Cet appel a été lancé par un Collectif tunisien pour l’art, la culture et les libertés, créé à la suite de l’«affaire d’Al-Abdellia», à travers une pétition circulant sur le web, dont nous reproduisons ici le texte.


Nous pensons que vous avez suivi l’actualité tunisienne, ces derniers temps. En voici un bref récapitulatif :

Des agressions physiques à répétition à l’encontre des artistes et des intellectuels tunisiens ont été enregistrées dans différentes régions du pays :

- mars 2012: une manifestation théâtrale réprimée par des milliers de Salafistes en plein centre-ville de Tunis et des artistes agressés; des intellectuels attaqués lors de l’organisation de conférence publiques;

- mai 2012: tentative de meurtre et agression physique très grave sur un professeur de théâtre et artiste, et les membres d’une association artistique au Kef…

Tout ceci au vu et au su des forces de l’ordre et sans qu’une position sérieuse ne soit prise par le gouvernement afin de protéger les artistes et de poursuivre les agresseurs!

Du 1er au 10 juin dernier s’est tenue à Tunis la 10ème édition du Printemps des Arts. Tout s’est parfaitement déroulé jusqu’au dernier jour où un huissier notaire a pris des photos de quelques œuvres exposées pour les exhiber dans une mosquée tenue par des extrémistes, affirmant qu’elles portaient atteinte au sacré. Des pages Facebook pro-islamistes ont alors réalisé un montage de quelques toiles jugées blasphématoires par eux (la caricature d’un barbu, une installation de bustes de femmes lapidées, des fourmis sortant du sac à dos d’un élève pour former la phrase «Gloire à Dieu», sachant que la fourmi est un insecte privilégié dans le Coran) et ajoutant des photos d’œuvres qui n’avaient jamais figuré au Printemps des Arts ni même en Tunisie.

A partir de là, c’est l’effet boule de neige: des fanatiques s’attaquent au Palais Abdellia qui a abrité l’événement, détruisant et brûlant des œuvres d’art; des appels au meurtre des artistes sont lancés; des biens privés et publics sont incendiés; des confrontations ont lieu entre extrémistes et policiers. On déplore des dizaines de blessés et même un mort dans les rangs des fauteurs de troubles Salafistes…

Au lieu d’apaiser les tensions et de rétablir la vérité au sujet des œuvres exposées, les membres du gouvernement accusent les artistes d’attaquer les symboles de l’Islam. Nos gouvernants ne font ainsi qu’entretenir la confusion dans l’esprit du commun du peuple et participer à sa scission. Et pour couronner le tout, notre propre ministre de tutelle, Mehdi Mabrouk, ministre de la Culture, a contribué à cette mise à l’index des créateurs et est allé encore plus loin en décidant de fermer l’espace Abdellia et en portant plainte contre les organisateurs du Printemps des Arts, jetant ainsi en pâture les artistes à la vindicte  populaire.

Des responsables, comme l’imam de la mosquée Zitouna, ou des chefs de groupes Salafistes, appellent carrément au meurtre de nos artistes. Désormais, bon nombre d’artistes reçoivent des menaces de mort tous les jours via les réseaux sociaux, appels téléphoniques et Sms.

Le Syndicat des artistes plasticiens a annoncé dans sa conférence de presse qu’il portait plainte contre 3 ministres, dont celui de la Culture.

Nous vous adressons cette lettre, chers collègues, amis des arts et de la liberté, afin que vous nous supportiez face à cette nouvelle Inquisition. Nous vous demandons de bien vouloir rédiger des communiqués exprimant votre solidarité aux artistes tunisiens.

Pour avoir un impact fort et efficace, ce communiqué doit être officiel et signé par un maximum de syndicats et d’associations des différents secteurs de l’Art (arts plastiques, cinéma, danse, théâtre, musique…)

Une dénonciation internationale la plus vigoureuse possible qui pourrait être adressée à ce gouvernement et qui circulerait à travers la presse et le Net représenterait un désaveu extraordinaire qui obligera à préserver les libertés de conscience, de création, d'expression et la vie des artistes.

La situation est gravement critique, votre soutien et votre engagement pour notre cause seront une action des plus salutaires.

En vous remerciant à l’avance de votre soutien.

Pour signer la pétition.