«Une image vaut mille mots», disait le penseur chinois Confucius. L’image des blessés de la révolution qui se sont cousu la bouche est une condamnation sans appel de la lenteur des procédures d’indemnisation.
Par Hakim El Frigui
Certes, il y a parmi les dossiers des blessés certains cas frauduleux…
Certes, ne le nions pas, comme cela arrive partout dans le monde en pareille circonstance, il y a des opportunistes et des escrocs qui essaient de rentrer dans le moule pour profiter d’une aide.
Ces héros et héroines qui se sont battus pour faire dégager Ben Ali
(Ph. A Tunisiangirl Blogspot).
En Tunisie, certains «faux blessés de la révolution», avec l’aide de médecins corrompus et peut-être de fonctionnaires malhonnêtes, ont essayé d’escroquer le système. Dans ce cas, le gouvernement doit être sévère pour l’exemple et surtout pour éviter que les vrais blessés ne soient pas pénalisés. Et le peuple tunisien le soutiendra dans cette démarche car il est intolérable que l’argent du peuple soit attribué à des voleurs.
Mais hormis ces cas frauduleux, il reste qu’il y a actuellement des dossiers de réels jeunes (et moins jeunes) de blessés de la révolution qui sont en souffrance. Des réels héros et héroïnes qui se sont battus pour faire dégager Ben Ali et pour que des élections aient lieu en Tunisie. Car n’oublions pas que tous les changements qui ont eu lieu depuis le 14 janvier 2011 ne sont que la suite de ce qui s’est passé dans les jours qui ont suivi l’immolation de Mohamed Bouazizi. Ceux qui nous gouvernent actuellement en Tunisie n’ont pu revenir en Tunisie ou se présenter aux élections que parce que ces jeunes ont fait «le sale boulot, le plus dangereux et le plus ingrat», à savoir affronter les balles pour pousser le régime à abdiquer.
Ne l’oublions pas, ne soyons pas amnésiques. Surtout, traitons ce dossier rapidement car le moins que l’on puisse dire est qu’actuellement les choses prennent trop de temps.
Ces blessures qui ne guérissent pas (Ph. A Tunisian Girl Blogspot).
Il est en effet incompréhensible que malgré plus d’un an et demi passés, on en est encore à avoir des images de personnes handicapées ou blessés se coudre la bouche en signe de protestation car leurs dossiers n’avancent pas.
Ce qui est dit ici n’est pas d’accorder tout ce qui est demandé et de s’incliner face à n’importe laquelle des revendications. Ce qui est dit ici est qu’enfin ces personnes soient reçues, entendues et qu’on négocie avec elles une sortie positive dans leur dossier.
Avant d’indemniser les victimes de Ben Ali, il faut solder celui des blessés de la révolution.
Au moment où l’on parle d’indemniser d’anciennes victimes de Ben Ali avec une enveloppe de plusieurs centaines millions de dinars (et disons-le clairement, cette indemnisation est légitime en soi car c’est ce qui se fait dans tous les pays où il y a eu de tels abus); au moment où l’on veut indemniser des victimes de la dictature, certains cas ayant eu lieu il y a plus de vingt ans, il serait plus logique et judicieux de traiter rapidement et efficacement ce dossier des blessés de la révolution et nous épargner ces insoutenables images de personnes condamnées à en arriver à se coudre la bouche pour se faire entendre.
Blessé de la révolution (Ph. A Tunisian Girl Blogspot).
Confucius disait qu’une «image vaut mille mot». Espérons rapidement que l’image de ces bouches cousues laisse la place à celle plus joyeuse de bouches souriantes de blessés enfin satisfaits que leurs actes courageux aient été pris en compte. Nous attendons cette image.