Dix mesures immédiates qui permettraient aux Tunisiens résidents à l'étranger de jouer pleinement leur rôle dans le décollage du pays.
Par Samir Bouzidi
Revue sommaire de mesures aussi simples qu'efficaces intégrant les intérêts de notre communauté à l'étranger et les enjeux à court terme du pays.
1. Des billets d'avions pour toutes les bourses:
Eternel grief et manque à gagner abyssale pour le pays, les tarifs de l'aérien entre les pays à forte concentration de notre communauté (France, Italie, Pays du Golfe...) et la Tunisie sont hors de prix pour la haute saison. Dépassement du prix psychologique pour certains et/ou manque de moyens pour la majorité, chaque été entre 100 et 150.000 concitoyens vivent l'air du pays par procuration à la TV et au téléphone.
L'Etat doit intervenir directement en garantissant la disponibilité de vols charters suffisants en nombre et des tarifs sociaux sur les vols réguliers de la compagnie nationale.
2. Transferts d'argent à zéro frais:
Fer de lance de la politique d'incitation du Maroc vis-à-vis de sa diaspora et... interminable talon d'Achille de la politique tunisienne. Chaque année, les Tunisiens de l'étranger transfèrent au pays en moyenne un milliard d'euros mais on estime le manque à gagner pour le pays à un demi-milliard dans l'informel à cause notamment de frais de transfert parmi les plus élevés au monde.
A l'image de qui se pratique au Maroc, l'Etat doit garantir la gratuité (sur la partie tunisienne) des frais moyennant une contrepartie à négocier avec les banques tunisiennes.
Réviser les tarifs du transport pour permettre des retours fréquents au pays.
3. Des hôtels pour les familles:
Selon les dernières statistiques officielles du tourisme tunisien, plus d'un touriste sur quatre en Tunisie est un Tunisien de l'étranger. Magnifique performance si l'on précise que le ministère du Tourisme n'a jamais dépensé un euro en pub et marketing sur les Tunisiens de l'étranger (TRE).
Pour booster les nuitées en hôtels, revenons aux recettes promotionnelles qui ont fait leurs preuves sur cette clientèle essentiellement familiale: réduction tarifaire de 30% et gratuité pour les enfants de moins de douze ans logés dans la même chambre (Packs familles)...
4. Taux de change préférentiel avec 0% de commission pour les «gros clients»:
Récompensons les citoyens modèles et grands pourvoyeurs de devises qui décident de changer légalement leurs devises au pays. A partir d'un montant précis à changer d'une seule traite (nous conseillons 1.500 euros), la banque accorde un taux préférentiel +0 frais et autres avantages...
5. Epargner en euros avec un capital garanti par l'Etat:
L'épargne bancaire des TRE est marginale en Tunisie. En cause: des produits mal «marketés» et des rendements «bof»! En outre, ce frein indéniable: «Souscription en euros mais liquidation obligatoire en DT» à l'image de qui se pratique sur le seul produit d'épargne populaire chez les Tunisiens de l'étranger: le Plan Epargne Logement (PEL).
En termes simples, vous ramenez des euros et vous sortez avec des dinars. L'Etat doit impulser une dynamique nouvelle sur ce segment en commençant par faire évoluer la législation et garantir le capital souscrit selon certaines conditions.
6. L'immobilier à prix juste:
Selon les sources professionnelles, près de dix mille appartements dans le Grand Tunis ne trouvent pas preneurs et au moins l'équivalent en régions. L'Etat pourrait intervenir auprès de la chambre des promoteurs immobiliers afin d'accorder des avantages tarifaires dans le cas de transactions partielles ou complètes en euros avec des non-résidents.
7. Un emprunt obligataire «Tunisiens de l'étranger» pour financer les investissements dans les régions:
Plus lent à mettre en œuvre mais il s'agit là d'une alternative sérieuse pour emprunter sur le marché international des capitaux.
Encouragé par la Banque africaine de développement (BAD), l'Ethiopie a franchi le pas avec brio et une dizaine d'autres pays africains s'y préparent (Cap-Vert, Kenya, Ghana, Maroc...).
Eu égard au montant actuel des transferts d'argent provenant des Tunisiens de l'étranger, un emprunt obligataire de 100-150 millions d'euros sur la diaspora tunisienne visant le développement d'infrastructures (et l'emploi) dans les régions aurait beaucoup de sens !
8. Un Fonds «Tunisiens de l'étranger» pour les projets innovants:
Afin de booster l'investissement productif au pays (= le maillon faible des TRE) dans les secteurs neufs à forte valeur ajoutée et/ou tout projet innovant, pourquoi ne pas lancer un fonds d'investissements alimenté par l'Etat et destiné aux TRE?
Un certain nombre de compétences et de professionnels à l'étranger réfléchissent actuellement à l'opportunité d'investir en Tunisie. A l'heure actuelle, les banques tunisiennes ne sont pas en mesure de satisfaire cette demande.
9. Consommer le «Made in Tunisia»:
Les Tunisiens de l'étranger sont affectueusement liés au «Made in Tunisia» qui en saisissent, par ailleurs, toute la portée économique. Encore faut-il les sensibiliser pendant leur séjour en Tunisie au moyen d'une campagne de communication, d'un étiquetage spécifique...
10. Amorcer certaines formalités depuis les consulats:
Trop de bureaucratie tue l'action! Dans le domaine de la création d'entreprise et à l'image de ce qui se fait dans les consulats canadiens, pourquoi ne pas prévoir d'amorcer certaines formalités de constitution d'une entreprise depuis les consulats?
Les missions des consulats doivent évoluer pour mieux intégrer les nouveaux besoins de la communauté et les enjeux du pays. Dans ce sens, il faut penser à un mode de fonctionnement plus participatif des consulats (mise en place de «conseils d'administration» mixte avec consul, représentants d'administrations/société publiques et citoyens...)
Source : ''00216Mag''.
Illustrations: Office des Tunisiens à l'étranger.