Islamistes soft à la sauce Ennahdha et nostalgiques du régime fort et des hommes d'Etat à l'ancienne que laisse miroiter Nida Tounes: qu'ils s'en aillent tous!!
Par Karim Ben Slimane*
Deux ans se sont écoulées suite à la fuite du président déchu Ben Ali. Le constat est sans appel : la Tunisie pédale encore dans la semoule. Le pays navigue à vue. Les objectifs de renversement du régime et de recouvrement de la dignité et de la liberté individuelle trônent encore dans le musée des œuvres inachevées. La violence politique est légion, la division règne dans le pays alors que le Tunisien souffre dans sa chair le renchérissement de la vie et les tracas d'un quotidien de plus en plus chaotique.
Le paysage politique est en passe de se bipolariser entre le parti islamiste Ennahdha et ses satellites salafistes d'un côté et Nida Tounes, la machine à absoudre les intellectuels et les politiques jadis entichés du régime fort de Ben Ali, de l'autre côté.
L'étau se resserre sur les autres mouvements politiques qui, à défaut d'accepter le statut de parti satellite et de vassal de Ennahdha ou de Nida Tounes, s'étiolent petit-à-petit. Le sort que connait le Parti républicain (Al-Jomhouri) illustre bien cette tendance, car voilà un parti dont les dirigeants ont excellé dans la dilapidation d'un capital de militantisme de la première heure ardemment constitué par le feu Parti démocratique progressiste (Pdp). Soif de pouvoir de Nejib Chebbi, alliances contre-nature, incohérence idéologique entre les libéraux pragmatiques de Afaq Tounes, les valeurs de centre-droit du Pdp vaguement panarabe et conservateur et bientôt la gauche vintage des néo-marxistes d'Al-Massar expliquent la déchéance annoncée du parti Al Jomhouri.
Quant au Front populaire de Hamma Hammami, à l'instar de tous les partis néo-ouvriers et de travailleurs, qui se veulent les porte-voix des sans-voix, il se heurte à la versatilité politique des classes populaires et leurs tentations de rejeter ceux en qui ils s'identifient.
Je vous évite l'ennui de vous conter de nouveau le hara-kiri du Congrès pour la République (CpR) et d'Ettakatol sur l'autel du culte de la personnalité et du goût immodéré pour le pouvoir de leurs leaders Moncef Marzouki et Mustapha Ben Jaâfar. Puissent ces derniers être reconnaissants à leurs militants fidèles et dévoués.
En Tunisie, chacun est donc prié de choisir son camp: l'islamisme soft à la sauce Ennahdha ou la nostalgie du régime fort et des hommes d'Etat à l'ancienne que laisse miroiter Nida Tounes.
Souvent le choix se porte par la négative, les détracteurs de l'islamisme se rallient à Nida Tounes et ceux qui sont vigilants face la re-virgination politique se jettent dans les bras d'Ennahdha espérant que les islamistes fassent le nettoyage qu'ils ont promis de la scène politique.
En pactisant avec le diable, les uns comme les autres se fourvoient. Cette bipolarisation, qui marque la surpolitisation de l'après-révolution, nous promet des lendemains qui déchantent.
Pour ma part je suis tiraillé entre un refus primaire de l'islam politique et une détestation sans nuance des officines de réfection des hymens qui redonnent leur virginité aux intellectuels et aux politiques confondus de complaisance envers les dictateurs. Alors qu'ils s'en aillent tous.
* Spectateur rigolard de la vie politique tunisienne.