Liliana Nefzaoui raconte sa petite mésaventure, samedi 3 septembre, à la poste de La Soukra, où elle s’est rendue avec sa fille pour retirer un colis postal.
Devant le guichet N° 4, le seul habilité pour délivrer les colis, les gens se bousculaient et formaient une file sans tête ni queue. Il faut dire qu’à la différence des autres services postaux, il n’y a pas de tickets numérotés pour ce guichet. C’est la loi du plus fort qui prime, histoire de «dernier venu, premier servi».
Une file pour les femmes
En connaissance de cause, ma fille est moi, nous nous sommes placées à l’arrière, très sagement disposées à attendre notre tour, les yeux bien ouverts pour veiller jalousement au respect de notre place.
Quelques femmes voilées se tenaient à notre droite, et un homme à gauche, et tout ce beau monde attendait patiemment son tour, devant l’employé visiblement débordé (un barbu sans moustache, de ceux qui dernièrement se font de plus en plus visibles en Tunisie).
Un dernier client, arrivé à la dernière minute, a pris place derrière l’homme de gauche. Une fois notre tour arrivé, et alors que nous nous apprêtions à déposer le reçu devant le guichetier, le tout dernier venu a voulu nous dépasser, se frayant un chemin à coup de coudes. Devant notre surprise et protestation, car nous étions arrivées avant lui, il nous a rétorqué que nous étions dans la file destinée aux hommes, et que notre place était à droite, dans la file des femmes ! Il invoquait l’existence de certaines lois, divines peut être, que seul lui connaissait.
«Vous allez voir lorsque le Cheikh Ghannouchi va arriver !»
Grande surprise et encore plus d’indignation de notre part. Nous lui avons dit qu’on n’était pas encore en Afghanistan mais en Tunisie, qu’à la poste on faisait la queue sans distinction de sexe, que les femmes avaient ici les mêmes droits que les hommes... Peine perdue : «C'est la loi, nous a-t-il dit (qanoun)» et d’un air menaçant il a réitéré : «Vous allez voir lorsque le Cheikh Ghannouchi va arriver, comment tout ceci va changer» !
Évidemment, je suis restée bouche-bée devant cette nouvelle attitude des citoyens qui, stimulés par le discours ambigu de quelques hommes politiques, sont en train d’établir et d’appliquer de nouvelles règles dans notre société, concernant spécialement les femmes...
Le guichetier, entre-temps, souriait en silence, nous regardant d’un air narquois... disant avec ironie: «Maintenant !» («tawa»), voulant signifier peut être qu’une attitude comme la nôtre, encore possible aujourd’hui, serait éradiquée demain avec l’arrivée du fameux «Cheikh» !
Mixité interdite à la poste de La Soukra !
Liliana Nefzaoui raconte sa petite mésaventure, samedi 3 septembre, à la poste de La Soukra, où elle s’est rendue avec sa fille pour retirer un colis postal.
Devant le guichet N° 4, le seul habilité pour délivrer les colis, les gens se bousculaient et formaient une file sans tête ni queue. Il faut dire qu’à la différence des autres services postaux, il n’y a pas de tickets numérotés pour ce guichet. C’est la loi du plus fort qui prime, histoire de «dernier venu, premier servi».
Une file pour les femmes
En connaissance de cause, ma fille est moi, nous nous sommes placées à l’arrière, très sagement disposées à attendre notre tour, les yeux bien ouverts pour veiller jalousement au respect de notre place.
Quelques femmes voilées se tenaient à notre droite, et un homme à gauche, et tout ce beau monde attendait patiemment son tour, devant l’employé visiblement débordé (un barbu sans moustache, de ceux qui dernièrement se font de plus en plus visibles en Tunisie).
Un dernier client, arrivé à la dernière minute, a pris place derrière l’homme de gauche. Une fois notre tour arrivé, et alors que nous nous apprêtions à déposer le reçu devant guichetier, le tout dernier venu a voulu nous dépasser, se frayant un chemin à coup de coudes. Devant notre surprise et protestation, car nous étions arrivées avant lui, il nous a rétorqué que nous étions dans la file destinée aux hommes, et que notre place était à droite, dans la file des femmes! Il invoquait l’existence de certaines lois, divines peut être, que seul lui connaissait.
«Vous allez voir lorsque le Cheikh Ghannouchi va arriver!»
Grande surprise et encore plus d’indignation de notre part. Nous lui avons dit qu’on n’était pas encore en Afghanistan mais en Tunisie, qu’à la poste on faisait la queue sans distinction de sexe, que les femmes avaient ici les mêmes droits que les hommes... Peine perdue : «C'est la loi, nous a-t-il dit (qanoun)» et d’un air menaçant il a réitéré: «Vous allez voir lorsque le Cheikh Ghannouchi va arriver, comment tout ceci va changer»!
Évidemment, je suis restée bouche-bée devant cette nouvelle attitude des citoyens qui, stimulés par le discours ambigu de quelques hommes politiques, sont en train d’établir et d’appliquer de nouvelles règles dans notre société, concernant spécialement les femmes...
Le guichetier, entre-temps, souriait en silence, nous regardant d’un air narquois... disant avec ironie: «Maintenant!» («tawa»), voulant signifier peut être qu’une attitude comme la nôtre, encore possible aujourd’hui, serait éradiquée demain avec l’arrivée du fameux «Cheikh»!