Kapitalis a suivi l’audience du beau-frère de l’ex-président Ben Ali, qui a brillé par son absence, devant la Commission de l’immigration et du statut de réfugiés (Cisr) au Canada.

Par Sarra Guerchani, notre correspondante au Canada.


L’audience a commencé, lundi à 9h30 heure montréalaise (14h30 heure tunisienne), en l’absence de l’appelant et de sa famille. Elle n’a pas duré longtemps, alors que le porte-parole du Cisr avait annoncé, avant son démarrage, qu’il prévoyait une journée entière et peut-être même une deuxième.

La famille Trabelsi a manqué à l’appel

La commissaire Marie-Claude Paquette a présidé la cour. Seuls les avocats du beau-frère de Ben Ali, Maitres Stéphanie Valois et Norton Segal, et les deux avocats de l’immigration, Maîtres Gabriele Spina et Catherine Raymond, étaient présents dans la salle d’audience. La famille Trabelsi, quant à elle, a manqué à l’appel.

Les avocats de l’appelant n’ont pratiquement pas parlé. Ils ont simplement dit au juge qu’ils n’avaient pas d’autres preuves à ajouter au dossier. Ces derniers ont justifié l’absence de Belhassen Trabelsi par le fait qu’il «a peur de venir, car il craint que les Tunisiens présents à l’audience puissent le suivre après sa sortie d’audience». C’est là, encore une fois, un argument lié à sa sécurité que leur client a présenté à la cour.

Les avocats de l’Immigration ont énuméré une liste de faits prouvant que Belhassen Trabelsi était en tort de ne pas se présenter devant le tribunal. En commençant par rappeler à la Cour que «M. Trabelsi paye des agents de sécurité, ce qui rend les arguments présentés par son avocat insignifiants et que la famille était dans l’obligation de se présenter à cette audience», a justifié Me Spina. Il a également souligné à la Cour que «Belhassen Trabelsi ne pouvait pas s’absenter éternellement à ses audiences» et a informé, par la suite, que le ministère de l’Immigration demandait le rejet de l’appel. Il a cité l’article 168 de la loi relative à l’immigration qui dit clairement que «chacune des sections peut prononcer le désistement dans l’affaire dont elle est saisie si elle estime que l’intéressé omet de poursuivre l’affaire, notamment par défaut de comparution, de fournir les renseignements qu’elle peut requérir ou de donner suite à ses demandes de communication.»

M. Trabelsi ne sortait pas de chez lui

Me Raymond a énuméré, de son côté, près d’un quart d’heure, les raisons pour lesquelles l’Immigration a rejeté la demande de maintien de la résidence permanente à la famille Trabelsi. En effet, l’Immigration justifie son rejet par les raisons suivantes: il n’a vécu qu’une vingtaine de jour au Canada avant son arrivée en janvier 2011, alors qu’il doit justifier de 730 jours.

L’Immigration lui a aussi reproché de n’avoir eu «aucune participation significative à la vie canadienne» puisque ses avocats ont précisé, lors de l’audience du 20 avril, que M. Trabelsi ne sortait pas de chez lui. Me Raymond a rappelé devant le tribunal que le statut de résidence ne devait pas être «utilisé à des fins touristiques». Elle a également soutenu que la Tunisie était «capable de faire un procès juste et équitable» suite aux accusations qui ont été apportées dans les pièces soumises par les avocats de Belhassen Trabelsi. Elle a cité l’exemple du neveu de Ben Ali: «Sofiane Trabelsi a eu le droit à un jugement équitable devant la justice tunisienne. Il a eu une sentence et a réussi à faire appel et à obtenir une réduction de sa sentence». Sofiane Trabelsi a été condamné à 15 ans de prison pour avoir émis des chèques sans provision et son jugement a été réduit à 16 jours d’emprisonnement.

 

Au centre, la commissaire, à droite les avocats de Trabelsi, à gauche, ceux de l’Immigration canadienne.

Les filles de Belhassen Trabelsi seraient mieux en Tunisie

La situation des filles de Belhassen Trabelsi a également retenu l’attention de l’Immigration. Cette dernière a souligné que «les filles ont eu leur statut de résidence du seul fait que leur parent soit résident et qu’elle n’avaient jamais mis les pieds sur le sol canadien avant que le régime de Ben Ali ne s’effondre». Me Raymond a aussi soutenu que les deux enfants seraient mieux entourées par la famille en Tunisie qu’au Canada puisque seuls un cousin et un oncle de Zohra Jilani Trabelsi, épouse de Belhassen Trabelsi, résident sur le territoire canadien. L’avocate a appuyé cette information par le fait qu’«elles aient déjà une sœur qui est en Tunisie en ce moment, qui porte le nom de Syrine Trabelsi, qui, à notre connaissance, est avec sa mère en Tunisie». Puis elle a ajouté que «rien ne prouve que cette fille-là ne peut pas faire sa vie librement en Tunisie.»

L’Immigration a cependant informé la Cour que les enfants de Belhassen Trabelsi pouvaient venir étudier au Canada si la famille le désire, en précisant qu’elles devront payer des frais de scolarité que le gouvernement exige des étudiants étrangers.

Comment Belhassen Trabelsi paye-t-il ses frais au Canada?

Les finances du frère de Leila Ben Ali ont également été évoquées par l’Immigration, qui a précisé qu’«il n’y avait dans son dossier aucune preuve de sa situation financière, puisqu’il dit qu’il n’a plus d’argent», alors comment Belhassen Trabelsi paye-t-il ses avocats et la scolarité de ses enfants au Canada?

Pour finir, l’Immigration a affirmé que Belhassen Trabelsi «agit de manière contradictoire pour le maintien de son statut au Canada, en disant qu’il a le mal du pays et qu’il est prêt à faire face à la  justice tunisienne. A notre avis, ses craintes ne sont pas fondées», a-t-elle ajouté.

Aucun verdict n’a été rendu. Le commissaire devrait l’annoncer dans les prochains jours, par écrit.

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