Mardi 23 octobre 2012, les 217 élus de l’Anc doivent rendre des comptes à la nation, car en cette journée, le peuple doit sortir pour dire ‘‘Je suis encore là’’.

Par Karim Majoul

Dans quelques heures, les 217 élus de l’Assemblée nationale constituante (Anc) seront confrontés à la «dead line» du 23 octobre. Au lieu de rassurer le peuple tunisien, ébranlé par les incidents graves de Tataouine et le meurtre d’un leader de l’opposition, ils renforcent les dispositifs de sécurité autour de la Kasbah, siège du gouvernement et du Bardo, siège de l’Anc. Qu’ont-ils donc à craindre?

Mardi 23 octobre 2012, les 217 élus de l’Anc doivent rendre des comptes à la nation. Un an auparavant, jour pour jour, ils ont remporté des élections organisées sur la base du décret n°1086 daté du 3 août 2011 signé par l’ancien président de la république par intérim Foued Mebaza et publié au Jort n°59 du 9 août 2011 (page 1432). Ce décret stipule dans son article 6 que «l’Anc doit préparer la constitution dans un délai maximum d’un an après son élection».

On ne peut que constater, en ce lundi 22 octobre, qu’aucun signe avant-coureur de l’achèvement de leurs travaux n’a filtré.

En revanche les palais de la Kasbah (siège du gouvernement) et du Bardo (siège de l’Anc) sont barricadées depuis plus de 48 heures derrière des fils barbelés et la sécurité a été renforcée.

Qu’ont-ils à craindre ?

Première hypothèse, et elle va de soi : le texte de la constitution est prêt et sera bien annoncé officiellement, le 23 octobre, et publié quelques jours plus tard. Pourquoi avoir dans ce cas attendu la dernière minute? On peut supposer qu’Ennahdha aime bien les «emberlificotages» et les rebondissements de dernière minute. On peut également supposer que la nouvelle constitution, à l’instar d’une pochette surprise, contient des références (entre les lignes) à «l’atteinte au sacré», concept cher au leader d’Ennahdha.

Cette annonce de dernière minute aurait l’avantage pour Ennahdha de verrouiller les objectifs de Rached Ghannouchi, c'est-à-dire de transformer la Tunisie en République islamique.

En effet le texte de la Constitution nécessitera des semaines avant d’être décortiqué par des juristes et, le temps passant, finira par être gravé dans le marbre.

Deuxième hypothèse : écartelés entre les objectifs (inavoués mais révélés récemment) de Rached Ghannouchi et le souci d’une crédibilité sur la scène internationale, les députés de la majorité (Ennahdha, CpR, Ettakatol) vont faire valoir leurs difficultés extrêmes à accomplir leur tâche dans les délais fixés par la loi et demander un report.

Ce qui expliquerait les barricades mises en place autour du palais du Bardo.

Il est évident que le peuple tunisien ne sera pas dupe et descendra dans les rues de Tunis. Beaucoup pourraient en effet penser que ces mêmes députés nahdaouis auraient consacrés la plus grande partie de leur temps à s’occuper de leurs avantages en nature et de leurs primes au lieu de se consacrer à leur devoir sacré.

Les prétextes vont affluer, dont peut-être (c’est encore une hypothèse) celui de mettre en cause les médias «qui les ont empêché de faire leur travail dans les conditions de sérénité nécessaires et indispensables».

Je voudrais citer, en guise de conclusion, une phrase de Abdelbari Atwan, éditorialiste au journal ‘‘Al Qods’’: «Le 23 octobre devrait être une journée au cours de laquelle le peuple doit sortir pour dire ‘‘Je suis encore là’’, tout en étant protégé par son armée et par les forces de sécurité du ministère de l’Intérieur, lequel département doit corriger ses erreurs et démontrer qu’il est avec le peuple et contre les milices terroristes. C’est seulement ainsi que cette journée sera marquante et déterminante».