Tarak Arfaoui écrit – Peu-à-peu, la pensée unique s’installe. Les hommes politiques refusent le débat. A-t-on chassé un dictateur pour déblayer la voie à d’autres?


En Tunisie, la liberté d’expression est un nouveau-né dont l’âge ne dépasse pas les 6 mois et déjà elle fait ses premiers pas, ses premiers balbutiements, le débat démocratique, à peine amorcé sur des questions essentielles, commence à tourner à la démagogie en occultant l’essentiel des problèmes vitaux qui engagent l’avenir du pays.

Chassez le naturel, il revient au triple galop!
Une dictature est partie et une autre commence lentement à prendre sa place, sous un masque pernicieux, qui n’augure rien de bon pour le pays. Cette nouvelle dictature, celle de la pensée unique, du dogme immuable où la vérité fondamentale et incontestable ne semble détenue que par certains politiciens, après un début sournois, n’a pas tardé à se dévoiler au grand jour, lentement mais sûrement. Les masques sont tombés et quand on chasse le naturel, il revient au triple galop!
Le fameux Pacte républicain, désiré par toutes les franges de la société civile, est en train d’être dénigré et boycotté par les islamistes qui n’ont, cela va de soi, aucun intérêt à signer un document qui est aux antipodes de leurs convictions. Alors toutes les manœuvres vicieuses sont utilisées pour le faire avorter en soudoyant les uns et en menaçant les autres.
Lors d’un récent débat sur la chaîne Nessma TV, nous avons assisté à un scénario que quelques observateurs avertis avaient suspecté longtemps à l’avance, où la duplicité de certains participants n’a d’égale que leur mépris du débat démocratique.
Le représentant du parti Ennahdha, qui n’est pas à sa première sortie médiatique ubuesque, n’a trouvé rien de mieux pour argumenter ses idées que de proférer des menaces et des invectives à l’adresse des journalistes qui l’on acculé par la pertinence de leurs questions. Nous avons alors assisté à un festival d’hypocrisie, de non-dit, d’insinuations en tout genre, d’esquives, de tergiversations et de dribbles à faire pâlir d’envie Messi soi-même; l’autre représentant d’un parti se disant progressiste n’a pas trouvé mieux que le Coran pour argumenter ses positions politiques en défiant l’auditoire de nier les préceptes coraniques! Un autre politicien du parti Al Majd, lors d’un débat sur Hannibal TV, ne s’est pas privé de menacer de quitter le plateau en jetant par terre le micro si la journaliste continue de lui poser des questions embarrassantes sur son passé!

Une nouvelle dictature remplacera-t-elle celle de Zaba?
Où va-t-on mes chers concitoyens? Une nouvelle dictature remplacera-t-elle celle de Zaba? Où va la Tunisie avec des débats politiques pareils? J’ai des frissons dans le dos à la simple idée de voir ces politiciens diriger un jour le pays. Ce n’est qu’un début; qu’en sera-t-il plus tard des débats quand on affrontera des questions aussi vitales que celles de l’emploi, de l’économie, de l’éducation, du tourisme qui engagent le futur du pays?
Pour certains, la solution est simple: boycotter et dénigrer la communication intelligente et pertinente parce qu’elle est très gênante en mettant au grand jour l’incohérence de leur discours, utiliser tous les moyens et en premier lieu la fibre religieuse des Tunisiens pour discréditer et jeter en pâture à l’opinion publique tout journaliste récalcitrant en lui collant l’étiquette d’un mécréant ou d’un sioniste.
Ces procédés dictatoriaux d’un autre âge méritent-ils notre révolution? Ces hommes politiques méritent-ils notre confiance?