Raouf Laroussi* écrit – Une garantie du succès du processus de transition ne peut venir que d’un attachement à l’intérêt supérieur de la nation de la part de tous les Tunisiens.
On est le 23 octobre 2011. On est au bureau de vote. On fait la queue patiemment. Dans quelques minutes, on affrontera l’urne, translucide et d’un beau design en rouge et blanc. On passera d’abord à l’isoloir pour choisir sa liste. Pour donner sa voix. Voter pour choisir, en toute transparence et sans crainte de falsification, ceux qui dessineront les contours d’une Tunisie démocratique, libre, digne et juste.
Accéder au statut de citoyen
Le 23 octobre, des millions de Tunisiens qui étaient des sujets pour lesquels d’autres décidaient et au nom desquels d’autres s’exprimaient ; des millions de Tunisiens accéderont au statut de citoyen. Je rêve ? Ah que non ! Je suis bien moi-même, en Tunisie et bien réveillé ! Je suis rempli d’un sentiment indicible, un mélange de joie, de fierté, de responsabilité et un je ne sais quel autre sentiment de crainte diffuse…
Oui, les séquelles d’une vie sous une dictature, éclairée puis ignare, ne disparaissent pas en un clin d’œil ! Et si, et si, et si… Et si quelque esprit malsain, quelque adepte des manières anciennes, quelque force de l’ombre s’amusait à tout détruire et à nous ramener à la case départ ?! Non ! Ah que non ! De grâce, laissez le rêve devenir réalité ! Je vous lance un appel. Vous, qui êtes tentés de saboter le rêve de ce peuple. Laissez naître la démocratie sur cette terre. Laissez le Tunisien savourer sa citoyenneté. Oubliez vos intérêts égoïstes. Savourez vous-même une citoyenneté, simple, ordinaire, partagée avec… vos concitoyens. Il y va de la grandeur de la nation. De notre grandeur à nous tous ! Et vous autres, à gauche et à droite, et plus loin, dans les centres de supervision du monde et de téléguidage de sa destinée, fermez les yeux le temps que nous asseyons notre démocratie… Il y va de l’avenir du printemps arabe… D’un nouvel essor de cette région du monde soumise à des modes de gouvernance révolues qui la vouent à toutes les misères …
Un seul gagnant : la démocratie !
Aux urnes, Citoyens ! Et, moi, aujourd’hui même, je suis sûr du nom du gagnant ! Il s’appelle Démocratie. A la seule condition que nous tous, riches et pauvres, vieux et jeunes, femmes et hommes, tous y croyions… définitivement ! Une démocratie qui est devenue une condition sine qua non pour l’accélération du développement économique et social du pays. Pour lui donner un nouvel élan. Une démocratie qui est le préalable à tous les chantiers de restructuration qui attendent la Tunisie. Une démocratie, clé de l’avenir. Et, moi, j’ose être optimiste. La rigueur et la qualité du travail de l’Instance Supérieure Indépendante pour les élections (Isie) sont en effet un premier acquis important de la révolution tunisienne qui prouve la capacité d’organisation des Tunisiens. C’est aussi un signe annonciateur d’un déroulement correct des élections. L’effervescence politique qu’a connue le pays est aussi un élément positif du début de construction de l’édifice démocratique. Ainsi la partie visible du processus post 14 janvier s’annonce plutôt rassurante. Espérons qu’aucun élément subversif souterrain ne s’invite dans ce rendez-vous historique. Une garantie du succès de ce processus ne peut venir que d’un attachement sans ambages à l’intérêt supérieur de la nation de la part de tous les Tunisiens et particulièrement de la part des acteurs politiques. Ce patriotisme doit s'accompagner d'un abandon définitif des réflexes autocratiques et d’une adhésion profonde aux principes de la gouvernance démocratique.
* Universitaire, Ecole nationale d’ingénieurs de Tunis (Enit)