Cette question est on peut plus légitime au moment où l'armée israélienne poursuit ses raids aériens sur la bande Gaza, sous le regard apeuré d'un monde arabe paralysé et même complice.
Par Béchir Mahmoud Bouhlel*
Après plus 68 ans de la deuxième guerre mondiale, la vision «Britannique» de l'évolution du monde s'affirme presque comme prophétie, et son empire éclabousse la civilisation actuelle.
Sa fille aînée USA, ses autres filles le Canada, l'Australie et le Nouvelle Zélande, et sa création Israël, émerveillent, dominent et étonnent les habitants de notre astre.
Pépinières d'élites contestataires
Ses anciennes colonies sont les pays les plus prospères de ceux appelés en voie de développement, Londres devient une destination de tous ceux qui combattent pour la liberté et de ceux qui pourraient déstabiliser les régimes de leur propre nation, et, un chemin incontournable des islamistes arabes.
La force «silencieuse» britannique s'affiche dans la discrétion, et sa grande puissance réside principalement dans la titanesque capacité de ses services rattachés au «Royaume», à entretenir ses intérêts économiques et constituer des pépinières d'élites contestataires des autres du monde, de les canaliser et les exploiter selon les situations calamiteuses, les drames humains, l'effondrement des systèmes politiques et l'étêtement des élites gouvernantes des pays hostiles.
D'ailleurs, dans le monde «le Grand Royaume» et les monarchies se portent bien et les républiques ne vont pas aussi bien.
L'illustration la plus ébouriffante concerne sa bonne lecture de la géopolitique de la région arabe qui a été architecturée selon sa propre stratégie et pour des desseins futuristes, et a pu parfaitement paramétrer tous ses pays en envoûtant leurs élites.
Adoption d'Israël par les pays arabes du Golfe
Le facteur le plus déterminant qui prévaut à cette «maîtrise britannique presque totale» des pays du Golfe provient essentiellement de l'état d'hétérogénéité et d'immaturité des populations arabes instrumentées, et par l'incapacité des élites à s'identifier à des desseins nationaux de leurs pays respectifs ou de la région.
Autre causalité de cette de cette «puissance britannique», c'est l'adoption d'Israël par les pays arabes du Golfe, et la «bousculade de certains pays arabes à vouloir se rapprocher d'Israël, et, la génération de la discorde entre les musulmans sunnites et chiites, après tant d'années de contestation de l'existence même d'Israël par l'ensemble des pays de la région.
La Ligue arabe, les élites arabes, les journaux et les chaînes arabes étaient mobilisés pour défendre les droits des Palestiniens contre l'occupation israélienne pays, aujourd'hui on ne parlent plus de Palestine, mais mettent en valeur l'Etat d'Israël, et contestent la légalité de Hamas, qualifiant l'autorité de Gaza comme «destituée».
On ne peut s'empêcher de relever cette facilité ahurissante d'Israël à jouer au «bowling» pour occuper le monde arabe et le désorienter par l'apparition successive de conflits ou d'évènements interarabes. Ceci est en fait le résultat d'un long processus insidieux qui a été instauré par l'ex-secrétaire d'Etat américain Henry Kissinger et réactualisé depuis par les Israéliens avec leurs propres moyens.
Les pressions exercées par la communauté internationale, après les accords de Madrid, ont été amorties par Mahmoud Abbas avec ses réunions et ses accords d'Oslo, puis ces derniers accords deviennent caducs pendant les guerres d'Irak et d'Afghanistan qui ont offert un immense terrain de manœuvre, pour maintenir le monde arabe sous pression, banaliser le problème palestinien et favoriser le rapprochement entre Israël et beaucoup de pays arabes, et faire de l'Iran, ami d'hier d'Israël et des Arabes sous le chah, un ennemi commun à ces derniers.
Cette situation démontre la propension de la force et de la puissance d'Israël à enclencher un évènement majeur dans n'importe quel pays arabe, pour mettre en état de transe ou d'ébullition l'ensemble des pays de la Ligue arabe, qui excellent dans la mobilisation pour alimenter les conflits internes.
Après la guerre des hommes, la paix des prophètes
Aujourd'hui, Israël est uniquement contesté par la Syrie, le Hezbollah et le Hamas, ces trois forces «révolutionnaires» ne sont pas attaquées directement par Israël, mais ouvertement par les pays arabes principalement pétroliers, ouvertement pour la Syrie et le Hezbollah, et cyniquement pour le Hamas, en état d'embargo presque total sans réaction majeure arabe.
Il faut souligner ici la capacité d'Israël à mobiliser les moyens humains et médiatiques titanesques de ses amis pour manipuler les pays arabes, réquisitionner leur force de frappe pour paralyser ses ennemis, «raisonner» le Hamas, faire pression sur le Hezbollah, affaiblir au maximum la Syrie et, enfin, renouveler les menaces contre l'Iran.
Mais, ce paramétrage presque parfait du monde arabe pourrait-il durer encore longtemps? Bien sûr que non, en raison du constat amer de l'ensemble des populations arabes que leurs élites et leurs médias font faillite et ne sont pas libres de leurs mouvements.
Le problème israélo-palestinien a trop duré et il est à l'origine d'une déstabilisation permanente de beaucoup de pays. Les Israéliens pensent qu'ils pourraient continuer à vivre paisiblement dans une région dont ils maitrisent les élites, mais ils se trompent dans la lecture de l'histoire et du futur qui ne sont nullement en leur faveur.
Mais comme l'utopie est permise, pourquoi ne pas rêver, pour mettre en place les conditions d'une paix perpétuelle, à créer au Proche-Orient un nouvel Etat appelé «Pays des Prophètes» où juifs, musulmans, chrétiens et autres pourraient vivre en paix? Il sera le plus puissant de la région.
* Réviseur d'entreprises, consultant retraité.