Le régime algérien a ressenti les révolutions de la Tunisie et de la Libye comme une menace mortelle pour sa propre pérennité. Pris de vitesse par la fulgurante révolution de jasmin, il n’a pas eu le temps de la contrarier. Mais il s’est largement rattrapé depuis. D’abord en apportant une aide massive à son compère Kadhafi. C’est uniquement à cause de l’appui sans faille du régime algérien que Kadhafi n’est pas tombé. Mais les puissances occidentales, qui le savent pertinemment, et qui ont deux fers au feu, tentent de convaincre doucement (…) le régime algérien de lâcher le despote. C’est en cours de règlement, et le voyage récent [à Alger, Ndlr] du ministre français des Affaires étrangères est principalement axé sur ce problème. Il faut ménager, n’est-ce pas, ce partenaire ombrageux qui agite une poire de gros contrats qui dépassent les 300 milliards de dollars.
Les officines de la contre-révolution.
Mais il y a aussi la Tunisie, que le régime algérien veut neutraliser et domestiquer, au point où il dicte au gouvernement transitoire tunisien des desideratas complètement farfelus. Parce qu’il sait qu’il dispose de moyens de coercition particulièrement assassins.
Cela ne fait plus aucun doute, le régime algérien a mis en branle une vaste campagne de déstabilisation de la Tunisie, en même temps qu’il déploie des montagnes de subversion pour aider le criminel Kadhafi à se maintenir au pouvoir.
Cette attitude n’est pas étonnante. Elle est même d’une logique incontournable. Le régime d’Alger, fondé sur la prédation économique, la répression des libertés publiques et la subversion systémique, érigée en mode de gouvernance, ne pouvait pas s’accommoder d’un peuple libéré à ses frontières. Encore moins de deux peuples libérés, après tant de despotisme.
Le président tunisien, qui a (…) appelé les dirigeants algériens à «comprendre les changements démocratiques» qui ont cours dans son pays, s’est exprimé, en vérité, de façon très diplomatique. Parce qu’il ne peut se permettre raisonnablement de dénoncer les agissements chafouins et particulièrement dévastateurs de son puissant voisin, qui use de toutes sortes d’opérations de déstabilisation pour tuer la révolution tunisienne et provoquer le chaos dans ce pays. Il cherche, par tous les moyens, à faire regretter le régime policier de Ben Ali.
Le jour où les langues se délieront, et où les journalistes occidentaux feront un vrai travail d’information, le monde entier sera choqué de ce que le régime algérien a perpétré contre les peuples tunisien et libyen. Ce jour viendra. Et bien plus tôt que ne le croient les officines algériennes de la subversion, et de la contre-révolution.
Le train de la démocratie s’est ébranlé
Le régime algérien n’a pas encore compris que le train de la démocratie s’est réellement ébranlé en Tunisie, qu’il est bel et bien parti, et qu’il il ne s’arrêtera qu’en gare. Une gare nommée liberté.
Ce régime (…) fait tout pour gêner une heureuse transition dans ce pays frère, parce qu’il perçoit la libération du peuple tunisien comme une menace pour sa propre pérennité.
Sachant que le tourisme est une ressource vitale, vraiment vitale, pour la Tunisie, et que les touristes algériens représentent une part très importante de cette manne (la deuxième après les Allemands), il a déployé sa machine de guerre subversive, en faisant courir des rumeurs d’insécurité en Tunisie. Il a réussi à installer une véritable psychose au sein des populations algériennes qui passaient régulièrement leurs vacances en Tunisie, depuis des années.
Nul doute qu’il fera tout pour décourager les Algériens de se rendre en Tunisie cet été, quitte à agir directement au niveau des frontières, comme il sait si bien le faire.
Mais ces manipulations (…) n’arrêteront pas la roue de l’histoire. Le peuple tunisien finira ce qu’il a commencé, parce que sa volonté est inébranlable, parce qu’il est sobre, parce qu’il est heureux d’avoir recouvré sa dignité humaine, parce que ses espoirs sont immenses, que son civisme est à la hauteur de ses rêves, et qu’il parviendra à surmonter tous les obstacles qui sont dressés sur son chemin, par le régime (…) d’Alger, et autres groupes occultes qui espèrent inverser le cours de l’histoire.
Mais nous, Algériens et Algériennes, devons contrer cette volonté (…) du régime (…) qui cherche à punir les Tunisiens, pour avoir chassé ceux qui les broyaient. Nous devons dénoncer la campagne insidieuse du régime algérien. Nous devons la démentir. Pour que tous les Algériens apprennent que la Tunisie est non seulement un pays sûr, mais qu’elle est devenue un pays libre.
Aller à la rencontre d’une vraie révolution
Que tous les Algériens qui ont l’habitude de passer leurs vacances en Tunisie ne se laissent pas dissuader de continuer à le faire. Et que ceux parmi eux qui ne connaissent pas ce beau pays fassent œuvre utile en s’y rendant. Ils découvriront un pays merveilleux, un peuple apaisé et souriant et un accueil fraternel.
Passer ses vacances en Tunisie est devenu un acte militant. Chaque famille algérienne qui passera ses vacances en Tunisie, en plus du plaisir qu’elle y trouvera, apportera une pierre pour la construction de la nouvelle Tunisie. Dans un nouveau Maghreb.
En plus d’éviter à l’économie tunisienne de graves manque-à-gagner, nous agirons contre notre propre régime, puisque ce qui le dérange est forcément dans l’intérêt de nos peuples.
Ces souffrances inutiles que le régime algérien inflige aux Tunisiens sont vouées à l’échec. Parce que le peuple tunisien ne se laissera pas voler son immense victoire (…).
Et que de partout, de tous les pays du monde, du sein même des milieux populaires qui croient en l’homme, et en sa volonté farouche de recouvrer sa dignité, naisse le désir ardent d’aller à la rencontre d’une vraie révolution, pour aller y passer des jours de bonheur, où le soleil tutoie la mer, où les rires des enfants sont des éclats de cristal. Aller passer ses vacances en Tunisie est un acte militant. Que s’y rencontrent tous les hommes et les femmes de bonne volonté, et que la volonté des peuples soit faite.
Le peuple tunisien vivra
L’hymne de la Tunisie ne contient-il pas cette belle sentence: «Si un peuple aspire un jour à la vie, force au joug de se briser, et au destin de se soumettre!»?
Sa belle révolution soufflera sur toute la région, et balaiera les miasmes de l’oppression. Et qui sait? Peut-être parlerons-nous, un jour, de vacances qui ont boosté une révolution.
Le jour n’est pas loin où nos peuples affirmeront leur pleine volonté. Vive la Tunisie ! Vive le Grand Maghreb des Peuples. Vivent tous les peuples de la terre.
* Journaliste algérien installé en France.
Source : ‘‘Le Quotidien d’Algérie’’.
* Les intertitres sont de la rédaction.