Au début de cette année bénie, la Tunisie a créé l’événement et s’est érigée en leader sur la scène arabo-musulmane. Elle a aussi fait parler d’elle sur la scène mondiale. Qui l’eut crû? Ce pays peuplé de près de dix millions d’habitants a donné une grande leçon de contestation et de mobilisation.
Une révolution des mentalités
Oui, le peuple tunisien s’est levé comme un seul homme et a exigé le changement. Il avait pris son temps et a fini par conclure que le pouvoir qui ne fait qu’exclure les uns après les autres et monter les uns contre les autres finit par étouffer les uns et les autres, les appauvrir et les asservir.
La jeunesse a fini par constater qu’elle n’a plus d’avenir et qu’à défaut de pouvoir émigrer et fuir sa misérable condition, il lui faut se révolter et ce qui fut fait…
La dictature a essayé de se rattraper, mais les gens, riches des promesses passées, ont tenu bon et ont fini par chasser le dictateur.
L’onde de choc qu’ils ont crée a été extraordinaire et elle retentira encore et encore…tel un tsunami. Un tel événement ne peut qu’être qualifié de révolution.
C’est d’abord une révolution des mentalités. Ayant bravé la mort, la peur a changé de champ, c’est le plus important… Mais, au fait, pourra-t-on maintenir la pression et obtenir un changement digne de ce nom pour couper court à toute tentative de domestication de la révolution?
L’histoire nous apprend que les mouvements révolutionnaires s’essoufflent quand ils se focalisent sur les futilités. Ils pourraient même déboucher sur des dictatures si jamais, à force de puritanisme, ils ne sont pas capables de conclure des compromis salutaires.
Les Robespierre et les Danton, nous n’en avons que faire, nous voulons juste des hommes et des femmes de bonne volonté qui ont le sens des responsabilités et qui sont capables d’aller de l’avant, tout en sachant que rien n’est jamais parfait… Sauf que, parfois, de compromis en compromis, on finit par renoncer à l’essentiel…
Nous sommes tous soucieux de soutenir les efforts du gouvernement provisoire afin de faire réussir cette période transitoire ô combien délicate.
Toutefois, quand on voit les dérives de l’Instance Ben Achour, pour appeler les choses par leurs noms, on ne peut qu’espérer que le sens de l’Etat le monsieur le Premier ministre le poussera à exiger et obtenir les réformes qui s’imposent.
Nous ne pouvons que nous offusquer de constater que ce comité s’est éloigné de ses prérogatives et voudrait se muter en une instance législative et faire fi de toute légitimité démocratique qui ne peut qu’être issue des urnes.
La façon dont ce comité organise le déroulement des futures élections est plus qu’inquiétante.
En effet, les citoyens sont supposés aller s’inscrire pendant un laps de temps très court pour pouvoir exercer leurs droit constitutionnel fondamental qu’est le droit de vote.
Ne tente-t-on pas de limiter le nombre des votants afin de mieux diriger le résultat des élections.
N’est-il pas plus normal que les autorités locales envoient les cartes d’électeurs aux citoyens inscrits au registre de la population de la circonscription et que seuls ceux qui n’ont pas obtenu le document en question trois semaines avant l’échéance doivent aller s’inscrire.
Je n’ose pas imaginer la longueur des files à moins que l’objectif soit tout simplement de limiter le nombre des votants.
Au fond, seule une minorité agissante serait amenée à voter, quant à la majorité silencieuse, supposé voter d’une façon réactionnaire, serait réduite à la marginalisation.
La démocratie est un système de gouvernement qui met tout un chacun sur un pied d’égalité. Le résultat qui en découle n’a de sens que dans la mesure où toute la population a effectivement la possibilité d’y participer.
Le vote n’est pas seulement un droit, c’est un devoir moral qui devrait être une obligation légale vis-à-vis de tous les citoyens majeurs en pleine possession de leurs facultés mentales et physiques. Vouloir maximiser le nombre des votants, c’est montrer qu’on a foi en la démocratie et qu’on n’a pas peur des résultats qui peuvent en découler.
Le peu d’empressement de la population à s’inscrire montre qu’elle a des réserves par rapport à cette inflation de partis politique. Cette réserve pourrait s’estomper au fur et à mesure de l’avancement de la compagne électorale.
Permettre l’émergence de nouveaux leaders
Malheureusement, le système des préinscriptions obligatoire ne permettra pas aux non inscrits de changer d’avis au dernier moment et de pouvoir voter. Est ce normal?
La population exprime aussi des réserves par rapport au système de vote sur l’entièreté de la liste.
Ne pourrais-t-on pas permettre à l’électeur de choisir son candidat au sein de la liste choisie et non devoir favoriser d’office les têtes de listes.
Donner la possibilité à l’électeur de choisir, c’est faire barrage aux pressions exercées au sein des partis pour bien se positionner, c’est permettre l’émergence de nouveaux leaders, pas forcément choisis par les staffs des partis, c’est diminuer le nombre des partis en puissances…
Maximiser les possibilités de choix de l’électeur, c’est permettre au bon sens populaire d’avoir le dernier mot et éviter ainsi des secousses sociales futures préjudiciables pour tout un chacun.
En définitive, la démocratie bien pensée, en dehors des partis-pris, permet de marginaliser les extrêmes, quels qu’ils soient, et limite le pouvoir des directions des partis pour le grand bonheur des simples citoyens
Citoyens, prenons notre destin en main et votons en masse. Il n’y a de légitimité que par les urnes.
* Nationale Suisse - Comptabilité Générale, Bruxelles (Belgique).