L’intérêt de l’Occident, c’est de faire rebasculer les pays libérés dans de nouvelles dictatures. Dictatures, qui auraient un aspect «démocratique» mais qui en fait ne différeraient pas des anciennes.

Par Habib Ksouri*

 Les affronts faits aux musulmans ces derniers jours, prouvent s’il y a lieu de prouver que ce «cher» occident et ses fidèles «ambassadeurs» n’auront de «pax romana» que s’il y a un retour aux dictatures. Dictatures, qui sont le seul interlocuteur avec qui ces «démocraties» ont appris à monologuer. De toute évidence, il ne peut y avoir de «marchés à l’ancienne» négociables avec les nouveaux régimes.

En fait, Occident, Orient vendu et épaves pro-occidentales naviguant sur la mer tumultueuse des révolutions arabes, n’ont pas pu gober ces changements, qui risquent dans un temps relativement expéditif de changer la donne dans les équilibres, nationaux, régionaux et internationaux.

L’Occident et la réémergence de l’ancien système

En effet, il serait vraiment bête de croire que ces gouvernements occidentaux, qui se sont fort bien accommodés des dictatures arabes pendant un demi-siècle, en leur fournissant soutien moral et matériel, se transforment comme par enchantement en mentors des démocraties naissantes.

Le but de telles manœuvres est de créer un état de désordre, qui dans une situation instable ne peut que favoriser la réémergence de l’ancien système. On sait bien que ce harcèlement des croyances va provoquer une levée de bouclier qui englobera diverses personnes, le commun des musulmans, des salafistes non violents, d’autres violents et certains mercenaires. Ce dernier groupe et les infiltrés de l’avant dernier groupe ont comme but principal la provocation d’un état de confusion et d’insécurité qui déstabilisera encore plus la situation. Puisque l’ancien système persiste encore, qu’il est présent dans tous les rouages de l’Etat, que l’environnement régional et mondial ne peut cohabiter avec des démocraties arabes naissantes, on peut s’attendre à tout dans les prochaines semaines et mois.

En parlant d’«ambassadeurs», je n’évoque pas ici des diplomates étrangers, mais des «ambassadeurs» nationaux qui ont engagé les armes, entre autres de la «liberté d’expression» bien avant les derniers évènements. Ce qui rend compte du fait que certains «servants» peuvent être plus acharnés que leurs maîtres. Il faut dire qu’ils ont tout à perdre si jamais un régime réellement démocratique prend le pouvoir. Plus de privilèges, plus de gagne pain facile. Les mains et les esprits qui ont prospéré dans le coton et manié avec excellence la perfidie et l’apathie, ne peuvent exister comme le commun des mortels.

Le justificatif de la sacralité de la liberté d’expression invoquée par les gouvernements occidentaux pour ne pas exercer un certain contrôle sur leur presse de caniveau, alors que tout le monde sait ce dont ils sont capables en matière de sécurité, nationale et celle de leurs concitoyens, prouve que toutes ces manœuvres provocatrices sont bien concertées à un quelconque niveau de ces gouvernements et qu’il ne s’agit nullement de l’action isolée de quelques bougres.

Le noyautage des révolutions arabes a-t-il commencé?

La succession des évènements en Syrie est une preuve de l’attitude ambigüe de l’Occident envers les révolutions arabes. Ainsi, après 18 mois de massacres, on en est encore à discuter l’éventualité d’une aide militaire «efficace» aux résistants syriens. Qui pourrait croire que les USA, qui ont agit contre les Serbes (parents proches des Russes) sans mandat de l’Onu pendant la guerre du Kosovo, trouvent des difficultés actuellement pour agir contre le régime syrien. En fait, le peuple syrien paye pour un temps d’arrêt que l’Occident a voulu imposer pour essayer de noyauter ces révolutions arabes avant que le nouveau système ne lui échappe complètement. C’est pour cette raison qu’il pèsera de toutes ses forces pour aider à ressusciter ne serait-ce que partiellement, les anciens systèmes inféodés à lui. La chute de la Syrie, dans des mains non «amies» créera un front large s’étendant depuis la Tunisie et mettra en péril l’Etat sioniste et les régimes du Golfe, les vraies plateformes de l’Occident conquérant.

Certains groupes «salafistes», recrutés par les services secrets occidentaux via les pays du Golfe, sont là pour brouiller les cartes. D’un côté, faire penser que ces pays sont du côté de la résistance et, de l’autre côté, aider à justifier les violences du régime syrien, qui parle d’un complot.

En somme l’équation est simple, ou vous êtes avec nous (sous notre dictat), ou bien c’est le chaos. Détruire la Syrie, puis l’Iran et par la même étouffer les révolutions arabes est le but rêvé des Occidentaux et de leurs valets. La création de tumultes, sous quelque type que ce soit, guerres larvées, manifestations violentes, insécurités, rumeurs avec des tapages médiatiques alarmistes continuels (suivre l’attitude de la presse française, arabe et acolytes tunisiens depuis plusieurs mois), coulent tous dans le long fleuve creusé depuis l’aube des colonisations.

Rappelons nous, qu’une gifle donnée par le Dey d’Alger à l’ambassadeur français avait servi d’alibi pour coloniser l’Algérie. Mais comme il devient difficile de coloniser les pays à l’ancienne, faisons confiance aux «colons» autochtones (du déjà vu).

Le monologue des «maîtres» avec leurs «créatures»

L’intérêt immédiat de l’Occident, c’est de faire rebasculer les pays libérés dans de nouvelles dictatures. Dictatures, qui auraient un aspect «démocratique» mais qui en fait ne différeraient pas de anciens systèmes tant prisés par les «démocraties» occidentales qui, en définitif, ne croient en l’utilité du dialogue qu’avec leurs peuples et en l’utilité de la démocratie, que sous leurs cieux.

Quand à nos peuples sous développés, fanatisés, sales et ignorants, ils peuvent garder tous les «avantages» et frustrations qu’ils ont accumulés durant ces décennies «d’indépendance». Il suffit qu’il y ait une catégorie qui jure fidélité aux «maîtres», qui sera supporté à fond et parmi laquelle certains «valets» seront élevés au zénith. Cette «catégorie» investira les rouages de l’Etat, fera ce que bon lui semble avec ses concitoyens et fi à la démocratie et aux droits de l’homme. En somme, reprenant les mêmes et rejouant le même jeu. Ainsi, les «maîtres» auront, un monologue avec leurs «créatures», des instances de chez eux invectiveront ces dictatures, pardon, régimes modérés (pour donner bonne conscience aux concitoyens des «maîtres» et servir le cas échéant d’alibi pour leur bonne foi). Les «maîtres» collaboreront sur tous les plans, sécuritaire, militaire, économique, avec ces régimes inféodés, et tout reviendra pour le mieux dans le meilleur des mondes.

Quant à nous, peuples affreux, bêtes et méchants, on sera comme depuis des décennies colonisé par nos concitoyens érigés en gérants de l’intérêt suprême de leur maîtres et du leur.

* Médecin.