Greve des enseignants Banniere

A l'heure où on s'attend à des réformes économiques, on reçoit sur la gueule des sit-ins et des grèves sauvages un peu partout. De quoi avoir peur pour notre pays...

Par Mohamed Rebai*

Dans sa lutte contre les grèves sauvages, le gouvernement semble baisser les bras. Le journal télévisé de 20H du lundi 16 février 2015 nous apprend que le secteur des textiles, déjà fragilisé par la révolution, est paralysé par un débrayage sauvage des ouvriers et des ouvrières à Ksar Essaid, à l'ouest de Tunis, demandant l'exonération pure et simple des retenues sur salaires. Je pense que c'est une première dans les annales des revendications sociales suscitées par des courants politiques – sans les citer – nihilistes et dévastateurs.

Ces salariés ne savent pas que les patrons tunisiens ne vont pas tenir leurs engagements, en ne livrant pas «juste à temps» les commandes à l'étranger. Ce qui va entrainer des pénalités de retard de livraison et un manque à gagner énorme. Les donneurs d'ordre vont se rabattre sur d'autres exécutants plus performants, moins couteux et plus sérieux, qu'ils vont dénicher facilement en Asie. Cela signifie que nous subissons un processus de désinvestissement. Ainsi, tout le monde va se retrouver bien speedé pour toujours. Et par un curieux paradoxe, on demande au gouvernement la création d'usines pour contenir le chômage.

Malheureusement, nos dirigeants politiques et syndicaux, qui se partagent le pouvoir, ne se rendent pas compte de l'ampleur des déficits de l'Etat et des entreprises publiques et privées.

La compétitivité, à l'heure de la mondialisation, ils s'en foutent royalement. Ils préfèrent s'assoir confortablement sur un système de rente publique financée en grande partie par des crédits étrangers asphyxiants et parcimonieux. Nous mangeons et nous roulons, déjà, sur les fonds de la caisse de compensation et, maintenant, on ne veut plus payer d'impôts. Quelle poisse !

A l'heure où on s'attend à des réformes, à peine initiées par le gouvernement en place, on reçoit sur la gueule des sit-ins et des grèves sauvages un peu partout. Aujourd'hui, mardi 17 février 2015, c'est le tour des profs de l'enseignement secondaire.

On n'est pas contre la liberté syndicale mais, avec les concessions accordées par les gouvernements successifs et le patronat depuis l'indépendance, on se demande pourquoi on se retrouve toujours au point zéro. L'affaiblissement du syndicalisme est un phénomène planétaire (taux mondial des syndiqués voisinant les 10% soit 167 millions) sauf en Tunisie où la pression syndicale est trop forte. Et dans la foulée, on oublie les premiers demandeurs d'emploi. Bref en deux mots, on a bien peur pour notre pays.

* Economiste.

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