SILIANA9La révolte à Siliana a réussi, au-delà même de ce qu'on a connu pendant la révolution contre Ben Ali, à mobiliser tous les habitants d'une région! Du jamais vu en Tunisie!

Par Kais Oukhai*

 L'image de l'exode symbolique de toute la ville de Siliana, ses hommes, femmes, vieillards, jeunes enfants, laissant au gouverneur d'Ennahdha une ville fantôme, restera longtemps dans la mémoire collective tunisienne.

La recette de la révolution contre Ben Ali

La révolution du 17 décembre 2010 n'a pas réussi à mettre en valeur ses acteurs, ni à fixer un objectif clair, à part des vagues notions de démocratie, liberté et dignité. Les obscurantistes islamistes qui n'ont pas participé à cette révolution, l'ont récupérée et parlent désormais en son nom.

Il est nécessaire d'analyser rapidement la réussite de la révolte de Siliana et d'en tirer les conclusions.

Beaucoup de ses principaux acteurs témoignent: cette révolte a réussi, parce qu'elle a retrouvé la recette de la révolution contre Ben Ali, notamment l'endurance dans la protestation avec une pression croissante dans le temps, par des manifestants agissant en petits groupes de jeunes, très mobiles, en parfaite coordination, connaissant le terrain et les techniques d'usure des forces de répression, provoquant même des scissions et de la sympathie parmi les membres des forces de l'ordre révoltés par la répression aveugle et l'usage disproportionné de la force contre leur peuple pour servir les intérêts politiques du parti au pouvoir.

Les forces qui ont contribué au succès collectif

Siliana et après

Siliana et après

Pour appeler les choses avec leurs noms, pour qu'il n'y ait pas de récupération plus tard, il s'agit essentiellement de groupes formés par les jeunes adhérents ou sympathisants du Front populaire et d'autres partis de gauche. Mais, ces groupes ne sont qu'une partie du mouvement, pourquoi la révolte a-t-elle donc pris une telle ampleur?

Comme lors de la révolution contre Ben Ali, les travailleurs adhérents à l'Ugtt ont réussi à mobiliser une grande partie des travailleurs et la grève générale reconduite a permis, d'une part, de maintenir la tension à l'intérieur du chef-lieu de la région, mais aussi aux gens de se retrouver dans la rue au lieu de travailler facilitant ainsi les manifestations.
Mais ce n'est pas tout, pourquoi toute une région a manifesté massivement durant 5 jours.

Les témoignages parlent des membres de l'ancien Rcd. Oui, des membres de l'ancien parti de Ben Ali, le Rcd, sont passés à l'action sur le terrain lors de cette révolte. Très implantés dans les quartiers populaires et les zones rurales, ils ont réussi à mobiliser une partie de leurs clientèles habituelles, notamment les femmes et les vieillards, et ont réussi à mobiliser des familles entières qui sont descendues courageusement dans la rue rejoignant cette cause juste.

Mais ce n'est pas tout !

Ces actions sur le terrain n'auraient servi à rien, si une étape des plus importantes dans la réussite de ce genre de mouvements n'a pas eu lieu: la récupération des images de la répression et sa médiatisation à l'échelle nationale et planétaire.

Facebook était bien sûr un redoutable moyen bien maîtrisé maintenant par les blogueurs tunisien dont beaucoup de ceux qui ont participé à la chute de Ben Ali se sont mobilisés pour médiatiser cette révolte.

Qui est responsable de ce gâchis.

Qui est responsable de ce gâchis.

Et aussi grâce à la participation de citoyens patriotes, qui ont les bons contacts dans la presse, les agences d'information et les divers médias qui ont relayé les informations de ce qui se passe dans notre pays à l'échelle planétaire.

Tous ces acteurs qui ont travaillé ensemble pour la réussite de cette révolte reconnaissent la contribution des autres dans la réussite collective et doivent continuer à travailler ensemble pour sauver le pays de leur ennemi commun: des islamistes assoiffés de pouvoir qui ont récupéré la révolution contre Ben Ali, à laquelle ils n'ont pas participé, et qui veulent maintenant revenir sur les acquis et mettre en place une dictature rétrograde pire de ce qu'on a connu.

* Cadre tunisien.