Abdelhamid Tarrouche écrit – Il convient de retenir la leçon des abus commis par l’ancien clan au pouvoir en mettant en place des dispositions juridiques et autres susceptibles de pareils abus à l’avenir.  


«A présent, le plus difficile reste à faire».Voilà une phrase prononcée par bon nombre d’entre nous, ou lue dans plusieurs journaux après ce que la Tunisie, enfin libre, a vécu, à la fois avec joie et douleur. Joie parce que les Tunisiens ont recouvré leur dignité et leur liberté. C’est ce qu’ils ont de plus cher pour pouvoir ensuite s’atteler à d’autres tâches exaltantes, comme la restructuration du pays et l’emploi. Et douleur car dans cette révolution, comme dans toutes les révolutions, il y a un prix à payer.
Le sang a malheureusement coulé et des dizaines de martyrs sont tombés au champ d’honneur. La Tunisie entière les a pleurés, tout comme nos compatriotes à l’étranger.

Le ver est dans le fruit
Reste que le plus difficile aura été cette révolution à laquelle, nous autres qui l’avions menée, n’avions pas cru pouvoir la réussir en nous débarrassant à jamais des tyrans. Ces derniers ont même tenté de s’y accrocher avec l’énergie du désespoir et ont fini par céder après s’être éclipsés pour amorcer un retour dès que les forces de police auraient la situation en main. Peine perdue, la révolte populaire l’a emporté.
Une fois que la Tunisie nouvelle aura fait son choix entre un régime présidentiel et parlementaire, élaboré sa nouvelle constitution, organisé les élections et élu ses députés, les Tunisiens doivent faire face à de nombreux défis.
Les multiples abus et excès qui ont été commis par l’ex-famille dirigeante et leur clan nous amènent à édicter un cadre législatif à même d’empêcher à l’avenir de tels abus. Il s’agit avant tout de mener une lutte sans merci contre la corruption, sujet demeuré tabou depuis l’indépendance et qui a pris des proportions alarmantes depuis 23 ans. Cette tare est ce qu'on appelle «le ver dans le fruit» quand elle s’installe au cœur de l’économie nationale.

Enrayer le fléau de la fuite des capitaux
Au niveau des banques, il y a lieu d’évoquer le cas de certaines personnes à qui l’on a accordé d’importants crédits sans garantie, grâce à l’intervention d’un intermédiaire au bras long qui a pu par la suite recevoir sa commission. Il va de soi que tous les intervenants, décideurs et intermédiaires doivent rendre des comptes.
Car ce n’est pas avec ce type d’opération pas très catholique que les banques vont pouvoir se doter d’une bonne santé financière.
Les biens fabuleux que l’ex-dictateur et sa famille se sont constitués à l’étranger, dénotent que la fuite des capitaux allait bon train depuis 23 ans. Des dispositions rigides (lois, contrôles et enquêtes) doivent être prises pour enrayer aussi ce ruineux fléau. De nombreux pays peinent à ce jour pour récupérer des fonds et de somptueuses résidences en Europe et aux Etats-Unis acquis frauduleusement, à l'image de Ferdinand Marcos (Philippines), Joseph Mobutu (R. D. Congo), Jean-Bedel Bokassa (République Centrafricaine), Jean-Claude Duvalier (Haïti) et tant d’autres déboulonnés ou encore solidement accrochés au pouvoir.