Les acteurs politiques doivent arrêter de s’agripper à leurs sièges s’ils sont mauvais et arrêter de vouloir un siège juste pour accéder au trône de l’immobilisme. Les Tunisiens ont besoin de vrais leaders, à la hauteur de leurs ambitions.

Par Aymen Ben Said*

 Dans un contexte économique mondial difficile où les opportunités de développement se restreignent et les vieilles démocraties et les grands groupes industriels peinent à retrouver de la croissance, nous continuons en Tunisie à jouer à l’autruche, en agitant des chiffres peu crédibles. «Circulez, il n’y a rien à voir! Tous les indicateurs sont au vert… Ah oui, j’ai oublié de vous dire que c’est par rapport à 2011.»

Il faut être mauvais pour faire mieux qu’en 2011

Cet article ne vise en aucun cas à critiquer le gouvernement car bien d’autres articles s’en sont chargés. C’est plus un appel à penser différemment, à sortir du cadre, à explorer les solutions aux maux de notre société sans tomber dans un inventaire des problèmes pour, in fine, en venir à la conclusion que, malgré tout, on a fait mieux qu’en 2011. Même les plus mauvais des dirigeants sauront faire mieux qu’en 2011, année de révolution, de libertés tous azimuts, mais malheureusement aussi, année de destruction de la valeur et de fermeture d’entreprises.

Etre libre est tout d’abord être responsable, responsable de ses actes, de ses dires et surtout de sa contribution à la construction de ce beau pays. Un de mes professeurs disait: «Rêve, croit et réalise».

Quant au rêve d’une Tunisie libre, moderne puisant son élan de progrès dans son identité arabo-musulmane, il est partagé par l’ensemble de nos concitoyens. Nous y avons cru, nous continuons et nous continuerons à y croire. Le plus important maintenant est de le traduire pratiquement au quotidien. La compétence et le talent sont les atouts de cette période difficile. N’est-ce pas pendant les moments difficiles que le génie opère?

A nous, jeunes de ce pays, de proposer le nouveau modèle économique tunisien, favorisant le talent, le génie qui sommeille en chacun de nous.

Je sais que cela parait de la bonne parole mais venons au fait. L’industrie doit être au cœur du modèle économique tunisien mais pas n’importe laquelle. La majorité des investissements étrangers sont faits pour de la main d’œuvre bas coût sans aucune technicité. Certes, cela fait vivre des familles mais cela rend aussi un pays dépendant.

La révolution nous a montré oh combien notre modèle de développement est fragile, la fermeture de quelques usines gourmandes en main d’œuvre de faible technicité a mis des milliers de travailleurs à la rue et a fragilisé toute une économie.

Nous avons des universités et des écoles d’ingénieurs qui nous sortent chaque année l’élite de demain mais si cette élite ne trouve pas un milieu propice à son développement, elle finira par quitter le pays et en faire profiter d’autres.

Ouvrer dans l’intérêt du grand projet Tunisie

Il faudra inciter l’investissement dans des projets industriels de haute technologie, et si l’on veut puiser dans nos ressources, émettons des clauses de transfert de technologie. Car le jour où les investisseurs étrangers quitteront la Tunisie, notre pays continuera à produire, à exceller et à relever le défi.

Nous avons des cerveaux, alors utilisons les à bon escient et non pas pour nous agripper à un pouvoir éphémère en fragilisant l’avenir de nos enfants.

Chaque jour, nous regardons notre économie se dégrader dans un silence complice dont chacun est responsable: gouvernement, opposition et société civile. Faut-il toucher le fond pour avoir enfin du concret?

«Arrête de t’agripper à ton siège si tu es mauvais et arrête de vouloir un siège juste pour accéder au trône de l’immobilisme», sommes-nous tentés de lancer à certains de nos acteurs politiques. Soyons tous moteur, à la hauteur de l’ambition de tout un pays, et les futurs gouverneurs seront plus à l’aise, plus à même d’être respectés dans leurs choix, décisions du moment où l’intérêt du grand projet Tunisie primera sur l’intérêt propre ou partisan.

* Association Tunisie Entrepreneurs.