Haykal Fakhfakh* écrit – Le tourisme en Tunisie passe l’une de ses périodes les plus difficiles non seulement depuis le 14 janvier mais depuis la crise économique de 2008.
Une crise qui a affecté le pouvoir d’achat du premier touriste de la Tunisie, «le citoyen européen», et une révolution qui a fait bouder la destination tunisienne par les tours opérateurs et les «citoyens européens» en raison d’une instabilité sécuritaire et politique.
Sauver un secteur vital
Le gouvernement tunisien devrait agir pour sauver un secteur vital de l’économie et l’un des principaux employeurs de la main d’œuvre tunisienne.
Ce dernier n’a pas lésiné sur les moyens et n’a eu aucune gêne à dépenser quelques dizaines de millions d’euros à coups de pub et d’affiches promotionnelles partout en Europe. Un choix coûteux, à moyen terme et très mal étudié ! Y a-t-il d’autres idées moins chères ? Et plus efficaces ?
Les idées ne manquent pas si on observe d’autres pays en plein boom touristique tels que les pays de l’Europe de l'est (Roumanie, Hongrie, République Tchèque, Pologne). Leur clé de succès est simple : une ouverture partielle du ciel national et une mise sur les villes munies d’aéroports et délaissés économiquement.
L’idée consiste à vendre à tarif plus bas les taxes d’aéroports aux compagnies aériennes (taxe sur le stationnement de l’avion, taxe d’aéroport par passager, taxe des services carting au sol).
Cette baisse de taxe qui ne coûte pas grand-chose pour les contribuables tunisiens permet d’attirer les tours opérateurs et les compagnies low-cost et même encourage à créer des transporteurs tunisiens à bas prix.
Les aéroports qui peuvent bénéficier de cette initiative sont ceux qui manquent de trafic et qui n’opèrent pas plus de 2-4 vols par jours tels que les aéroports de Sfax-Tyna, Gafsa, Gabès et Tabarka.
Une fois que le pari d’un tarif de stationnement et de service plus bas que les autres est établi, l’aéroport peut miser sur les autres services vitaux pour tirer des plus-values, à savoir les contrôles techniques, la maintenance et l’entretien des avions.
Une telle idée peut booster l’activité aéroportuaire de la ville, stimuler le tourisme local, et développer une économie liée comme le transport aéroport (ville, guides...).
Les obstacles actuels
Le touriste de l’Union européenne (UE) est de plus en plus préoccupé par un voyage qui coûte moins cher.
En Tunisie, le principal obstacle au tourisme a longtemps été le monopole de la compagnie nationale sur le ciel aérien et le refus d’intégrer la convention Open Sky. Résultat : Tunisiar impose des prix non compétitifs pour se rendre en Tunisie, limite sous forme de quotas le nombre de liaisons quotidiennes pour les autres compagnies et la principale victime reste les hôteliers et les tours opérateurs tunisiens (dépourvus de leurs propres compagnies de transports à l’instar de TUI avec Corsair ou de Marmara) qui sont obligés de se rabattre sur les prix des chambres et obtenir des bénéfices médiocres ; ce qui affecte entre autres la qualité du service et le nombre d’embauchés dans le secteur.
Coûteuses campagnes publicitaires
Selon des sources assez précises, la campagne publicitaire pour relancer la destination tunisienne a coûté entre 50 et 60 millions de dinars pour des spots publicitaires et des affiches promotionnelles en Europe, une offensive de marketing coûteuse, mal ciblée et valable à court terme.
Il existe beaucoup d’autres méthodes publicitaires indirectes qui ont été développées au fil des années par des agences spécialisées pour la promotion du tourisme à moindre coût. En observant les magazines people qui traquent le moindre déplacement des personnalités du show-biz et qui ont un public grandiose, l’Etat tunisien et l’Office national du tourisme tunisien (Ontt) peuvent inviter certaines stars pour se rendre en Tunisie dans un luxueux voyage. Automatiquement, la presse va envoyer des paparazzi qui traceront ses célébrités et qui vont raconter leurs histoires à la Une des journaux ... une publicité pratiquement gratuite pour un large public.
L’Ontt dites-vous ?
L’une des principales structures représentatives de la Tunisie reste toujours absente sur les grands marchés mondiaux et en plein essor dans le monde. Elle n’est présente que dans 11 des 27 pays de l’UE, totalement absente en Chine, Japon et Corée du Sud. Ce sont pourtant des marchés estimés à quelques centaines de millions d’euros.
Il existe aussi un manque de portails et de sites internet traduits dans les plupart des langues et l’absence d’une organisation entre cette structure et les représentants du tourisme tunisien.
Le niveau des missions diplomatiques tunisiennes dans certains pays est relativement faible ce qui représente une entrave à de futures coopérations économiques entre les divers représentants du tourisme.
Les ambassades tunisiennes arrivent à peine à suivre l’actualité et d’être présentes dans les foires internationales et les manifestations culturelles pourtant considérées comme des éléments important pour faire surgir l’image culturelle d’un pays !
Tout doit être révisé !
Selon les dernières estimations faites par des professionnels de l’économie, la Tunisie aurait perdu presque 20.000 emplois directs et indirects liés au secteur du tourisme et 24 hôtels ont mis la clé sous le paillasson.
La situation devient plus alarmante que jamais et une offensive avec de nouvelles méthodes et de nouvelles équipes devient nécessaire pour la survie de ce secteur.
* Etudiant à la Faculté de pharmacie de Cluj en Roumanie.