Aujourd'hui, les Tunisiens se réveillent chaque matin pareils à des brebis égarées, ne sachant trop ce qui les attend, ni le chemin à prendre pensant à leur propre personne, à leur famille et à leurs enfants...
Par Lamiss Kerkeni*
Le plus triste aujourd'hui en Tunisie, outre la situation catastrophique de l'économie, la dérive sociale, religieuse et identitaire dans laquelle nous plongent les voyous qui nous gouvernent, c'est qu'ils ont ébranlé nos vies dans ce qu'elles ont de plus précieux et de plus fondamental : nos repères.
Car qu'est ce que la Tunisie aujourd'hui? Dans quelle société évoluons-nous? Et que réserve donc l'avenir aux enfants de ce pays?
Ils sont venus étrangers et tout dans leurs actes est adversité, destruction et spoliation. Ils ne sont pas venus vivre avec nous; ils sont venus construire leur nouveau chez eux, chez nous! Ils façonnent, créent, transforment à la mode de chez eux ce que nous n'avons jamais approuvé. Ils ont utilisé la ruse, l'usurpation, le mensonge et la tromperie, pour nous faire signer un contrat dont ils sont les seuls à connaître les règles.
Aujourd'hui, les Tunisiens, où qu'ils soient, se réveillent chaque matin pareils à des brebis égarées, ne sachant trop ce qui les attend, ni le chemin à prendre pensant à leur propre personne, à leur famille et à leurs enfants... l'angoisse nous assomme, nous plonge dans un état second dont seul cet étranger profite. Lui continue à s'installer, ses tentacules investissent chaque jours un peu plus ce pays millénaire dont il ne saisit visiblement pas la complexité, mais qu'importe ! Ce qui compte à cette étape c'est de détruire massivement, vite, vite, vite ! Avant que nous ne reprenions nos esprits.
L'étranger est venu préparé, mener une guerre que nous n'avions pas vu venir.
Et nous... nous... nous avons aujourd'hui perdu confiance. Nous n'avons plus confiance en rien, ni en nos institutions, ni en nos structures, ni en nos fondations et aussi discutables eussent-elles été, celles-ci nous permettaient tout de même d'avancer... lentement certes, mais sans cette masse d'angoisse qui s'abat sur nous, sans cette peur de tout, car plus rien n'est acquis.
Nous avons perdu confiance en nous, en l'autre, en notre voisin, en notre cousin, en notre oncle ou en tout autre membre de notre famille qui veut tout d'un coup lui aussi nous imposer sa façon de voir la vie. Parce qu'aujourd'hui l'État est mort, certaines petites personnes ayant contribué à cet assassinat jubilent et y voient l'occasion rêvée de se faire enfin respecter... et à ce jeu, tout est permis! Gifler, brûler, tirer, voler, mentir, absolument tout est permis si tu fréquentes leurs mosquées, si tu bois avec eux le thé et que tu serres la main à leur cheikh, tu as tous les droits.
Aujourd'hui, l'étranger est arrivé chez nous, il pose des bombes au sens propre et figuré pour nous dire «Regardez! La société implose! Il faut tout changer!».
Aujourd'hui, cet étranger venu chez nous est un terroriste qui a su berner les pauvres.
* Assistante de recherche en gestion publique internationale, à l'Ecole nationale d'administration publique, Montréal, Canada.