Jean Daniel, un grand ami de la Tunisie, qui avait su prendre ses distances vis-à-vis du régime de Ben Ali, a critiqué le Pacte républicain adopté la semaine dernière en Tunisie. Son point de vue mérite d’être connu.


L’auteur de ‘‘La Blessure’’, qui n’hésitait pas à critiquer le bilan de l’ex-président en matière de répression des libertés et des droits de l’homme, et à lui conseiller d’ouvrir son système politique, n’a pas apprécié que le Pacte républicain, adopté par la Haute instance pour la réalisation des objectifs de la révolution, contienne une recommandation selon laquelle la future constitution tunisienne intègrerait, dans ses principes, l’interdiction pour l'Etat tunisien d'accepter une « relation  normative avec l'entité sioniste». Il explique pourquoi dans un post mis en ligne sur son blog ‘‘Carnets d’actualité’’, que nous reproduisons ci-dessous.  
La nuit dernière, une trentaine d’intellectuels tunisiens ont signé une pétition, s’alarmant des dispositions contenues dans ce qu’on appelle le Pacte républicain.
Ce pacte, c’est celui conclu par les représentants majoritaires de la Haute Instance chargée de préparer un programme pour les futurs Constituants, qui seront élus en septembre prochain. Ce pacte était destiné à ne pas laisser les débats et les ambitions s’égarer dans tous les sens.
Or dans le texte de ce pacte, figure selon les pétitionnaires, une disposition inspirée par un anti-occidentalisme régressif et entièrement contraire à l’esprit de la Révolution de Jasmin et du Printemps arabe.
Mais il contient aussi autre chose, à savoir une recommandation selon laquelle la future constitution tunisienne intègrerait, dans ses principes, l’interdiction pour l’Etat tunisien d’accepter une «relation normative avec l’entité sioniste». La rédaction de cette recommandation est stupéfiante. Il ne s’agit pas seulement, ce qui serait normal, d’une solidarité avec le peuple palestinien, quoique ce peuple décide. Il s’agit d’un refus d’accepter l’existence de l’Etat d’Israël qui n’est même pas appelé par son nom. Ce qui signifie que, tout comme le président iranien Ahmadinejad, on souhaiterait sa disparition.
Cette disposition, si elle était acceptée, mettrait la Tunisie au premier rang des Etats arabes et islamistes qui refusent la solution des deux Etats et qui désavouent le président Mahmoud Abbas, de l’Autorité Palestinienne. Dans ces conditions, c’est la Tunisie progressiste nuirait gravement aux forces, à la fois palestiniennes et israéliennes, qui combattent aussi bien les dirigeants israéliens que le radicalisme du Hamas palestinien.
Le plus attristant, c’est qu'à la tête de cette Commission se trouve l’éminent juriste, le professeur respecté de droit international, Monsieur Ben Achour. Jusqu’au dernier moment, les réformateurs croyaient trouver en lui un guide. Mais il s’est rallié à un compromis détestable, en assurant qu’il le pensait provisoire. Les choses seront plus claires dans la journée, mais rien ne peut davantage émouvoir les amis fidèles de la Tunisie que la Révolution de Jasmin a rendus heureux et qui se mobilisent pour aider ce pays.