Mustapha Ben Jaâfar, qui est toujours à la recherche du consensus mou, monte rarement au créneau. Pourquoi élève-t-il aujourd’hui la voix contre les «amis de la Tunisie»?
Le président de l’Assemblée nationale constituante (Anc) a, en effet, affirmé, vendredi, dans un discours prononcé au Parlement italien, que «les défis économiques et sociaux auxquels fait face la Tunisie en cette phase cruciale de transition exigent un effort national commun et une mobilisation internationale des amis de la Tunisie».
Promesses illusoires ou aides concrètes
«La Tunisie n’a pas besoin de promesses illusoires mais plutôt d’aides concrètes et immédiates», a-t-il ajoute, dans un franc-parler peu diplomatique plutôt peu habituel chez lui.
Participant à la 2e conférence des leaders parlementaires progressistes à Rome, M. Ben Jaâfar a profité aussi de l’occasion pour souligner les pas franchis en Tunisie sur la voie du processus de transition démocratique «grâce aux efforts de toutes les forces vives et à l’esprit de compromis entre les parties politiques représentées à l’Assemblée nationale constituante». Il a aussi mis en relief le rôle de l’armée nationale et de l’administration publique durant la révolution visant à assurer la continuité des rouages de l’Etat.
M. Ben Jaâfar a lancé, au passage, un appel aux forces progressistes européennes les pressant de «bâtir des relations entre les deux rives de la Méditerranée fondées sur un développement équitable et solidaire et de construire un avenir commun basé sur le bon voisinage, la paix et la consécration des principes universels communs garantissant la démocratie».
Le président de l’Anc a raison de rappeler les «amis de la Tunisie», notamment en Europe, à leur devoir de solidarité. Et d’exiger d’eux plus que de simples paroles réconfortantes ou de promesses d’aides, qui ne se concrétisent pas.
Des programmes bien ficelés, crédibles et bancables
Reste que, le président de l’Anc n’est pas sans savoir que le processus électoral, qui lui a permis d’être aujourd’hui là où il est, a été en grande partie financé par l’Union européenne. Et que la démocratie tunisienne en gestation doit beaucoup aux aides des vrais «amis de la Tunisie», en Europe et ailleurs.
Ces derniers peuvent, certes, faire beaucoup mieux pour soutenir la transition démocratique en Tunisie. L’aide promise par le G8, par exemple, tarde à être décaissée. A cela une raison, évoqué récemment par un diplomate à Kapitalis: «Les promesses tiennent toujours. C’est aux autorités tunisiennes de présenter des programmes bien ficelés, crédibles et bancables, et qui visent à améliorer la situation économique et sociale dans les zones de développement prioritaires. Les bailleurs de fonds n’hésiteront pas à décaisser.»
Imed Bahri (avec Tap).