Caid-Essebsi-au-Mosaulee-Belhassen-Chedli-Banniere

La victoire des partis progressistes aux dernières élections est celle de l'islam tunisien, ouvert et tolérant, sur l'islam fondamentaliste d'Ennahdha et de ses alliés.

Par Mohamed Salah Kasmi*

La démocratie a donc parlé et la République tunisienne a été sauvée des dérives de l'islam politique.

Les résultats des élections législatives et du 1er tour de la présidentielle montrent à l'évidence que le parti islamiste Ennahdha, aux principes à géométrie variable mais fondamentalement fondamentaliste, a perdu du terrain. Les résultats de ces élections, qui ne tarderont pas à être confortés par ceux du second tour de la présidentielle, scellent aussi la victoire de l'islam local sur l'islam importé.

C'est la victoire de l'islam tolérant, adapté aux mœurs de notre temps et ouvert sur la modernité, sur d'autres rites et d'autres religions; un islam modéré et de juste-milieu, présent sur nos terres depuis 14 siècles. Cet islam paisible, de paix et de non violence s'inscrit dans l'histoire culturelle de notre pays.

C'est aussi une victoire sur l'islam importé, rétrograde et d'exclusion, qui n'est pas en phase avec la mentalité tunisienne. Car il est bâti sur une lecture fondamentaliste du Coran, voire littéraliste. Il propose le modèle d'une société fermée, régressive et archaïque, et rejette l'«ijtihad», c'est-à-dire l'effort de réflexion, la théologie du doute, la démocratie en termes de pluralité d'opinions et la modernité synonyme d'ouverture et de progrès.

L'islam importé s'est implanté en Tunisie, notamment pendant la gouvernance de la troïka, la coalition gouvernementale dominée par le parti islamiste Ennahdha, qui a gouverné le pays entre décembre 2011 et janvier 2014. Radical, il n'a cessé de véhiculer des idées moyenâgeuses en revendiquant un ensemble d'interdictions telles que la danse, la musique, la peinture, etc. Prônant la séparation des sexes et l'excommunication, il a fait le lit de l'extrémisme et ouvert la voie à la prolifération des groupes terroristes, aux assassinats, aux attentats et aux violences commises au nom d'Allah.

La défaite d'Ennahdha est donc un succès éclatant de l'islam local qui ne veut pas qu'on l'enferme dans une idéologie absolutiste visant à gouverner selon la charia et à instaurer le califat.

Cette attitude de rejet du fondamentalisme n'empêche pas les musulmans en Tunisie de rester attachés aux valeurs traditionnelles et de respecter l'islam local conservateur.

Islamistes-extremistes

Les islamistes violents n'ont pas leur place en Tunisie.

La frange des Tunisiens adeptes de cet islam à la fois conservateur et tolérant a souffert sous l'ancien régime de la réglementation brutale des pratiques religieuses. Elle a été terrorisée par une police omniprésente qui surveillait les mouvements des fidèles ainsi que leur tenue vestimentaire et traquait les porteurs des barbes. Sous le règne de la troïka, ces mêmes fidèles ont souffert des extrémistes religieux qui ont envahi les mosquées et ont imposé leurs pratiques de l'islam importé.

La victoire des partis progressistes va permettre enfin à l'Etat d'appliquer strictement les dispositions de l'article 6 de la constitution garantissant «la neutralité des mosquées et lieux de culte par rapport à toute instrumentalisation partisane».

Illustration: Béji Caïd Essebsi en visite au Mausolée de Belhassen Chedy à Tunis avec les cheikhs de la mosquée Zitouna.

*Ecrivain et essayiste, auteur ''De Tunisie : l'islam local face à l'islam importé'', éd. L'Harmattan, Paris, octobre 2014.

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