altLe pire ennemi des Tunisiens n’est pas un parti politique soutenant une idéologie particulière, ni des radicaux extrémistes et encore moins une puissance étrangère. Mais leur propre désunion.

 

Par Lotfi Saibi*


«Nous avons rencontré l’ennemi et l’ennemi, c’est nous», dixit Pogo. Aujourd’hui, je ressens la même chose que Pogo. Je pense que nous sommes en train de nous battre les uns contre les autres. Nous sommes devenus l’ennemi numéro un de la Tunisie et le plus grand obstacle à sa réussite.

Nous avons oublié comment être critique face à nous-mêmes et reconnaître nos faiblesses. Pourtant c’est le seul moyen pour être de meilleurs citoyens.

Nous avons renoncé à toute critique constructive de peur que notre critique ne soit considérée comme trop sévère et que nous nous retrouvions isolés.

Nous sommes devenus une société polarisée qui sacralise la pensée de groupe au détriment de la pensée individuelle.

Je pense que le pire ennemi que nous devrons vaincre n’est pas un parti politique soutenant une idéologie qui nous est étrangère, ni des radicaux extrémistes qui veulent gangrener notre pays et encore moins une puissance militaire envahissante. Notre pire ennemi c’est nous-mêmes. Nous, le peuple de la Tunisie, qui autrefois étions fiers d’être juste Tunisiens, qui partagions la joie des victoires de nos équipes sportives ainsi que la peine de leurs défaites. Nous sommes ce peuple qui s’est toujours retrouvé soudé lorsqu’il s’agit de maladies ou de catastrophes naturelles, savait regarder au-delà du «sefsari» ou de la «malya», de la «jebba» et du «kabbous», de la mini-jupe et des jeans serrés. Certains d’entre nous ont choisi d’aller à la prière, d’autres de se diriger vers le bar du coin, chacun pensait pour lui et ne se préoccupait pas des choix de son voisin.

Nous voulons tous quelque chose, mais très peu sont prêts à donner. Nous pensons trop à nous-mêmes et très peu aux autres. Nous voulons tous nos droits, mais on ne parle jamais de nos… RESPONSABILITÉS.

Lorsque le jeune respecterait le vieux, l’élève valoriserait son professeur, quand les lois seraient respectées, nous n’aurions pas d’ennemi parce que nous serions une seule entité solide. Personne ne peut vaincre une société unie.

Aujourd’hui, hélas, nous-nous sommes permis d’être facilement brisés en mille morceaux. Nous sommes devenus nos propres pires ennemis.

On a sacrifié notre civilité en croyant que nous nous débarrassons de notre faiblesse, mais nous avons oublié qu’une société sans civilité est une société brisée.

 

* Alm - Harvard University, enseignant en leadership à MSB, Pdg de 4DLeadership House.


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