Il n’y a pas que les démocrates et progressistes qui s’inquiètent de la montée des salafistes en Tunisie. Le ministre de l’Intérieur, l’islamiste Ali Lârayedh, l’est tout autant. Il confie son inquiétude au journal ‘‘Le Monde’’.
«Tous les salafistes n’utilisent pas la violence mais le modèle de société qu’ils prônent constitue un danger. Cette approche, cette vue très étroite, a un problème avec le passé, un problème avec la modernité, et risque toujours de déboucher sur des guerres», annonce d’emblée le dirigeant d’Ennahdha. Tout en faisant la différence entre les salafistes en général et les «salafistes jihadistes, qui ont recours à la force et représentent un risque contre lequel aucun pays n’est vraiment immunisé», M. Lârayedh estime que ce phénomène «est aujourd’hui le plus grand danger pour la Tunisie et je sais que je vais devoir mener une grande bataille».
Comment le ministre, qui semble si bien averti, compte-t-il gérer ce problème ? En ouvrant aux salafistes la voie d’un parti, «à condition qu’ils répondent aux critères de la loi, pour isoler la minorité qui utilise la violence». Or la loi actuelle n’autorise pas la constitution de partis sur une base religieuse. Pour ceux qui utilisent la violence, «nous sommes décidés à agir avec toute la rigueur et la fermeté qu’exige la situation, par le renseignement, les arrestations, en coupant les liens avec les groupes extérieurs des pays voisins ou lointains», explique Lârayedh. Sachant que des armes ont été pillées dans les casernes durant la révolution et qu’une partie a sans doute atterri chez les groupes salafistes, sans parler des armes ramenées de la Libye voisine, M. Lârayedh admet : «Nous savons que les salafistes jihadistes ne rendront pas les armes. Nous allons vers un affrontement, c’est presque inévitable».
I. B.