De plus en plus de Tunisiens n'aiment plus Ennahdha pour lequel beaucoup avaient pourtant voté le 23 octobre 2011. Et à ce rythme là, ils vont carrément vomir ce parti monolithique, tout comme ils ont vomi le Rcd, il y a seulement 2 ans...
Par Welid Naffati
Ca fait des mois que je suis devenu un inconditionnel de ''Sandouq Ajab'' de Mosaïque FM. Cette rubrique où les auditeurs de la chaine enregistrent leurs messages, histoire de se faire entendre, de s'exprimer...
Depuis la refonte du site qui a rendu possible la consultation des émissions de la chaine sous forme de Podcast, je me permets de faire, de temps à autre, des séances d'écoute prolongées des réclamations des citoyens en fouillant dans les archives.
Qu'on soit d'accord sur une point: cette rubrique est conçue dans le but de faire parler les citoyens eux mêmes de leurs problèmes. C'est, donc, tout-à-fait normal de n'avoir que des râleurs au bout du fil. Mais au fil des semaines, un changement du ton des intervenants est devenu flagrant.
Mais que font-ils avec notre argent?
1 - Avant, il y avait beaucoup plus de messages du genre «Khalli el-houkouma tekhdem», «Ya i3lam naqes me-naqd» (''Laissez le gouvernement travailler'', ''Hey les médias, limitez vos critiques'') et des trucs dans ce genre. Bizarrement, on entend moins souvent ce type de message. Même après la prise de l'accession de Lârayedh à la présidence du gouvernement.
2- Avant, on râlait sur la cherté de la vie tout en critiquant l'Ugtt car «on ne les laissaient pas travailler pour gagner plus». Mais il y a eu un point de rupture : l'augmentation du prix de l'essence. Depuis les citoyens n'arrêtent plus de critiquer ouvertement le gouvernement.
3- Avant, les Tunisiens évoquaient de temps en temps le problème de salubrité des rues et l'état dégradé des routes. Maintenant, les 3/4 des appels évoquent, inlassablement, ces sujets.
4- Avant, il y avait un certain humour noir : «tmaqiîr» et «tanbir» – mots typiquement tunisiens qu'on peut traduire approximativement par moquerie et médisance – dans les interventions des auditeurs. Maintenant, le ton est tantôt désabusé, tantôt révolté (on parle doucement au départ quand la personne expose son problème, puis commence vite à crier en demandant, souvent, «Mais où sont les responsables? Mais que faites-vous avec notre argent?», etc.
De la déception au désamour
De plus en plus d'auditeurs ont, par ailleurs, fait remarquer que le Tunisien n'est plus souriant, chaleureux et optimiste comme avant. D'autres ont clairement exprimé leur regret d'une certaine époque où le Tunisien était connu pour sa joie de vivre.
On sent la grogne chez le Tunisien qui n'en peux plus. Pour faire diversion et détourner l'attention des échecs du gouvernement de la "troïka", Ghannouchi aura beau parler des «extrémistes laïques», d'«islam en danger», du «retour du Rcd via Nida Tounes», des «bâtons dans les roues», des «forces gauchistes antirévolutionnaires», etc. En réalité, il s'éloigne, chaque jour un peu plus, de monsieur et madame tout le monde... du Tunisien lambda... de la Tunisie réelle. S'il n'est plus exilé à Londres, le président du parti islamiste Ennahdha est de plus en plus étranger chez lui, en Tunisie.
La rupture d'Ennahdha avec le peuple tunisien est devenue une réalité. Mais cet état de pourrissement généralisé dont souffre le pays, et que le parti de Rached Ghannouchi semble ne plus maitriser, aura des conséquences désastreuses sur le mouvement islamiste.
De plus en plus de Tunisiens n'aiment plus Ennahdha pour lequel beaucoup avaient pourtant voté le 23 octobre 2011. Et à ce rythme là, ils vont carrément vomir ce parti monolithique, tout comme ils ont vomi le Rcd, il y a seulement 2 ans...