Le beau-frère de l'ex-président Ben Ali, Belhassen Trabelsi, en fuite au Canada, nous a fait parvenir cette «Lettre ouverte à Monsieur le Ministre de la Justice», authentifiée par son avocat Mohamed Hedi Lakhoua, joint par téléphone.
Monsieur le Ministre,
Depuis votre accession au poste de ministre de la Justice et à chaque fois que vous avez eu à faire des déclarations de presse, qu'elles soient écrites ou audiovisuelles, vous n'avez pas manqué une occasion pour évoquer les affaires intentées contre moi et en portant atteinte à ma personne en utilisant des surnoms dégradants comme chef de bande, bande des Trabelsi, tête de vipère, etc., affirmant même que j'ai spolié les richesses du pays et l'argent du peuple tunisien.
Monsieur le Ministre,
Premièrement: je ne suis pas l'unique parent de l'ancien président, alors pourquoi cette fixation sur ma personne sans citer les autres membres de la famille sachant qu'ils ont tous des affaires en cours.
Pourquoi cet acharnement sur ma personne allant même jusqu'à me citer une quinzaine de fois lors de l'interview à la chaîne El Moutawasset donné dernièrement.
Deuxièmement:
Homme de Loi que vous êtes, avocat et militant des droits de l'homme, vous savez parfaitement que tout citoyen est innocent jusqu'à preuve de sa culpabilité par un jugement définitif rendu en dernier ressort et que, jusqu'à présent, la justice tunisienne n'a pas encore prononcé de jugement définitif me condamnant dans ce qu'on appelle les affaires de corruption.
L'utilisation de ces surnoms, même à l'encontre de ma personne, est considérée comme étant de la diffamation. La révolution tunisienne est une révolution de la dignité; dignité de la personne humaine, cette dignité s'applique à tous les citoyens quelle que soit leur catégorie, et l'Etat à travers le gouvernement doit le préserver pour tout citoyen.
Certes l'erreur est punissable mais par une justice équitable et transparente non par la diffamation, les insultes et autres surnoms dégradants visant l'accusé.
Troisièmement: les déclarations d'un homme politique peuvent avoir une finalité électorale et populiste et ne sont limitées que par l'obligation de réserve supposée dans toute personne à chaque fois qu'il s'agit d'affaires pendantes devant la justice.
Il est en effet défendu d'évoquer le contenu de ces affaires devant l'opinion publique pour garantir l'indépendance et l'impartialité de la Justice, encore moins par le ministre concerné lui-même et de cette manière.
C'est l'ingérence même dans la Justice.
Le ministre de la Justice ne doit-il pas, comme dans toute démocratie, avoir une obligation de réserve totale et s'abstenir de tout commentaire à propos des présumés innocents et des affaires en cours?
N'est-ce pas là le devoir d'un ministre de la Justice dans n'importe qu'elle démocratie qui respecte les principes universels des droits de l'Homme?

Comment puis-je croire en une justice équitable et indépendante alors que je suis l'objet d'insultes et de diffamations par le ministre de la Justice représentant de la justice et de tous les magistrats.
Dieu a dit dans le Coran: «Et quand vous jugez entre les gens, de juger avec équité. Quelle bonne exhortation qu'Allah vous fait!»
Allah est en vérité celui qui entend et qui voit tout.
Dans l'attente d'une justice équitable, veuillez croire Monsieur le Ministre, en l'expression de mes salutations les plus distinguées.
Signé Belhassen Trabelsi