Le chômage en Tunisie est une réalité socio-économique récurrente et un véritable casse-tête pour les responsables du gouvernement. Mais quid de ses causes… cachées?
Par Dr Mounir Bouslah
Lors d’une réunion publique d’un parti d’opposition, j’ai entendu un homme d’affaires se plaindre du manque de main d’œuvre dans plusieurs domaines économiques dont le sien, l’agriculture en l’occurrence. L’homme s’est posé la question suivante: où sont les chômeurs au nombre mirobolant, dont on parle tant et qui font couler beaucoup d’encre!
Une réponse cinglante d’un vieux routard de la politique est venue couper court à tout débat au risque d’avoir l’air de nager à contre-courant: «Les chômeurs sont bien là, mais ils ont choisi de n’accepter que du travail dans des conditions dignes et loin de toute précarité!»
Dans les réunions des partis, héritage destourien oblige, on ne rétorque pas aux réponses d’un illustre haut cadre de l'appareil!
La réunion dont je parle s’étant déroulée dans la région du Sahel dite «prospère», je me suis dit que... peut être, la plainte de cet homme d’affaire et d'autres que j’ai eu à entendre ces derniers temps reflétaient une réalité bien locale!
Manifestation de chômeurs devant le gouvernorat de Sidi Bouzid, berceau de la révolution.
Des publications sur ce sujet se sont cependant succédé dans les médias, passées presque toutes inaperçues ou n’ont-elles pas soulevé suffisamment de débats au sein de l’opinion!
On parle de 700.000 à 1.000.000 de chômeurs en Tunisie. C’est une sorte de «vérité révolutionnaire»... à ne pas remettre en question!
Récemment, j’ai rencontré un entrepreneur qui a eu un marché dans l’une des villes du croissant ouest défavorisé de notre pays. Il s’est déplacé avec ses gros engins et toute sa logistique et a ouvert les portes de ses chantiers à la main d’œuvre locale... Selon ses dires, il a été obligé de placer son matériel sous la protection de l’armée et de prendre le large pour réfléchir s’il devait rester sur place ou s’en aller ailleurs! Car l’homme a eu des menaces de la part des… rares candidats au travail qui se sont présentés à lui. «Ils exigeaient tous des postes de chefs avec des avantages incroyables, et menaçaient de faire capoter tout le projet en cas de non satisfaction», raconte-t-il, déçu et écœuré.
Sit-in dechômeurs à Gafsa: Sans diplôme, sans travail, sans épouse, sans rien...
Je ne veux tirer aucune conclusion hâtive mais des doutes et des questions persistent concernant les causes réelles du chômage en Tunisie. On en parle souvent en privé, généralement, à voix basse, mais jamais publiquement… Pour éviter d’en paraître politiquement «incorrect» ou «contre-révolutionnaire»!
Eh oui! On y est encore!!!
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