Niqab3Nous publions ci-dessous une pétition intitulée ‘‘Voile intégral et libertés académiques en Tunisie: demande d’intervention en faveur d’Hassouna Najjar’’*.

Victime de tracasseries administratives depuis le 5 décembre 2013, Hassouna Najjar, assistant germaniste à l'ISEAH de Tunis, est actuellement au chômage forcé et n’a pas encore perçu de salaire depuis son recrutement en septembre 2013, ceci pour avoir voulu faire appliquer le règlement administratif en refusant l’accès à la salle d’examen à deux étudiantes portant le voile intégral.

Voici la chronologie des faits :

1. Le 5 décembre 2013, une étudiante portant le voile intégral se présente pour passer les examens. Hassouna Najjar, qui était de surveillance, lui demande de dévoiler son visage, conformément aux règles administratives en vigueur dans ces circonstances, normes confirmées à plusieurs reprises par le tribunal administratif en Tunisie. Mais l’étudiante refuse de satisfaire à sa demande et appelle en renfort des membres de sa famille, qui promettent de harceler l’enseignant en le poursuivant jusque dans sa ville natale (Djerba) et le menacent de mort.

Quelques jours plus tard, le 10 décembre 2013, Hassouna Najjar dépose une plainte auprès du Procureur de la République. Mais il n’obtient aucune réponse (ce qui est surprenant quand on se rappelle la célérité avec laquelle la plainte mensongère d’une étudiante portant le niqab contre le professeur Habib Kazdaghli, doyen de la Faculté des Lettres, des Arts et des Humanités de La Manouba, avait été traitée – plainte qui a eu pour résultat un procès inique ayant duré plus de deux années et qui s’est terminé par un non-lieu en faveur du doyen).

2. Le 15 janvier 2014, Hassouna Najjar se trouve confronté à une autre étudiante niqabée à qui l’administration permet pourtant d'entrer, malgré l'objection de l'enseignant.

Le 14 février 2014, dans son bureau, le président de l’Université de Tunis le menace de renvoi et lui refuse le versement de son salaire: «Je ne vais pas te payer, affirme-t-il, tu vas être renvoyé! La gauche radicale, je la connais très bien!», et ceci alors qu’Hassouna Najjar, qui n’est membre d’aucun parti, n’a fait que prendre ses responsabilités de citoyen et d’intellectuel à un moment crucial de son pays en proie au terrorisme et aux assassinats perpétrés par des fanatiques religieux dans le but de faire basculer la Tunisie dans l’obscurantisme au nom d’une conception moyenâgeuse de l’islam.

3. Profondément choqué par les menaces de mort proférées à son encontre par les parents et amis des étudiantes niqabées et par l’agressivité de l’administration de l’ISEAH à son égard, qui, au lieu de l’aider, s’en prend à lui, Hassouna Najjar se voit contraint, vu son état de santé psychologique, d’aller voir un médecin. Celui-ci lui prescrit un arrêt de travail et demande sa mutation dans un autre établissement.

4. Le 28 février 2014, Hassouna Najjar est invité par l'Association tunisienne de défense des valeurs universitaires (Atdvu) en tant que témoin et victime de violations des libertés académiques, mais ses déclarations provoquent l’ire du Président de l’Université de Tunis, qui assistait à la conférence. S’en suivent des questionnaires et une contre-visite médicale.

5. Pour régler sa situation, Hassouna Najjar dépose, au mois de mai 2014, une demande de mutation auprès de son établissement universitaire, demande à laquelle le ministère de l’Enseignement supérieur n’a pas répondu. Il a également déposé une plainte, deux pétitions et une demande de rendez-vous avec le ministre en février 2014, mais n’a obtenu jusqu’à présent aucune réponse.

6. Après avoir vainement tenté à maintes reprises d’obtenir du rectorat et du ministère le versement de son salaire et sa mutation, Hassouna Najjar s’est décidé à déposer une plainte contre le ministère auprès du tribunal administratif, une décision dont il a informé la Fédération syndicale de l’enseignement supérieur. L’affaire est en cours…

Considérant que Hassouna Najjar n’a fait qu’agir en son âme et conscience vis-à-vis des étudiantes niqabées, au nom des valeurs universitaires que tout enseignant est censé défendre, nous signataires de la présente pétition lui exprimons notre entière solidarité et déclarons qu’il est URGENT de mettre fin à la situation injustifiée de précarité dans laquelle il se trouve en lui :

- versant l'intégralité de ses salaires depuis septembre 2013 ;

- prenant en considération sa demande de mutation.

 

* Pétition signée par plusieurs universitaires et adressée à Taoufik Jelassi, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique.

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