Les Tunisiens devraient, au besoin, descendre une fois encore dans la rue. En masse mais uniquement dans la dignité, le calme et le respect. Pour montrer ainsi cette volonté irréversible de ne plus connaitre la duperie.
Par Henri Diacono*
Tunisien, il ne faudra pas se tromper. Finis le Moyen-Age et la dictature. De ce fait il ne faut plus retomber entre des mains, ou plutôt des tenailles, plus sournoises encore, et surtout aussi viles que celles qui les ont précédées. Or il est évident que par de multiples faits et méfaits qui ont été jusqu'au meurtre, on essaie de dévier ta vigilance en même temps que semer la peur à défaut de la lassitude. Car pour ceux qui, cachés, veulent garder leurs mains sales sur le monde, feront tout pour que TA révolution ne fasse traînée de poudre à travers tout le monde arabophone de confession musulmane où vivent néanmoins une multitude de chrétiens en Liban, Egypte, Irak et surtout Syrie devenue depuis peu leur proie. Là est leur crainte la plus vive.
Un gouvernement provisoire n'engage pas l'avenir
En clair, ils souhaitent garder ta terre «sous contrôle». Pour cela, ils ont envoyé plusieurs de leurs marionnettes (et le feront encore) qu'ils savent si bien manipuler depuis celles de la Péninsule Arabique, ses chameaux et ses pétrodollars jusqu'à certains de tes compatriotes «bien éduqués» pendant tant d'années chez eux ou certains de leurs alliés. Enfin pour donner soi-disant à choisir ils ont sournoisement glissé dans ce jeu de quilles une foule de politicards qui, plus que le futur de leur nation, pensent surtout au leur. Le tout pimenté de quelques ruades violentes de «méchants groupuscules radicalisés» (inspirés et financés par l'un des valets cités plus haut) et voilà le citoyen qui court à nouveau le risque d'être bien empaqueté.
Il faut savoir une bonne fois pour toutes que ceux qui gouvernent le pays depuis plus de deux ans ne le font qu'à titre provisoire et n'ont pas le droit d'engager son avenir avant qu'il ne soit doté d'une nouvelle Constitution et d'avoir à nouveau pris le chemin des urnes. Là est leur faille et il faudra s'y engouffrer avec le plus de courage possible. Et le plus vite. En faisant la sourde oreille aux vagues de mensonges et de diversions qui vont essayer de noyer à nouveau le citoyen.
Tout d'abord la Constitution. Malgré le talent certain de plusieurs des journalistes locaux, penchés sur elle, le peuple ignore encore de quel bois elle sera faite. A ce jour connaissent-ils, tous les Tunisiens dont elle régentera la vie, un seul de ses articles? Je ne le pense pas. Savent-ils par exemple que 217 députés pour un pays peuplé de 10 millions d'habitants est un nombre excessif? Et que dans ce même chapitre des chiffres, plus de 50 ministres et sous-ministres l'est également. Tout comme les palais mis à la disposition d'un président de la république qu'on souhaiterait plus humble, etc. Pourquoi vouloir calquer cette démocratie toute neuve sur celles de nations et même de continents qui commencent à étaler au grand jour leurs limites dans l'efficacité de leurs pouvoirs publics? Qui plongent et replongent dans des débats sans fin et qui de compromis en compromissions, de sous-commissions en commissions, finissent de sombrer dans des lois boiteuses et donc très vite inefficaces.
Ce peuple que l'on veut berner
Pourquoi ne pas exiger de cette Assemblée nationale constituante (Anc) qui est loin d'être «docte», d'informer régulièrement son peuple, par voie de presse écrite, parlée ou télévisée, dans la simplicité, l'avancement de ses travaux aidée en cela par des juristes patentés? Pourquoi, à la fin de son mandat, ne pas demander à ce même peuple, plus ou moins éduqué depuis, de se prononcer par voie référendaire sur ce texte vital pour lui à la condition qu'il lui soit présenté dans une lecture accessible à une large majorité?
Pourquoi ne pas innover, faire des propositions? Par exemple en finir avec la politique en tant que profession. Deux mandats électifs pas un de plus. Itou pour le président qui aura la lourde charge d'arbitrer, en tant que sage, sur des projets de loi pour lesquels l'Assemblée nationale n'aura pas réussi à s'entendre. Mais aussi lorsque celle-ci voudra engager le pays dans des voies ou réformes intérieures ou (et) des démarches extérieures importantes. Même rigueur de durée pour les gouvernants et leurs ministres et surtout réduction drastique des postes. Des gouverneurs en nombre réduit également selon un découpage du pays équitable pour tous, non seulement pour gérer, mais pour animer et défendre les citoyens. Et bien d'autres encore...
Il faudrait ensuite demeurer vigilant, avec comme priorité «étrangère» celle de pousser les élus à jeter enfin des ponts solides entre les deux rives de la Méditerranée, mais à la condition irréversible de s'y présenter en compagnie de ses voisins de droite et de gauche, Algérie et Libye, dans un premier temps, face à l'Espagne, la France et l'Italie, les trois occidentaux avec lesquels l'entente sera meilleure. En pratiquant le donnant-donnant. Le franc-jeu. D'égal à égal. Sans pour autant demeurer fermé à d'autres «partenariats».
Le Tunisien aura très prochainement l'occasion de faire comprendre cette volonté à l'un de ses «proches voisins d'en face», le Français François Hollande. Au besoin en descendant une fois encore dans la rue. En masse mais uniquement dans la dignité, le calme et le respect, il lui montrera ainsi sa volonté irréversible de ne plus connaitre la duperie. Il faudra croire en cette volonté, car, et j'en suis persuadé, l'intelligence habite la Tunisie.
Toute réflexion faite, n'est-il pas déjà trop tard pour voir se réaliser un tel scénario?
La fameuse Anc, construite de bric et de broc, enceinte, où l'absentéisme bas tous les records, essaie actuellement, en catimini, d'annoncer la finalisation du projet de Constitution pour la fin avril et les élections générales entre la mi-septembre et la mi-octobre... Tiens donc. Exactement ou presque, comme exigé récemment par l'illustre visiteur spécial que l'Oncle Sam avait envoyé faire une tournée dans la région, et en Europe.
Ben voyons !!!
* Français d'origine tunisienne résident en Tunisie.