Comme l’ont souligné à maintes reprises, les différents responsables européens et américains en visite à Tunis, le dernier en date étant le président de l’Ocde: «La révolution tunisienne est un modèle pour toute la région, qui ne doit pas échouer».
Personne n’en sous-estime le risque et comme pour toute révolution, la grande majorité des Tunisiens en sont pleinement conscients.
Laisser de côté les manœuvres politiciennes
Effectivement les faits et les chiffres montrent une multitude d’entorses à la paix civile dont l’origine est due à la fois à l’action souterraine de forces visant à faire échouer la révolution mais aussi au manque de confiance ressenti par des citoyens que l’on divise à souhait, que l’on monte les uns contre les autres et qui ne sont pas toujours convaincus de la transparence et de l’impartialité de l’action politique du gouvernement et de certains partis en place dans les nouveaux rouages des assemblées constituées.
Ces partis et syndicats, dont la plupart existent depuis l’ère Ben Ali, devraient laisser de côté les manœuvres politiciennes visant à se placer confortablement pour être aux premières loges et ce au dépens de tout renouvellement, innovation et surtout de l’intérêt général.
Personne ne met en doute que le gouvernement de Béji Caid Essebssi travaille mais, tout en affirmant la logique nécessité de restaurer l’autorité de l’Etat en cette période transitoire, il a, par exemple, favorisé un certain vide dangereux sur l’échiquier politique en se pliant à toutes les décisions prises par une haute assemblée porteuse, au vu de certaines décisions (pas toutes bien sûr), d’une certaine immaturité politique favorisant les ambitions politiciennes et les règlements de compte de certains groupes politiques déjà sur la place et premiers arrivés qui se sont vite attelés pour éliminer tous les autres adversaires politiques potentiels y compris par la punition collective, la plus significative étant celle envers plus d’un million d’électeurs de l’ex-Rcd mettant dans le même sac les hauts dirigeants nationaux et régionaux corrompus avec tout le reste de la troupe, les ripoux et les sincères sans laisser à la justice faire le tri entre les coupables de crimes ou de délits et ceux innocents qui ont travaillé au service des institutions avant les intérêts de Ben Ali. Ils sont actuellement les champions pour accélérer le calendrier en leur faveur sachant que cette précipitation est à leur avantage quoique non judicieuse et risquant de laisser des goûts amers.
Tous ces éléments et d’autres aussi ne peuvent qu’être sources de division, de sentiment d’injustice et de préparation du lit des extrêmes.
La parité: laisser le temps au temps
Ainsi, en ce qui concerne la loi sur la parité, personne n’est contre mais il faut laisser le temps au temps plutôt que de se lancer dans les discours et voies démagogiques impossibles à pratiquer dans la réalité avec un air de fuite en avant idéologique irréfléchi qui, ici aussi, renforce le fossé hommes-femmes déjà bien entamé par la politique volontairement séparatiste de Ben Ali.
Ce déficit de confiance en général existe encore hélas, malgré de réelles avancées, et ce d’autant plus qu’associé à la crise économique et financière, il continue de ramper au niveau de toutes les institutions, depuis les forces de sécurité malmenées tous corps confondus sans distinction jusqu’à la société civile en passant par les juges, les avocats, le citoyen, le patronat, le syndicat ouvrier, etc.
Le tout est entretenu par des médias qui ne disposent pas comme ailleurs de feuille de route consensuelle ou de charte d’éthique de rassemblement et d’unité autour de valeurs.
A tous les niveaux, il y a d’abord des principes à respecter pour assurer la pérennité et la consolidation démocratique.
On ne peut continuer, comme à l’ancien temps, à privilégier certains individus, partis ou personnalités politiques au détriment d’autres. Ainsi, il n’est pas acceptable qu’un grand nombre de partis attendent encore leurs visas comme si l’on souhaitait la rebelote avec toutes les anciennes formations même dites d’opposition du temps du règne Ben Ali et ce sous le fallacieux prétexte qu’il y en a trop. Bref un jeu pas toujours sain ni éthique qui ne laisse pas la place à l’innovation et à la liberté des urnes.
Rétablir la confiance dans les institutions
Avec tout ce qui énuméré ci-dessus, cela fait trop pour le malheureux citoyen qui comprend les enjeux de ceux perchés là-haut qui ne semblent pas pouvoir joindre les deux bouts pour consolider les acquis de la révolution et l’intérêt général. Bref, il y a de quoi râler davantage.
La solution est donc de rétablir avant tout la confiance dans les institutions en particulier celles sensibles, en premier la justice. Une justice forte, sereine, humaine, transparente, indépendante des couleurs politiques qui doit être rapidement fonctionnelle et c’est à elle de juger rapidement et en toute transparence les crimes et délits d’où qu’ils viennent en évitant toute punition collective et chasse aux sorcières, au gré des desideratas de certaines formations ou personnalités dont on n’est pas sûr qu’elles ont toutes la conscience tranquille.
Cette nouvelle justice peut être supervisée par la commission actuelle d’enquête sur la corruption et les malversations qui doit, elle aussi, être au dessus de tout soupçon ou de toutes couleurs, le Tunisien étant un et indivisible.
Le gouvernement transitoire, dont la tâche n’est certes pas facile, doit ainsi veiller à ce renforcement des institutions légales et à leur transparence. Il doit être réellement au-dessus des partis et non pas donner le sentiment d’avoir peur de telle ou telle tendance favorisant en coulisse certaines au détriment d’autres, etc.
Pour avoir l’autorité, il faut être juste
A ce jour, l’impression est que tout est fait pour favoriser les extrêmes de droite ou de gauche y compris ceux qui veulent utiliser la religion pour dépasser leurs concurrents. Le terroir est en leur faveur: le chômage, le déficit de valeurs, l’oppression du passé, les injustices non encore réhabilitées…
A nos gouvernants de faire preuve de plus de réalisme et de visibilité politique, en sachant que pour avoir de l’autorité et que cette autorité soit acceptée, il faut être juste avant tout. A l’inverse, l’injustice et le favoritisme ne peuvent aller de pair avec l’acceptation de l’autorité.
Cette situation de flou, et d’opacité par endroits, favorise les quelques faits divers, les grèves sauvages, les sit-in, les blocages de routes, les tabassages, le régionalisme et le clanisme qui sévissent ça et là.
Seule la confiance ramènera la stabilité dans les cœurs, les esprits et le fonctionnement progressif des institutions. La croissance, la reprise réelle de l’activité économique et l’emploi passent par là.
Les Tunisiens, dans leur immense majorité, privilégient le sens de la mesure et le font prévaloir sur les passions. La révolution tunisienne a su éviter le chaos et la guerre civile. Ce n’est pas un hasard.
Il est toujours temps de corriger le tir.
C’est déjà pour nous tous un grand bonheur d’avoir vécu cette révolution et de pouvoir assister encore à ces révoltes pour la dignité et la liberté autour de nous. Après les perturbations d’usage postrévolutionnaires que nous sommes à même de corriger, nos jeunes pourront espérer vivre dans un monde meilleur.
Le Tunisien a toujours su marier intelligemment ses propres valeurs et sa culture avec la modernité et les principes universelles.
Faisons tous ensemble pour que ce soit ainsi avec la dignité et la liberté en plus.
Source : ‘‘L’appel républicain’’
* Fondateur en 1990 du Front tunisien de salut national (Ftsn), ce médecin réfugié politique en France depuis 1989 a été, notamment, membre du conseil national de L’Ump, parti de l’actuelle majorité en France. Il est actuellement conseiller municipal du Kremlin-Bicêtre et conseiller communautaire du Val de Bièvre (Paris, France). Issu d'une famille de 10 enfants dont 5 médecins. Médecin lui-même et marié à une femme médecin, il a trois enfants universitaires. Il a créé en Tunisie le parti de l’Appel Républicain au lendemain de la révolution du 14 janvier.
La révolution tunisienne n’a pas droit à l’échec
les Tunisiens à privilégier le sens de la mesure et à le faire prévaloir sur les passions. Pour éviter le chaos et la guerre civile.
Comme l’ont souligné à maintes reprises, les différents responsables européens et américains en visite à Tunis, le dernier en date étant le président de l’Ocde: «La révolution tunisienne est un modèle pour toute la région, qui ne doit pas échouer».
Personne n’en sous-estime le risque et comme pour toute révolution, la grande majorité des Tunisiens en sont pleinement conscients.
Laisser de côté les manœuvres politiciennes
Effectivement les faits et les chiffres montrent une multitude d’entorses à la paix civile dont l’origine est due à la fois à l’action souterraine de forces visant à faire échouer la révolution mais aussi au manque de confiance ressenti par des citoyens que l’on divise à souhait, que l’on monte les uns contre les autres et qui ne sont pas toujours convaincus de la transparence et de l’impartialité de l’action politique du gouvernement et de certains partis en place dans les nouveaux rouages des assemblées constituées.
Ces partis et syndicats, dont la plupart existent depuis l’ère Ben Ali, devraient laisser de côté les manœuvres politiciennes visant à se placer confortablement pour être aux premières loges et ce au dépens de tout renouvellement, innovation et surtout de l’intérêt général.
Personne ne met en doute que le gouvernement de Béji Caid Essebssi travaille mais, tout en affirmant la logique nécessité de restaurer l’autorité de l’Etat en cette période transitoire, il a, par exemple, favorisé un certain vide dangereux sur l’échiquier politique en se pliant à toutes les décisions prises par une haute assemblée porteuse, au vu de certaines décisions (pas toutes bien sûr), d’une certaine immaturité politique favorisant les ambitions politiciennes et les règlements de compte de certains groupes politiques déjà sur la place et premiers arrivés qui se sont vite attelés pour éliminer tous les autres adversaires politiques potentiels y compris par la punition collective, la plus significative étant celle envers plus d’un million d’électeurs de l’ex-Rcd mettant dans le même sac les hauts dirigeants nationaux et régionaux corrompus avec tout le reste de la troupe, les ripoux et les sincères sans laisser à la justice faire le tri entre les coupables de crimes ou de délits et ceux innocents qui ont travaillé au service des institutions avant les intérêts de Ben Ali. Ils sont actuellement les champions pour accélérer le calendrier en leur faveur sachant que cette précipitation est à leur avantage quoique non judicieuse et risquant de laisser des goûts amers.
Tous ces éléments et d’autres aussi ne peuvent qu’être sources de division, de sentiment d’injustice et de préparation du lit des extrêmes.
La parité: laisser le temps au temps
Ainsi, en ce qui concerne la loi sur la parité, personne n’est contre mais il faut laisser le temps au temps plutôt que de se lancer dans les discours et voies démagogiques impossibles à pratiquer dans la réalité avec un air de fuite en avant idéologique irréfléchi qui, ici aussi, renforce le fossé hommes-femmes déjà bien entamé par la politique volontairement séparatiste de Ben Ali.
Ce déficit de confiance en général existe encore hélas, malgré de réelles avancées, et ce d’autant plus qu’associé à la crise économique et financière, il continue de ramper au niveau de toutes les institutions, depuis les forces de sécurité malmenées tous corps confondus sans distinction jusqu’à la société civile en passant par les juges, les avocats, le citoyen, le patronat, le syndicat ouvrier, etc.
Le tout est entretenu par des médias qui ne disposent pas comme ailleurs de feuille de route consensuelle ou de charte d’éthique de rassemblement et d’unité autour de valeurs.
A tous les niveaux, il y a d’abord des principes à respecter pour assurer la pérennité et la consolidation démocratique.
On ne peut continuer, comme à l’ancien temps, à privilégier certains individus, partis ou personnalités politiques au détriment d’autres. Ainsi, il n’est pas acceptable qu’un grand nombre de partis attendent encore leurs visas comme si l’on souhaitait la rebelote avec toutes les anciennes formations même dites d’opposition du temps du règne Ben Ali et ce sous le fallacieux prétexte qu’il y en a trop. Bref un jeu pas toujours sain ni éthique qui ne laisse pas la place à l’innovation et à la liberté des urnes.
Rétablir la confiance dans les institutions
Avec tout ce qui énuméré ci-dessus, cela fait trop pour le malheureux citoyen qui comprend les enjeux de ceux perchés là-haut qui ne semblent pas pouvoir joindre les deux bouts pour consolider les acquis de la révolution et l’intérêt général. Bref, il y a de quoi râler davantage.
La solution est donc de rétablir avant tout la confiance dans les institutions en particulier celles sensibles, en premier la justice. Une justice forte, sereine, humaine, transparente, indépendante des couleurs politiques qui doit être rapidement fonctionnelle et c’est à elle de juger rapidement et en toute transparence les crimes et délits d’où qu’ils viennent en évitant toute punition collective et chasse aux sorcières, au gré des desideratas de certaines formations ou personnalités dont on n’est pas sûr qu’elles ont toutes la conscience tranquille.
Cette nouvelle justice peut être supervisée par la commission actuelle d’enquête sur la corruption et les malversations qui doit, elle aussi, être au dessus de tout soupçon ou de toutes couleurs, le Tunisien étant un et indivisible.
Le gouvernement transitoire, dont la tâche n’est certes pas facile, doit ainsi veiller à ce renforcement des institutions légales et à leur transparence. Il doit être réellement au-dessus des partis et non pas donner le sentiment d’avoir peur de telle ou telle tendance favorisant en coulisse certaines au détriment d’autres, etc.
Pour avoir l’autorité, il faut être juste
A ce jour, l’impression est que tout est fait pour favoriser les extrêmes de droite ou de gauche y compris ceux qui veulent utiliser la religion pour dépasser leurs concurrents. Le terroir est en leur faveur: le chômage, le déficit de valeurs, l’oppression du passé, les injustices non encore réhabilitées…
A nos gouvernants de faire preuve de plus de réalisme et de visibilité politique, en sachant que pour avoir de l’autorité et que cette autorité soit acceptée, il faut être juste avant tout. A l’inverse, l’injustice et le favoritisme ne peuvent aller de pair avec l’acceptation de l’autorité.
Cette situation de flou, et d’opacité par endroits, favorise les quelques faits divers, les grèves sauvages, les sit-in, les blocages de routes, les tabassages, le régionalisme et le clanisme qui sévissent ça et là.
Seule la confiance ramènera la stabilité dans les cœurs, les esprits et le fonctionnement progressif des institutions. La croissance, la reprise réelle de l’activité économique et l’emploi passent par là.
Les Tunisiens, dans leur immense majorité, privilégient le sens de la mesure et le font prévaloir sur les passions. La révolution tunisienne a su éviter le chaos et la guerre civile. Ce n’est pas un hasard.
Il est toujours temps de corriger le tir.
C’est déjà pour nous tous un grand bonheur d’avoir vécu cette révolution et de pouvoir assister encore à ces révoltes pour la dignité et la liberté autour de nous. Après les perturbations d’usage postrévolutionnaires que nous sommes à même de corriger, nos jeunes pourront espérer vivre dans un monde meilleur.
Le Tunisien a toujours su marier intelligemment ses propres valeurs et sa culture avec la modernité et les principes universelles.
Faisons tous ensemble pour que ce soit ainsi avec la dignité et la liberté en plus.
Source : ‘‘L’appel républicain’’ http://lappel-republicain-tn.blogspot.com/