Dr Lilila Bouguira écrit – Les gens continuent de vouloir rêver de libération au lieu de braire docilement comme au bon vieux temps, pendant plus près de soixante ans.


Bââââe pour El Mbazaâ, bien ressuscité dans son costume de président et qui s’y refait une santé pour ne pas sommeiller sur ce fauteuil dont il n’a jamais rêvé, lui qui s’était longtemps tenu à l’ombre et au service de Ben Ali.
Bââââe pour Caïd Essebsi, tiré certes des archives mais que la brise du pouvoir a ragaillardi, requinqué, et qui, très fort, redistribue les cartes comme un véritable initié dans un savoir-faire et une main de fer bien pommadée.
Bââââe pour les autres membres du gouvernement transitoire mais qui font durer le provisoire, les redonnes, les partages fiftyfifty, en écartant un groupe trop souillé pour en rapprocher un autre moins médiatisé, et rebelote la misère.
Bââââe pour les agents de l’ordre, les policiers endurcis aux mains calleuses à force d’utiliser leurs matraques et qui se sont dérouillés les os sur le dos des manifestants encore ce dimanche.
Bââââe pour les médias qui s’essaient à un air de liberté, font de bons dossiers pimentés puis replongent dans la phobie des vérités pour nous farcir du superficiel, des papotages de café et des disputes de femmes au hammam.
Bââââe pour les chefs de partis bien politisés revigorés par ce nouveau vent de liberté, qui se refont une jeunesse et une virginité sur le dos des facebookers, des gens de la rue et des enflammés.
Bââââe pour la majorité silencieuse bien idyllique et si tendre dans des fringues endimanchées qui continue de s’accoutrer de non sens, de souplesse et de beaucoup de ridicule.
Bââââe pour la minorité criarde qui ne cesse de se révolter pour une revendication, le moindre remaniement, un changement comme une mauvaise circoncision.
Bââââe pour moi qui continue à écrire, et à vous de me lire, comme des invétérés, comme des fous de liberté.
Bââââe pour les jeunes et les moins jeunes, les juges, les avocats, les médecins, l’élite, l’enseignant, le marchand ambulant, les gens ordinaires qui continuent de  vouloir rêver de libération et de liberté au lieu de braire docilement comme au bon vieux temps pendant plus près de soixante ans.