Fathi B’chir* écrit – Difficile de répondre. Je me suis sondé et ça donne 33% pour, 33% contre, 33% bof (et 1% sans opinion).


Pour :
• Ce ne serait, si j’ose dire, que justice. Il a fait, il doit payer. Il, Ils: juger ensemble, séparément Ben Ali et les Trabelsi?
• Ce serait un message rassurant pour la population qui aura la satisfaction de le(s) voir trainé(s) (donc humiliés) devant un juge. Acte psy politiquement justifiable.
• Récupération des biens et de l’argent au profit du pays.
• Pour, surtout, les faire dégorger et qu’ils «donnent» tous leurs «complices». Un déballage est toujours bon pour calmer les esprits et esquisser les futures pages d’Histoire.
• La justice tunisienne est compétente mais est-elle en mesure de juger sainement ?

Contre :
• Ils ne sont pas présents, donc… inutile procès.
• Ils ne trouveront pas grand-chose car les Ben Ali/Trabelsi ont, parait-il, veillé à la «légalité» de leurs transactions. Ils ont veillé à l’habillage juridique de leurs actes de «prédation». Ils ont aussi, souvent, «fait faire» par certains de leurs sous-fifres. Le légalisme ne paiera donc pas. Je lui préfère un jugement politique (devant l’Histoire, devant une sorte de Commission Vérité et Réconciliation dans laquelle il sera promis aux anciens dirigeants «normaux», même s’ils ne sont pas forcément «propres», de dégorger… politiquement afin de jeter la lumière sur toutes les anciennes pratiques. Bien sûr, cela n’inclut pas ceux qui ont à répondre devant la justice pour  des actes caractérisés ni, bien sûr, la «famille».
• Juger Ben Ali/Leila Trabelsi? Ce serait tout juste «l’arbre pour cacher la forêt». Le vrai coupable est le «système». Le même, qui a soutenu Bourguiba/Ben Salah/Mzali et ensuite Ben Ali et ses «7-novembristes» zélés et qui soutiendra le prochain, «avec celui qui est debout». Les BA/LT n’étaient que la partie visible de l’iceberg. J’ai soutenu avant le 14/1, contre l’avis de ceux qui croyaient que jeter Ben Ali suffisait à sauver la Tunisie. Je le soutiens toujours: le vrai dictateur est encore sur place. Tapi dans l’ombre, prêt à re-grignoter nos institutions, abuser de notre confiance. Il sera peut-être «Vert», simple acte cosmétique qui effacerait le «mauve» couleur des paillassons.
• Donc, juger Ben Ali et insister à le faire c’est peut-être une façon d’occuper l’esprit des Tunisiens pour faire autre chose… en douce.

Bof:
• Les Tunisiens ne changeront pas. Ils remettront le système sur pied avec un autre, un Sudiste de Sidi Bou (Zid), ou un autre, Nordiste, de Sidi Bou (Said) et la Marsa ou… La logique n’est pas effacée. Persistante.
Cette affirmation reprend le dernier argument sur la permanence du système, l’enracinement des mentalités. La Tunisie s’est révoltée, saura-t-elle faire la révolution? Une révolution dans la révolution, culturelle celle-là. De préférence, pas celle que nous suggèrent ces chers «invités» wahabbitophiles qui nous viennent de Londres et d’ailleurs en Europe.

* Journaliste professionnel depuis 1973, spécialisé dans les affaires européennes, particulièrement les relations UE-Méditerranée, UE-Afrique, et animateur du journal en ligne ‘‘MedAfrique’’ .