Le ministre le plus décrié du gouvernement Hamadi Jebali n’en démord pas : il n’a rien à se reprocher, et les dépassements enregistrés au sein des établissements universitaires sont causés par les autres.
«Pas question d’un année blanche à l’université», a affirmé le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Moncef Ben Salem, lors de la séance de dialogue avec les membres de l'Assemblée nationale constituante (Anc) qui s’est poursuivie de vendredi après-midi à samedi, 2h du matin, au siège de l’assemblée, au Bardo, en présence, notamment, du ministre de l’Intérieur, Ali Lârayedh.
A Manouba, c’est la faute de Habib Kazdaghli !
M. Ben Salem a souligné que son département veille à traiter la question du port du niqab à la Faculté des lettres, des arts et des humanités de la Manouba à travers le dialogue, la patience et la sagesse, indiquant qu’il a délégué la gestion de cette question au doyen de la faculté de Manouba, l’historien Habib Kazdaghli (Merci patron !).
M. Ben Salem, accusé de laisser pourrir la situation à l’université où les salafistes cherchent à imposer leur loi… religieuse extrémiste, s’est interrogé sur le prolongement de la crise du niqab à la faculté de la Manouba alors que les autres universités tunisiennes ont pu aboutir, très vite, à une solution appropriée. Traduire : c’est le doyen de cette faculté qui, en empêchant les niqabées d’entrer en cours, a créé le problème ! Il aurait peut-être été préférable, si on en croit M. Ben Salem, de passer outre les règlements internes de l’université qui interdisent aux étudiants et étudiantes l’entrée en cours avec des accoutrements qui cachent totalement leur visage.
Il a, par ailleurs, souligné le souci du ministère de protéger les droits des professeurs contractuels dont le nombre dépasse les 6.000 ajoutant que le débat est ouvert autour de ce sujet. Il a cependant précisé que la régularisation de leur situation et leur intégration dans le secteur de l’enseignement supérieur sans le passage devant la commission de recrutement est contraire au règlement.
Concernant le sit-in des professeurs agrégés, le ministre a souligné qu’il n’est pas question de supprimer les écoles préparatoires et que ces rumeurs sont sans fondements, signalant, au passage, que les commissions chargées de la réforme du système de l’enseignement supérieur ont déjà entamé leurs travaux en vue d’engager une réforme à long terme.
Mettre l’université à l’abri des conflits politiques
Dans leurs interventions, les membres de l’Anc ont été unanimes sur la nécessité de mettre l’université à l’abri des conflits politiques.
Les membres de l’opposition ont critiqué la gestion, par le ministère, de la question du port de niqab, à Manouba. Alors que les représentants de la majorité ont estimé que la crise était artificielle puisqu’elle a été résolue dans les autres établissements.
Oualid Bennani (Ennahdha) a appelé à dépasser les conflits idéologiques et à transmettre des messages rassurants au peuple sur la situation dans les établissements de l’enseignement et le déroulement normal des cours et des examens.
De même, Abdelmajid Najjar (Ennahdha) a recommandé la mise en place d’un programme de promotion de la recherche scientifique et de diffusion d’«une culture religieuse authentique».
Pour sa part, Issam Chebbi (groupe démocratique) a estimé que la position du ministre de l’Enseignement supérieur face à la crise du niqab, à Manouba, a été perçue par les salafistes comme un message «d’impunité et d’encouragement».
Il s’est interrogé sur l’absence de dialogue sur les moyens de prémunir l’université contre l’extrémisme.
Samir Ettaieb (groupe démocratique) a été moins indulgent en appelant Moncef Ben Salem à démissionner pour «avoir refusé le dialogue», selon lui.
Certains intervenants ont critiqué le ministre suite à ses déclarations concernant les gens de Sidi Bouzid. Hassan Badri (Al Aridha) a indiqué que ces propos avaient failli provoquer une émeute. Propos dont le sens a été exagéré voire déformé, précisera le ministre.
I. B. (avec Tap).