée», a expliqué Moncef Marzouki à l’issue de l’entretien. «Cependant, je peux vous assurer qu’il existe un consensus au sein des partis de la majorité sur le fait que nous préférerions que la charia ne figure pas dans la constitution. Ce texte doit être basé sur la déclaration universelle des droits de l’homme», a-t-il ajouté.
Demotte reçu à Carthage par Marzouki
«Un homme progressiste sur lequel on peut compter»
«Moncef Marzouki semble avoir l’absolue conviction que la charia ne passera pas», a renchéri Rudy Demotte, dont la visite officielle en Tunisie s’est achevée samedi. «C’est un homme progressiste sur lequel on peut compter», a-t-il poursuivi en rappelant la relance prochaine de la coopération entre la Tunisie et la Fédération Wallonie-Bruxelles, gelée l’an dernier dans la foulée de la révolution tunisienne. «Le président tunisien et les différents représentants du gouvernement que j’ai rencontrés au cours de ces trois jours ont l’air très attachés aux libertés mais cela reste fragile. Je dirais donc : restons vigilants !», a conclu Rudy Demotte.
Si le président Marzouki a une opinion arrêtée sur cette question, assez problématique, de la charia comme source principale de la nouvelle constitution, pourquoi la réserve-t-elle à ses interlocuteurs occidentaux ? Qu’est-ce qui l’empêche de partager ses convictions avec son peuple et d’éclairer ainsi un débat déjà largement pourri ?
Son silence sur cette question, au moment où des prédicateurs appellent à l'instauration de lois moyenâgeuses et appellent à couper la main des voleurs, à lapider les "zounat" et à revenir à la polygamie, est pour le moins inexpliquable, sinon choquant.
Imed Bahri
* Voici ce que rapporte l’agence officielle tunisienne à propos de cette entretien : «Carthage (Tap) – ‘‘La Fédération Wallonie-Bruxelles est disposée à élargir les volets de coopération avec la Tunisie dans les domaines économique, commercial et au niveau de l'enseignement’’, a souligné, samedi, à Tunis, le ministre-Président de la Fédération Rudy Demotte.
S’exprimant lors de sa rencontre samedi à Carthage avec le président de la République provisoire Mohamed Moncef Marzouki, Demotte a réaffirmé le soutien du Royaume de Belgique au processus de transition démocratique en Tunisie.
L’entretien a porté sur les moyens de développer les relations entre la Tunisie et la région de Wallonie et avec la Fédération Wallonie-Bruxelles, a indiqué un communiqué de la présidence de la République.»