Liberté, droits de l’homme, égalité, justice, démocratie, modernité, conservatisme, changement, élite… Paradigmes et concepts à reconsidérer pour un projet de société en Tunisie.
Par Lamjed Bensedrine
Derrière les discours grandiloquents, pseudo rationalistes de cette élite (qui s’est proclamée dépositaire de la pensée éclairée et progressiste), se dissimule une aridité intellectuelle et une absence de vision, ou de projets susceptible d’apporter un souffle de renaissance à la société tunisienne, tant sur la question de la refonte du système politique, ou du système économique, que sur l’indispensable mutation du système éducatif, dont la Tunisie ne peut faire l’économie.
Débat d’idées, ou confrontations stériles?
A l’heure, où la Tunisie se trouve confrontée à une singulière opportunité de se ré-approprier sa mémoire, son destin et ses richesses et qu’elle se doit, pour y réussir, de repenser et d’intégrer les problématiques fondamentales auxquelles se trouvent confrontées les sociétés les plus avancées, nous assistons à une surprenante polarisation du débat, dont les termes et la teneur, rappellent tristement ceux des cercles «intellectuels» parisiens.
La polarisation islamistes/laïques, outre son médiocre caractère politicien, a offert la plus large brèche aux requins de l’ancien régime, pour détourner les tunisiens Tunisiens des vraies questions engageant notre destin, et alimenter une multitude de crises et d’affrontements idéologiques, pour tenter de plonger le pays dans un chaos salvateur pour tous les corrompus; autant qu’elle offre les meilleures conditions pour éloigner les regards, sur la dilapidation de nos richesses par les multinationales (qui se poursuit de nos jours).
Les débats stériles, que nous voyons fleurir dans tous les médias, donnent une image déplorable d’une élite prisonnière de son narcissisme, et qui n’a rien d’autre à offrir que la voix de ses maîtres.
Si longtemps durant, la jeunesse a été éloignée de tout débat d’idée, de tout accès à son authentique mémoire collective (amputée et travestie, par plus d’un demi demi-siècle de dictature); si le programme scolaire a été vidé de toute dimension structurante de la mémoire et de la réflexion, et que tout accès à la culture, ou à la production intellectuelle pertinente, a été minutieusement censuré, ce n’est pour d’autres motifs, que de détruire l’espace mental commun de la société tunisienne, et disloquer son tissus social, au bénéfice des prédateurs.
C’est cet espace mental commun, déjà affecté par des siècles de déliquescence intellectuelle, spirituelle et scientifique du monde arabo musulman -– sciemment sciemment ciblé par la puissance coloniale et la dictature -– qu’il est impératif de reconstruire.
Cette reconstruction, ne peut être le fait d’une élite arrogante et extravertie, mais d’une authentique élite, imprégnée des valeurs et de la culture tunisienne, capable d’embrasser l’étendu et la diversité de la mémoire collective, pour redéployer sa singularité et sa cohérence, en réhabilitant sa fonction structurante et féconde.
Au vu de ce que nous révèlent l’histoire contemporaine de notre pays, l'homogénéité l’homogénéité culturelle, ethnique et religieuse, qui est le résultat d’un long processus intégratif, témoigne de l'absence l’absence d’éléments pouvant réellement menacer l'intégrité l’intégrité ou la cohésion de la Tunisie ; même si certains s’y sont essayés, ou tentent encore.
Cette donnée capitale, est en mesure d’offrir au peuple tunisien, les conditions indispensables à la réalisation de ses ambitions les plus optimistes, d’autant plus qu’il dispose de ressources naturelles, et d’un patrimoine institutionnel et culturel, qui autorisent ses rêves.
Ces ambitions restent tributaires de l’union de toutes les bonnes volontés, intégrant tous les courants de pensée et toutes les disciplines, dans un état d’esprit éloigné de tout clivage partisan, pour relever ce merveilleux défi, qui est celui de bâtir une Tunisie digne de son patrimoine12 historique et culturel, où plus aucun de ses enfants ne serait soumis à l’arbitraire, ou contraint à l’exil.
Lire aussi :
Pour une relecture critique du modèle démocratique moderniste tunisien (1/5)
Pour une relecture critique du modèle démocratique moderniste tunisien (2/5)
Pour une relecture critique du modèle démocratique moderniste tunisien (3/5)
Pour une relecture critique du modèle démocratique moderniste tunisien (4/5)
Notes:
12 - J. Brasseul: «Contrairement à une idée répandue, cependant, le droit des femmes a été pendant longtemps plus développé dans le monde musulman qu’en Europe: «La femme musulmane avait des droits de propriété plus étendus qu’en Occident, jusqu’à une date récente» Lewis (2002).