Pr Ahmed Miraoui écrit – Les Tunisiens, échaudés par les pratiques de l’ex-parti au pouvoir rechignent à s’engager sous la bannière des partis. Un véritable syndrome dont ils devraient guérir.


Les derniers sondages donnent la confirmation du doute du Tunisien et de son manque de confiance dans les partis politiques. Uniquement 7% des Tunisiens font confiance aux partis politiques. J’appellerais cela l’effet Rcd, sur lequel certains politologues ou sociologues doivent se pencher.
Ce refus de l’encadrement politique, post-révolution, a suivi un fort encadrement politique direct ou indirect, pré-révolution. Une écrasante majorité des agents de l’Etat, du haut cadre au simple ouvrier, étaient enrôlés activement ou passivement par le Rcd. Certains y étaient par intérêt ou pour l’utiliser comme un ascenseur professionnel, d’autres par crainte ou pour se préserver d'un responsable ou d’une opinion qu’on puisse leur reprocher, mais il ne faut pas le nier certains par conviction en pensant servir le pays en servant son régime !
Dans leur inconscient, ces gens se sentent trahis par le régime éjecté, mais aussi ils sont torturés par le sentiment de complicité car ils y ont participé et aujourd’hui il ne peuvent plus se voir dans les perspectives politiques du pays, et encore plus grave, leur positionnement social est bien ébranlé.
La leçon tirée après la révolution est que la majorité des citoyens craint d’être identifiée aux responsables du parti politique auquel ils adhéreront. Le responsable fait une erreur ou on lui reproche un comportement, une interview ou même un ragot et voilà que toute la tribu se voit accusée et désignée comme responsable. Des dissensions peuvent suivre et les adhérents peuvent se voir encore une fois trahis.
Au fait, Ben Ali et les Trabelsi n’ont pas sali que les anciens Rcd, mais aussi tous ceux qui s’intéressent aux responsabilités politiques et par conséquent à «la chose politique». Les réseaux sociaux, jouant avec la crédibilité des différents partis et personnalités, ont fini le travail.
Le Tunisien doit intégrer dans sa culture citoyenne que les partis politiques n’appartiennent pas à des leaders mais qu'ils sont le lieu de débat d’idées et de programmes d’un ensemble d’affinités et que le leader peut changer, démocratiquement, à chaque échéance.
La jeune démocratie tunisienne est en souffrance de naissance, soyons donc indulgents. Probablement, les nouvelles listes indépendantes, par l’exercice du terrain, constitueront les partis politiques crédibles de demain.